Séance du dimanche : Makhno, paysan d’Ukraine

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À l’heure où Vladimir Poutine, ex-colonel du KGB, ressuscite la bonne vieille Sainte Russie impériale en annexant (pour l’instant) la péninsule de Crimée,  ses gisements de gaz naturel et ses bases militaires sur la Mer Noire, un petit rappel en images sur la situation de l’Ukraine au XXème siècle. Ce n’est pas la première fois que l’Ukraine se retrouve prise entre deux feux, entre l’Europe de l’Ouest et la Russie mais l’alternative n’a pas toujours été entre l’ultralibéralisme de l’Union Européenne et l’impérialisme « eurasiatique » inspiré à Poutine par l’idéologue d’extrême droite Alexandre Douguine.

Dans la Révolution russe initiée en février 1917, les bolcheviques ont pris une part active, mais ils étaient très loin d’être les seuls et très loin également d’avoir été les plus actifs. Seule leur prise du pouvoir en octobre 1917, leur installation à la tête d’un État ultra-centralisé et autoritaire, la répression de toutes les composantes du mouvement révolutionnaire ne rentrant pas dans le rang et une politique de propagande particulièrement efficace a pu installer et matraquer une vision  bolchevisée de la Révolution.

En Ukraine, les forces révolutionnaires, celles qui ont organisé les soviets et lutté contre les colonnes des Russes Blancs contre-révolutionnaires armés et financés par les pays capitalistes n’étaient pas bolcheviques. Elles étaient anarchistes, communistes-libertaires et organisée dans un mouvement à la fois urbain et rural, à l’image de l’Ukraine de l’époque. Ce mouvement, « l’armée révolutionnaire insurrectionnelle ukrainienne », plus connu sous le nom deMakhnovtschina, s’est constitué d’abord contre l’abandon aux forces Austro-allemandes de l’Ukraine par la paix de Brest-Litovsk de mars 1918 (paix signée entre le pouvoir bolchevique et le Reich allemand) et pour la poursuite de la révolution. Son leader, Nestor Makhno, qui avait lutté contre le pouvoir tsariste auparavant en participant aux activités illégalistes de redistribution au sein de l’« Union des laboureurs pauvres »  organise les soviets –des conseils ouvriers et paysans– à partir de sa région d’origine, Houiliaïpole, au sud-est de l’Ukraine, avec une forte implantation en Crimée. Dans un premier temps allié à l’Armée Rouge pour chasser les colonnes blanches du maréchal tsariste Denikine puis de Wrangel en 1919-1920, le mouvement makhnoviste finit logiquement par s’attirer l’hostilité du pouvoir soviétique russe. Trotski –qui était encore très en cour à Moscou et dirigeait l’Armée Rouge- ordonna les opérations militaires pour écraser le mouvement populaire ukrainien, de même qu’il supervisa la répression sanglante des marins de Kronstadt, autre faction essentielle des forces révolutionnaires en 1917, qui contestait l’autoritarisme bolchevique.

Dès 1921, Makhno, défait, doit s’exiler. Il passe les dernières année de sa vie à Paris, travaillant comme ouvrier chez Renault à Boulogne-Billancourt et participe aux principaux débats du mouvement ouvrier en marquant le courant communiste-libertaire jusqu’à sa mort en 1934. Comme pour bien d’autres révolutionnaires, Makhno fut la cible de campagnes de calomnies venues des relais communistes français des normalisateurs staliniens : bandit de grand chemin, aventuriste et, surtout, antisémite. Une accusation qui a la vie dure, puisqu’on l’entend encore aujourd’hui jusque dans les rangs libertaires. Sur ce point, on renverra à ce qu’en dit Voline, dans La Révolution inconnue. Compagnon de route de Makhno, organisateur de la Confédération d’Organisations Anarchistes d’Ukraine (Nabat), qui avait rejoint laMakhnovtschina et ne peut être soupçonné de complaisance vis-à-vis des organisateurs de pogroms de l’époque.

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VU SUR http://quartierslibres.wordpress.com/