A propos du meurtre d’un jeune antifasciste parisien

Considérations sur l’assassinat de Clément Méric

“La lutte contre le fascisme ne peut être menée de façon efficace qu’en frappant les institutions politiques et économiques, dont il émane et dont il tire sa source. Les révolutionnaires, du reste, qui visent à la chute du capitalisme et de l’Etat, s’ils se laissaient attirer par le fascisme, comme un éclair par le paratonnerre, s’ils consacraient leurs forces et s’ils s’épuisaient à le combattre seul, rendraient un service aux institutions; institutions qu’ils souhaiteraient pourtant démolir”.

Luigi Fabbri, anarchiste italien,

in “La contre-révolution préventive”, 1922

http://pix.toile-libre.org/upload/original/1370811384.jpgL’assassinat de Clément Meric, jeune antifasciste parisien, par ailleurs décrit comme anarchiste et vegan, n’est pas -comme on a pu le lire un peu partout- uniquement le fait de la “violence” des “groupes d’extrême-droite” ou le résultat d’une “rixe”, et moins encore un “fait divers”. C’est un meurtre avec une motivation politique, fruit d’un climat et d’une dynamique amorcée il y a déjà un moment. Climat qui est conforté par l’actuel gouvernement (et les précédents) qui premièrement laisse la part belle à des mouvements réactionnaires, hétéro-patriarcaux et fascisants du type “printemps français” ou de la “manif pour tous”, mais d’autre part cultive depuis des années une répression féroce contre toute initiative révolutionnaire, et un violence oppressive simplement “trop commune” contre les pauvres en général ou encore contre les immigré-e-s.

Mais qu’on ne s’y trompe pas : les mouvements du type “Manif pour tous”, “Printemps français”, et autres agitations réacs, catholiques intégristes et néo-fascistes ne sont pas le terreau sur lequel prospère la violence politique de type fasciste, mais bien un autre symptôme de ses symptômes. Symptôme de la nouvelle contre-insurrection préventive (puisque c’est bien en ces termes là que parlent les Etats et leurs institutions) amorcée en France au moins depuis les émeutes de 2005 et le mouvement du printemps 2006 (dit “Anti-CPE”), et un peu partout dans le monde ces dernières années, contre les efforts révolutionnaires et contre toute révolte contre les conditions de vie qui nous sont faites.

La mort tragique de ce camarade non seulement en appel malheureusement d’autres (puisqu’il n’y aucune raison – sinon temporaire – pour que les fascistes continuent d’agir comme ils l’ont toujours fait, et pire encore), mais doit emporter avec elles quelques illusions sur l’antifascisme : il ne peut pas, et ne pourra jamais se concevoir comme une lutte spécifique et séparée, ou menée par des spécialistes. Il doit s’inscrire dans la lutte contre toutes les formes de domination, contre le capitaliste, et contre l’Etat. Luttes et révoltes diverses auxquel-le-s certain-e-s antifascistes, comme Clément, ont pris part jusqu’à maintenant.

Sans quoi on se condamne à laisser intactes les racines de ce qu’on prétend combattre.

En effet, ce qu’on appelle le fascisme, ou toute autre forme de “contre-révolution préventive” (pour reprendre le nom de l’ouvrage de Luigi Fabri), ne s’incarne pas seulement, ni essentiellement dans les groupuscules nationalistes, nazis ou fascistes qui n’en sont que la queue de pan, ou le sommet de l’Iceberg (au choix).

Il s’incarne bien plutôt dans la violence du système étatico-capitaliste au quotidien, et la nécessité pour ce dernier de renforcer en permanence ses fondations, tout en produisant et laissant croître toutes formes de “violences illégales” et autres “initiatives citoyennes” qui le protègent et assurent sa pérennité, en particulier dans les moments de troubles.

Il s’agit, en dernier lieu et à tout prix, de préserver un certain type de rapport social.

Qu’on ne s’illusionne donc pas à ce sujet : la dissolution des Jeunesses Nationalistes Révolutionnaires (si elle a bien lieu…) ou d’autres groupes nationalistes et fascistes non seulement ne changera rien au problème, mais n’est certainement pas une “victoire”. Car au delà de l’absurdité qui consiste à se reposer sur les décisions du ministère de l’intérieur, le terreau sur lequel prospère la violence autoritaire, oppressive et réactionnaire de ces groupes trouve ses fondements dans la réalité quotidienne de l’exploitation, de la domination, et de la violence du capitalisme et de l’Etat.

Autant les rafles de sans-papiers que les “veillées citoyennes” dans les halls d’immeuble, et l’intégration parfaite du Front National dans le jeu de la politique. Autant les cordons de CRS que les organisations “révolutionnaires” qui appellent au clame pendant les émeutes, autant les agressions et le bashing hétéro-sexistes revendiqués (ou pas) que l’assimilationnisme social-démocrate et ses mensonges, autant les “travailleurs sociaux” qui poucavent que les lois racistes, autant la psychiatrisation des soit-disant “déviants” qu’une population toute entière sous antidépresseurs, autant les milices privées utilisées dans les expulsions locatives que les vigiles d’entreprise, autant les briseurs de grève bénévoles que la police et les syndicats jaunes, autant le mépris de la vie animale que la cruauté envers les humains, autant les groupes catholiques intégristes que les journalistes aux ordres, etc.

Concernant, justement, le traitement médiatique et politique de cette “affaire” : elle s’est faite en plusieurs phases. D’abord, la première récupération social-démocrate du Parti de Gauche et du Front de Gauche qui se sont empressés de venir faire les charognards sur le cadavre encore chaud du camarade (et ce n’est malheureusement pas une image puisque le communiqué du P.d.G a été pondu dans l’heure suivant son décès) qui sera ensuite décrit par les médias comme “proche du front de gauche” (direct matin du 7 Juin), alors que rien n’est moins faux. Un parti qui ose venir nous parler de “république” et de “non-violence”, et se demandent pourquoi ils se font huer et insulter. Ensuite, la seconde récupération sociale-démocrate, celle du Parti Socialiste au gouvernement qui en même temps que ses ouailles se pavanent au rassemblement à Paris (même si ils s’en sont heureusement faits chassés), envoie sa police faire une rafle massive de sans-papiers dans le quartier de Barbès (voir communiqué ci-dessous).

Le traitement médiatique enfin, qui offre une tribune inespérée au dirigeant des J.N.R, le désormais tristement célèbre Serge Ayoub, qui en profite lui aussi pour “condamner la violence de l’extrême gauche” en jouant les victimes sur toutes les chaines qui lui tendent un micro et une caméra. On retiendra quand même (pour la rigolade) sa tirade sur “la grève générale et la non-violence” quand les journaleux lui demandent quelles sont ses armes.

Certains médias, type TF1BFM Tv, l’Express, le Figaro ou le Parisien (pour ne citer que les plus fameux), n’hésitent pas quant à eux à mettre sur le même plan les fascistes et leurs adversaires, renvoyant dos à dos les deux parties : qu’ils ne s’étonnent pas ensuite de faire des cibles remarquables.

Car, en effet, médias, gouvernement, sociaux-démocrates de toute engeance, et Serge Ayoub (et donc les J.N.R), tous sans exception -avec plus ou moins de nuances- se retrouvent dans la condamnation morale de la violence révolutionnaire (ou même défensive d’ailleurs) lors même qu’il ne s’agit pas de ça à priori. Même et surtout quand les fascistes tuent, on s’empresse de rappeler dans une urgence paniquée qu’il faut s’en remettre “à la République et à la Démocratie” et ne surtout pas céder aux passions révolutionnaires…

Nous savons donc désormais mieux que jamais ce qu’il nous faudra, entre autres, assumer.

Action directe contre l’Etat et le capitalisme, contre la récupération et les discours moralisateurs. Contre la république, la social-démocratie et le fascisme.

Le Cri Du Dodo

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[Quelques communiqués et tracts avec lesquels nous sommes à peu près d’accord]

Les assassins de Clément Méric

Source : Panthères Enragées

Le gang fasciste qui a assassiné Clément Méric,  un camarade antifasciste, vegan et anarchiste, est composé d’Esteban Morillo et de sa copine Katia Veloso. Ces ordures avaient voulu créer un groupe de “Section défense animale” et étaient présents lors d’une marche anti-fourrure.

Nous avions dénoncé cette présence fasciste. Les organisateurs,  soutenus par la fondation brigitte bardot, n’avaient pas trouvé opportun d’exclure ces individus de cette marche. Pour nous, ces organisations ont du sang sur les mains et ils ont permis à ces assassins de venir faire du repérage des militants veganEs antifascistes. Une proche de ces assassins étaient venus provoquer les veganEs antifascistes à la marche d’Emagny contre la fourrure et les prendre en photo Info ici.

Nous publions les informations sur ces personnes que nous avons trouvé sur le net ;

Katia Veloso :

Membre de troisième voie et à l’initiative de la section défense animale.

Les membres de troisième voie à la marche contre la fourrure :

Le tueur Esteban sur la droite à coté de la militante Nath Animaliste (pseudo facebook) :

Katia Veloso à la même marche :

Serge Ayoub dénonçant les veganEs antifascites :

veganantifa

Nous, veganEs antifascistes demandons à chaque personne de la protection animale ou de la libération animale de prendre ses responsabilités face à ces individus. Ils doivent être chassés de tout nos rassemblements.

Nous avons dénoncé dans les rassemblements la présence de ces fascistes, nous savions que des personnalités de la protection animale connaissaient les opinions politiques de ces individus et qu’ils ont fermé les yeux.

NI OUBLI, NI PARDON !

Nous, veganEs Antifascistes, sommes opposéEs à ces individus et la libération animale comme lutte révolutionnaire antispéciste d’émancipation n’a rien à voir avec le fascisme !

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L’état et la démocratie ne seront jamais des remparts face au fascisme

vendredi 7 juin 2013

Source : Indymedia Paris

Jeudi soir, Clément Méric, militant syndicaliste et antifasciste a été assassiné par des néo-nazis à Paris. Nombreux sont celles et ceux qui, se reconnaissant dans son engagement, ont été saisi d’effroi par cette tragédie d’une vie brisée en quelques secondes. L’expression de la colère et de la douleur suscitée par sa mort ont du mal à se frayer un chemin au milieu du vacarme médiatique et des commentaires autorisés de toutes les crapules politiciennes. Les charognards sont de sortie qui se ruent sur le cadavre pour promouvoir la défense de leur sainte trinité : l’Etat, la République, la Démocratie.

Pour autant, la gauche de pouvoir est dans son rôle quand elle s’appuie sur une vision purement morale de l’antifascisme. Pour donner en exemple les temps bénis du présent, rien de mieux que d’agiter la menace du retour à un passé obscur et barbare. En désignant le fascisme comme ennemi principal, on aboutit logiquement à une conséquence : regrouper contre lui toutes les bonnes volontés à partir du plus petit dénominateur commun, sa contradiction fantasmée, la démocratie. On peut donc, comme Jean-Luc Mélenchon, faire de l’antifascisme tout en soutenant un programme social-patriote. On peut aussi, par exemple, vouloir comme Manuel Valls « éradiquer la violence d’extrême droite » le matin et faire rafler 150 sans-papiers à Barbès l’après-midi…

Alors bien sûr la mort de Clément Méric s’inscrit dans un contexte marqué par la résurgence de l’agitation des groupuscules nationalistes, par la campagne homophobe conduite ces derniers mois par les catholiques intégristes, par la stabilisation électorale du FN à un niveau élevé. Faits d’actualité face auxquels le « mouvement social » (feu la lutte des classes) s’est montré impuissant. Pour autant, le fascisme demeure en France une idéologie ultra minoritaire sans véritable impact. Il lui manque pour devenir une véritable force politique deux choses essentielles : une capacité à mobiliser autour de son projet par la violence et l’encadrement social et une fragilisation du consensus telle qu’il apparaisse à l’état et au capital comme le dernier recours pour leur sauvegarde. Le fascisme n’a jamais vaincu la démocratie dans une lutte à mort, il a toujours prospéré sur son épuisement.

La réaction unanime de la classe politique pour condamner le meurtre illustre d’ailleurs la marginalité de leurs auteurs. Arrêtés très vite, il y a fort à parier qu’ils seront condamnés de manière « exemplaire » et que quelques organisations de l’ultra droite seront dissoutes dans la foulée. Du point de vue de la riposte, nous n’avons rien à attendre de la justice et du ministère de l’intérieur. La demande pathologique formulée par les partis et syndicats d’une réponse ferme du pouvoir témoigne de leur faillite sur le terrain social à l’heure où partout en Europe l’état et le capitalisme approfondissent la guerre aux prolétaires.

Il y a en France des fascistes qui tuent au nom de leur idéologie fanatique. Face à eux, nous devons rendre coup pour coup et les empêcher de parader dans les rues afin de ne plus avoir à pleurer la mort d’un camarade de 19 ans. Mais n’oublions pas que ce que redoutent les immigrés, d’avantage que quelques crânes rasés, c’est la police républicaine. Que les roms ces derniers temps ont plus à craindre de leurs voisins citoyens à peine moins pauvres qu’eux et gagnés à l’idéologie sécuritaire et raciste que des partisans d’Adolf Hitler. Que même sans néo-nazis cette société révèle quotidiennement son visage de domination et d’exploitation.

L’état et la démocratie ne seront jamais des remparts face au fascisme

Pas de quartiers pour les nazis, pas de quartiers pour l’état, pas de quartiers pour le capitalisme

Contre la barbarie de ce monde-ci, et pour que le meurtre de Clément Méric ne trouve pas son ultime dénouement dans un tribunal, ranimons dans les luttes et dans la rue la lueur vacillante d’un futur révolutionnaire.

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Contre tous les fachos

vendredi 7 juin 2013

Source : Indymedia Paris

Contre les nazillons de service, les identitaires, les France aux français, les Soral, Ayoub, Gabriac, Dieudonné, et tous les adeptes du bras levé. Contre les racistes patentés, contre ceux qui ont la haine des reubeus, des renois, et contre l’antisémitisme bien installé, contre l’« islamophobie » galopante. Contre les patriotes et les apologistes de la Nation, contre toutes celles et ceux qui sont à la recherche de bonnes vieilles valeurs en ce temps de crise, du genre : le travail et la méritocratie, la famille et le mariage, la patrie et la France des terroirs. Contre le poujadiste « produire français » (qu’est-ce qu’on en a à foutre ?!). Contre la franchouillardise crasseuse et les populistes de gauche comme de droite. Contre tout ceux qui flattent ces bas instincts pour leur petit pouvoir…

Contre les chantres de l’ordre moral, qui voudraient nous dire avec qui, quand et comment on baise. Contre ceux qui nous disent qu’il faut pas être pédé car « c’est sale », car « la nature c’est papa dans maman », car « les homos au bûcher ». Contre tous ceux qui nous sermonnent, à coups de religion, de prières, de « y a écrit dans le bouquin », de « bidule l’a dit il y a X siècles », de « c’est péché, c’est mal »… et qui nous disent plus généralement d’accepter notre pauvre sort sans broncher.

Contre les fâcheux qui s’ignorent car ils sont de « gauche » : tout comme leurs voisins de « droite », ils n’aiment pas les rroms, ni trop les pauvres d’ailleurs, ni trop les gens ivres le soir dans la rue d’ailleurs, ni trop les racailles d’ailleurs, ni trop les prolos d’ailleurs… par contre ils aiment, sans trop l’avouer quand même, l’ordre et la sécurité, et bénissent ceux qui installent de la vidéosurveillance de partout, des flics à chaque coin de rue et de la sécurité aseptisante dans les moindres recoins. Contre tous les petits fachos à cheveux longs, contre tous les petits fachos bobos bien intégrés bien nourris bien démocrates bien branchés.

Contre la police. Contre la police sarkoziste. Contre la police socialiste. Contre les flics, les vigiles, les militaires.

Contre le réflexe fasciste et réac, malheureusement si facile à activer en temps de « crise », car on sait que ça toujours été l’instrument favori de ceux qui sont au pouvoir pour nous diviser (et pour mieux régner), nous autres les exploités, les galériens, les pauvres.

(A)

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Violences d’extrême droite, violences d’état [relayé pour info]

vendredi 7 juin 2013

Source : Indymedia Paris

Mercredi 5 juin 2013, un jeune camarade de notre union syndicale a été battu à mort par un fasciste. Le lendemain, à l’heure même où nous étions réuni-e-s en silence à l’endroit où Clément avait été tué, nous recevions des sms nous informant que le ministre de l’intérieur organisait une rafle massive de sans-papiers à quelques stations de métro de là, à Barbès.

Ceci n’est pas possible, nous vivons cela comme une insulte à la mémoire de Clément, de ses engagements. Le fascisme c’est un ensemble. Un gouvernement PS ne peut appeler à participer à un rassemblement contre la violence fasciste et dans le même temps organiser une rafle. Une époque ne se définit pas comme fasciste uniquement lorsque quelques individus extrémistes se sentant tout puissants tuent en plein cœur de la ville.

Quand un gouvernement rafle des personnes par centaines dans un quartier bouclé, cela participe d’un ensemble. La chasse aux rroms qui ont des papiers européens et aux africain-e-s qui n’en ont pas participe du même contexte politique que les manifs et discours homophobes et que les violences de rue des skinheads et groupes nationalistes fascistes. Le fascisme c’est un ensemble.

Face à la montée du fascisme, chacun-e se retrouve placé-e face à sa responsabilité. Appeler à des manifs ne suffira pas à dédouaner ceux qui ont fait le choix de la discrimination vis-à-vis des étrangers. Clément Méric (nous citons son prénom et son nom, car c’est ainsi qu’on parle d’un militant adulte et responsable) ne restreignait certainement pas son combat antifasciste aux seuls extrémistes au crâne rasé. Ce soir nous sommes en colère, nous sommes écœuré-e-s, et nous pensons devoir à sa mémoire de ne rien concéder ni sur les violences d’extrême droite, ni sur les violences d’état : les rafles organisées doivent cesser ! Liberté de circulation pour tou-te-s ! Le fascisme est une gangrène, soit on l’élimine soit on en crève !

Isabelle et Olivier, instits et syndicalistes

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Communiqué suite à la manifestation en hommage à Clément à Poitiers

Source : L’Epine Noire.

Le jeudi 6 juin à 18 h 30 a eu lieu à Poitiers comme dans de nombreuses autres villes une manifestation organisée à l’appel du groupe unitaire contre l’extrême droite de la Vienne à la suite de la mort de Clément Méric à Paris. Nous avons été agréablement surpris de l’ampleur de la manifestation organisée dans la journée même (entre 250 et 300 personnes), mais nous avons cependant quelques critiques à émettre et besoin de rappeler certains faits.

Nous nous étonnons que des cadres du Parti socialiste de la mairie de Poitiers soient venus sans honte se montrer en mémoire de quelqu’un qui les combattait politiquement. En effet, rappelons que Clément était certes un militant antifasciste mais qu’on ne saurait le réduire à cela. Il était révolutionnaire, et impliqué dans les luttes contre le capital et fatalement contre le gouvernement socialo-écologiste actuel. Antifasciste convaincu, il militait aussi contre toutes les formes d’exploitation et de domination : le sexisme, le racisme et l’homophobie…

Revenons à la manifestation poitevine, non déclarée comme le veut la tradition ici, et regroupant des individus (libertaires ou proches), encartés de gauche et d’extrême gauche et autres membres d’associations. Voilà bien longtemps que tout ce beau monde n’avait pas été réuni. En effet, le bras de fer entre la mairie socialiste et les associations, les anarchistes et surtout dernièrement le DAL 86 dure depuis plusieurs années, et la gouvernance de M. Claeys nous montre le véritable visage de la social-démocratie depuis.

Nous avons donc pu voir nos braves cadres locaux se retirer du cortège au niveau de la mairie alors que ce dernier évoluait vers la préfecture. Très bien, nous dirons-nous, mais cette manœuvre semble aussi avoir été tactique. Car, plus d’une heure après la fin de la manifestation, deux personnes ont été arrêtées et emmenées au poste pour « manifestation illégale » et « outrage aux forces de l’ordre » (des « Flics porcs assassins » s’étant glissés dans les slogans scandés). Ces deux personnes seront relâchées le lendemain et passeront en Comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC). Devant le procureur, donc. Mais le fait intéressant à noter ici est cette phrase lâchée par un conseiller municipal et conseiller de Grand Poitiers bien connu comme bureaucrate de la lutte (notamment au sein des MJS lors du mouvement anti-CPE) : « Ce n’est pas une manifestation, mais un rassemblement silencieux contre les violences de l’extrême droite ». Voilà, tout est dit. Vous vous êtes fait attraper ? Vous ne pouvez que vous en prendre à vous-mêmes. Il ne fallait pas faire de manif (ou du moins pas jusqu’au bout)… puisqu’il existe une pression de la préfecture vis-à-vis des manifestations non déclarées depuis environ un an, et relayée par son chien de garde édenté : la mairie.

Ici donc, les socialistes poitevins suivent la ligne dictée par l’Elysée et le taulier de la place Beauvau : s’émouvoir de manière hypocrite sur la violence et la dangerosité idéologiques des groupes fascistes bien connus. Alors que ce sont ces mêmes socialistes qui, de par leur politique, ne contribuent point à faire reculer les pratiques et idées de l’extrême droite ; bien au contraire, celle-ci s’en est servie à plusieurs reprises afin de gagner des élections, de promouvoir des politiques sécuritaires de la République (n’oublions pas que les centres de rétention, ces prisons démocratiques pour étrangers, datent de l’ère mitterrandienne). Par ailleurs, le jour même où Clément a été agressé, la police de Manuel Valls procédait à une grande rafle de sans-papiers dans le quartier populaire de Barbès à Paris. République, sacro-sainte République! Tel un chant incantatoire, ce terme sonnait creux pour Clément et ses camarades ! Alors, fichez-nous la paix avec cet appel à un front républicain chimérique.

La République n’est qu’un champ de bataille symbolique pour les aspirants au pouvoir, ça fait bien longtemps que son caractère attractif et magique n’opère plus ! Bref, nous nous opposons fermement à cette tentative de récupération étatique de la mort de Clément.

De plus, nous pensons que la dissolution de groupes fascistes ne changera pas la donne. Hormis leur caractère symbolique orchestré par le pouvoir et une partie de la gauche, l’Histoire nous a montré à plusieurs reprises que la dissolution de ces groupes est un leurre (des Ligues des années 1930 à Unité radicale des années 2000, en passant par Ordre nouveau des années 1970) : ils se sont toujours reformés, ils ont juste eu besoin de changer de nom. Mais nous n’appelons pas non plus à une « justice pour Clément ». Cette justice qui nous condamne aussi bien et que nous combattons tous les jours.

Soulignons que depuis plusieurs années les fascistes et autres nazillons ressortent dans la rue et souhaitent la reprendre, galvanisés par les scores de leurs homologues dans de nombreux pays en Europe (Grèce, Hongrie…) sur fond de crise économique. Nous ne découvrons rien, dans plusieurs villes les fascistes sont très actifs, et s’adonnent à des actions violentes et/ou symboliques : Lyon, Toulouse, Tours, Besançon, etc. Mais les dernières manifs contre le mariage homosexuel leur ont permis de se rencontrer, de recruter, bref d’avoir un nouveau souffle, avec la complicité des médias ayant offert leurs micros sur des plateaux d’argent à des mouvements réactionnaires de toutes sortes disséminant leurs discours haineux.

Par exemple, nous avons remarqué qu’ils sont de plus en plus présents sur Poitiers, du moins par leurs affiches et autocollants. Qu’ils soient à Méridien Zéro, au Mouvement Action Sociale, au Parti de France, à l’Œuvre Française ou au plus traditionnel Front National, les militants fascistes tentent de s’implanter localement et durablement. Ils se sentent même pousser des ailes. Pour preuve, début mai ont été découvertes des affiches, collées dans les rues de Poitiers, comprenant les photos de deux militants du NPA avec comme surtitre « Wanted » et cette légende : « Tags dégueulasses, gribouillis partout, panneaux sales, portes tatouées ? Assez ! La police s’en occupe pas on va s’en occuper ! ».

En mémoire de notre camarade Clément, nous souhaiterions que les bureaucrates politiques, membres du gouvernement et autres charognards de la presse fassent profil bas sur le sujet. Pour vous, fascistes, belek : une attaque contre un est une attaque contre tous.

 Dieu pardonne, pas le prolétariat !

 L’Épine noire

tiré du http://lecridudodo.noblogs.org/