Démocrature

cazeneuve+ canon à eau-copie

Les gens intelligents le disent et le font répéter par leurs mainates médiatiques : nous ne sommes pas en dictature, ici c’est l’État de droit et quiconque émet un doute sort du cadre démocratique et fait le jeu des terroristes. En face, donc, c’est le terrorisme et les casseurs. Et c’est un peu pareil, d’ailleurs,casseur, manifestant, terroriste, preneurs d’otages, on s’y perd : Gattaz, celui qui a gagné l’appel d’offre sur l’État, le dit sans détour : la grève, c’est la terreur, et les terroristes qui font perdre de l’argent aux groupes pétroliers ou qui perturbent le droit des affaires dans la rue, il faut les traiter comme ils le méritent. Dégagez-moi tout ça. C’est lui qui possède les droits sur l’État© et il entend bien les faire respecter. Il n’a pas trop de problème d’ailleurs, ses chargés d’affaire ont été bien formés et s’appliquent avec zèle à adapter son acquisition aux besoins de l’entreprise, ce qui doit être le seul objectif de l’équipe. Le contremaître Valls a confié à sa chef de produit El Khomri la rédaction d’un réglement intérieur que le responsable de la sécurité Gazeneuve se charge de faire appliquer et de faire rentrer dans les crânes, le tout sous la bienveillante supervision du gérant provisoire Hollande, qui est commis à la communication. Et comme ils ont la culture du résultat, les statistiques sont bonnes. Surtout celles du maintien de l’ordre des affaires : tout va très bien, de mieux en mieux, même. Les chiffres de la productivité sont démocratiquement communiqués avec une régularité admirable: au 15 mai, à Rennes, un des hauts lieux de l’expérimentation du maintien de l’ordre en mode militaire, le petit monsieur Gazeneuve annonçait, fier de lui, plus de 1300 interpellations, et les responsables ne manquent jamais de mettre en avant toutes les condamnations, depuis, les choses vont encore mieux, Vinci va peut-être même pouvoir ajouter une prison à son futur aéroport pour parquer tout le monde dans le bocage nantais. Peu importe les chefs d’accusation, peu importe l’identité des gueux qui ont été courtoisement pris en charge par CRS ou Gendarmes mobiles, que chacun doit féliciter et que personne ne déteste. Manuel Valls le dit et le répète : n’y a aucune consigne de retenue face aux « casseurs » : un « casseur », ça casse, ça n’a pas vraiment d’identité, encore moins d’idée. C’est un ennemi intérieur, un terroriste, son sort, c’est l’écrasement.

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L’Etat relance une série d’interdictions de manifester pour la manif du mardi 14 juin 2016

Attention, l’État retente le coup, plusieurs personnes participant au mouvement social contre la loi Travail se sont vu notifier samedi par les forces de l’ordre des interdictions d’être présent à la manifestation du 14 juin et dans le quartier de République. Ces décisions « individuelles » vont sûrement continuer à être distribuées dans les jours prochains, à Paris comme en province. Elles sont basées sur l’article 5-3° de la loi sur l’état d’urgence.

Plus précisément il est interdit aux personnes concernées d’être présentes dans les 5e, 6e, 7e, 13e, 14e et 15e arrondissements de Paris entre 10h et 20h mardi 14 juin et sur la place de la République aux alentours de 18h à 7h le lendemain matin.

Important : cette fois, les flics refusent de remettre la décision aux gens concernés, ce qui empêche de faire le recours. Pour pouvoir attaquer la décision devant la justice administrative, il faut impérativement en avoir une copie. Or, les flics font signer l’arrêté mais ensuite refusent de remettre la copie aux intéressé-e-s !

Il faut donc refuser de signer tout papier s’ils ne sont pas en deux exemplaires dont une copie pour vous.

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SAINT-DENIS : RUE DE LA RÉPUBLIQUE Comment survivre à un assaut antiterroriste

Le 18 novembre dernier, le monde entier a pu suivre en direct l’assaut de la police contre un immeuble de Saint-Denis. Deux personnes liées aux attaques du 13 novembre y mourraient, ainsi qu’un membre de leur famille. Immédiatement, l’opération fut décrite comme hyper-violente, on parlait de 5000 balles tirées par la police. Il fallu par la suite sécuriser l’immeuble pour éviter qu’il ne s’écroule. Après quelques semaines, le récit officiel et dithyrambique des exploits du RAID prenait un coup dans l’aile lorsque les premières expertises établirent que les policiers s’étaient principalement tirés les uns sur les autres pendant de longues heures. [1] Au détour de quelques articles de journaux, nous apprenions aussi que des voisins avaient été blessés par la police, d’autres placés en garde-à-vue antiterroriste, et certains en centre de rétention [2]. Si les journaux noircissent encore des pages et des pages à propos des survivants du Bataclan, les habitants de Saint-Denis qui se sont retrouvés à la rue après avoir subi un assaut de plusieurs heures ainsi qu’un certain nombre d’humiliations n’intéressent pas grand monde. Des lecteurs de lundimatin sont allés les rencontrer.

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AG interfacs francilienne contre l’état d’urgence

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Appel à une AG Interfacs contre l’état d’urgence le 12 février à 11h, l’amphi J sera réservé à la fac de Tolbiac.

Depuis la mise en place de l’état d’urgence, des étudiant-e-s (et profs et membres du personnel) se sont organisé-e-s pour s’y opposer : dans de nombreuses facs, des AG (Assemblées Générales) et des réunions publiques se sont tenues, des collectifs se sont montés, des dynamiques ont été lancées.

Aujourd’hui, la situation semble pire que jamais : le gouvernement prétend changer la Constitution pour faciliter l’usage de l’état d’urgence et y inclure la déchéance de la nationalité. Dans le même temps, Valls déclare vouloir allonger l’état d’urgence “jusqu’à la disparition de Daesh” autrement dit à l’infini. En ce moment même, toutes ces magouilles sont en train d’être votées…

Nous n’allons pas nous attarder une fois de plus sur les effets néfastes de cet état d’urgence et son arsenal de mesures repressives sur les mouvements sociaux et les quartiers populaires, mais plutôt sur l’urgence de le contrer. Étudiant-e-s investi-e-s sur nos facs, nous pensons que pour tenir tête à cette réforme, il nous faut nous coordonner et passer à l’action. Le cortège étudiant de la manif parisienne du 30 fut une réussite, malgré la pluie. Une deuxième manifestation a eu lieu à Lyon, rassemblant plus d’un millier de personnes. Mais on ne peut pas se retirer, satisfait-e-s, il faut massifier et intensifier la mobilisation.

Nous convoquons l’ensemble des AGs et collectifs sur les différentes facs, ainsi que les individu-e-s mobilisé-e-s ou non, à se rassembler pour discuter des initiatives mises en place et d’actions concrètes à mener ensemble, le 12 février à 11h à Tolbiac. Nous avons commencé à distribuer l’appel dans les différentes manifs et rassemblements tenus jusqu’ici, ainsi que sur nos facs.

P.-S.

À l’appel d’étudiant-e-s mobilisé-e-s et de l’AG de Paris 1

contact : aginterfacs-etat-durgence[at]riseup.net

suivi des mobilisations : https://www.facebook.com/etudiantescontreletatdurgence/

Pour la liberté : tous et toutes dans la rue le 30 Janvier !

Le 30 janvier a lieu une grande mobilisation unitaire pour la levée de l’état d’urgence. Dès le début de cette mesure nous craignions tous que la liberté soit mise à mal. Nous avons été servi. Perquisitions à la pelle,assignations à résidence, mesures policières sans précédent contre des militants écologistes ou des musulmans, répression des manifestations contre la COP21, répression contre les manifestants qui osaient braver l’état d’urgence… Toutes ces pratiques sont le lot d’un régime autoritaire. Un régime qui veut conserver son pouvoir coûte que coûte, qui ouvre la voie à une démocratie à la Poutine…
Contre cet état de fait, ne nous résignons pas : manifestons le samedi 30 janvier à 14h30 à République !.
Manifestez dans le Pink Bloc, dans le cortège de soutien à la Zad, dans le bloc anarchiste, avec la CGA ou ailleurs, mais ne restez pas chez vous !

A lire aussi : le guide juridique spécial « état d’urgence. »

lire sur PARIS LUTTES INFO

Paris, place de la République : « J’ai déposé des bougies… Puis je les ai lancées »

Témoignage inédit d’un jeune révolté, à l’issue de la manifestation interdite contre la Cop21. Alternative libertaire publie ce récit entre émotion post-attentats et dégoût de l’ordre injuste qui y répond.

Pourquoi j’ai déposé des bougies
sur la place de la République

Déjà c’étaient mes semblables, donc c’est différent, encore plus proches que Charlie et l’Hyper Casher pour lesquels je n’avais rien ressenti en janvier dernier. Et puis c’est des potes que je remercie pour une fois de leurs éternels retards, des connaissances qui sont blessées, des copains de fac qui habitent dans le quartier, des noms de rues et de bars qui évoquent des souvenirs, des habitudes, des « putain j’étais là hier », des « ouf, j’ai failli aller à ce concert », des mauvaises nouvelles qui s’amoncellent comme des cadavres sur un trottoir, les yeux des potes qui racontent les horreurs qu’ils ont vu. Bref c’était chez moi et c’était les miens !

Pourtant, comme pour les tueries de Charlie Hebdo en janvier dernier, au début je n’ai rien ressenti. Mes yeux étaient secs, mon cœur insensible, c’était trop gros, pas palpable, irréel, j’étais pas là, je n’ai rien vu des mes propres yeux. Mais l’addition s’est salée de jour en jour. La succession des mauvaises nouvelles, le pote d’une pote, le frère d’un pote puis 7 amis d’un coup. Là c’est sorti d’un coup. J’ai chialé comme un gosse, un vrai gros chagrin, une tristesse pleine, insondable, une tristesse d’enfant qui se demande pourquoi, coi devant l’incompréhension.

Alors oui j’ai été déposé des bougies place de la République, comme beaucoup de gens, parce que ça fait du bien, parce que ça me fait chié qu’on puisse se faire buter comme ça, parce que c’était des gens que je connaissais ou qui me ressemblaient, parce que ça me touche.

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Après les attentats du 13 novembre à Paris, un mémorial a spontanément vu le jour au pied de la statue de la place de la République
cc Roberto Maldeno

Puis vient la rage, pourquoi ici, pourquoi chez nous, pourquoi pas à la Défense, dans le VIIe ou dans le XVIe, là où il y a sûrement plus de responsabilité au mètre carré. Et puis on en parle, on réfléchit et on se rend compte que notre génération est sur une ligne de crête. Okay c’est génération précaire… mais avec encore quelques trucs à perdre pour certains et ça fait toute la différence.

D’ailleurs c’est le peu qui nous reste et que tout le monde n’a pas qui a été attaqué : faire la fête, se noyer dans la musique, les rires, les soirées de fin de semaine, l’alcool et autres drogues de synthèse. Mais dans cette même génération il y a celle que chante Rhoff et IAM, la génération sacrifiée pour qui « demain c’est loin ». Les morts avaient encore des possibilités de lendemain en tête, les terroristes je ne crois pas, sinon on ne devient pas kamikaze.

Et là je me rappelle de l’après-Charlie, de toute cette symbolique jamais analysée. Qui a été marcher ? Derrière qui ? Et en quel nom ? Toute la France n’a pas été marcher. Les 30% les plus aisés sûrement, ceux qui ont quelque chose et qui se sont sentis attaqués. Et ils ont accepté de marcher derrière les plus grands terroristes de la planète, ceux qui font des milliers et des millions de morts et qui restent en vie sans jamais se mouiller, pas des types qui se font péter et qui heureusement dépassent rarement les dizaines de morts.

Le 13 si, c’est triste. Mais les manifestants, bien sages, biens tristes du 11 janvier, obéissant à l’injonction présidentielle de commémorer les chantres de la liberté d’expression n’ont pas voulu voir que certains n’ont pas manifesté, que certains ne se sont pas sentis attaqués parce que Charlie et la république ne les ont jamais défendu.

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« Plus les déséquilibres imposés à une société sont grands, plus il faut de contrôle pour les préserver. »

« Chaque fois que les autorités intensifient les conflits auxquelles elles nous exposent, ainsi que le contrôle auquel elles rêvent de nous soumettre, elles prennent un risque de plus en plus grand. »

DU 11-SEPTEMBRE AU 13-NOVEMBRE ? QUELQUES LEÇONS D’AMÉRIQUE

Un dialogue entre l’équipe de lundimatin et le collectif d’activistes américains CrimethInc, comparant les suites du 11-Septembre aux États-Unis avec la situation présente en France.

Bonjour, France, et bienvenue dans l’équipe de la Guerre contre la Terreur !Cela fait 14 ans que, depuis l’autre coté de l’Atlantique, vous levez un sourcil désapprobateur en observant notre politique étrangère. Maintenant, vous êtes sur le point d’avoir votre propre état d’urgence, votre propre parti d’extrême-droite au pouvoir, vos propres écoutes administratives sans mandat, vos propres scandales de waterboarding, votre propre Ministère de la Sécurité Nationale. Où allez-vous installer votre Guantanamo ? Pour un maximum d’effet, envisagez de déclencher une nouvelle guerre sans rapport avec la cause des attentats, afin de déstabiliser une autre région du globe et d’attirer d’autres peuples dans le conflit.

Nous autres Américains connaissons bien le sujet. Cela fait maintenant des décennies que les États-Unis sont le gendarme du monde, alors que la France sociale-démocrate se cantonnait à en être la bourgeoisie confortable. Mais auXXIe siècle, tout le monde doit prendre sa part en matière de police. Pour se préserver, la France, pourtant alternative libérale aux États-Unis, doit désormais imiter le modèle antiterroriste américain. Permettez nous de vous montrer les ficelles.

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« CONSTRUIRE DES FORMES D’AUTONOMISATION POPULAIRES ASSEZ PUISSANTES POUR DÉTRUIRE L’HÉGÉMONIE IMPÉRIALISTE »

Mathieu Rigouste est militant et chercheur en sciences sociales. Il est l’auteur notamment de L’Ennemi intérieur (La Découverte, 2009), Les Marchands de peur (Libertalia, 2011)Théorème de la hoggra (Béton Armée, 2011)et La Domination policière (La Fabrique, 2012). Nous reproduisons ici l’intervew qu’il a donné au journal italien Il Manifesto après les attentats du 13 novembre et la promulgation de l’Etat d’urgence.

Dans tes recherches tu élabores une généalogie coloniale et militaire de l’ordre sécuritaire contemporain. Quel rôle a joué, à cet égard, la déclaration de l’état d’urgence lors de la guerre de libération nationale algérienne ?

L’état d’urgence est un dispositif juridique créé à l’origine pour pouvoir mener la guerre coloniale sur le territoire de l’Etat sans paralyser tout le système d’accumulation capitaliste. Il permet en définitive de mener une forme de guerre policière à une partie de la population sans mettre tout le pays et toute son économie en état de siège. La Constitution de la 5e République a été forgée par et pour la guerre dans/contre la population, c’est un système juridique qui donne en permanence la possibilité de suspendre la séparation théorique des pouvoirs, au chef de l’Etat, c’est-à-dire à une fraction dominante de la bourgeoisie à un moment donné. Cette dernière peut ainsi prendre les commandes de la machine de guerre pour la conduire contre une partie du peuple, sans les contraintes de légitimation juridico-légales normalement en œuvre à l’intérieur du territoire pour mystifier « l’Etat de droit » et légitimer le système des dominations « démocratiques ». C’est un modèle constitutionnel que l’impérialisme français a exporté en même temps que ces doctrines de contre-insurrection en direction de nombreux Etats néocoloniaux et/ou sous-traitants. C’est ainsi que des pays comme la Colombie ou un certain nombre d’anciennes colonies françaises en Afrique se sont dotés de ce dispositif constitutionnel en même temps que leurs états-majors militaires puis policiers s’appropriaient la doctrine de contre-insurrection française. Et souvent les matériels qui vont avec. Des société militaro-policières y ont généralement été édifié.e.s pour encadrer la mise en œuvre de systèmes économiques de prédation ultra-libéraux.
L’ « état d’urgence » est un dispositif juridique contre-insurrectionnel. Mais c’est aussi l’un des pivots d’une restructuration juridico-politique de l’Etat-nation qui va permettre aux industriels de la violence, de tirer profit de formes de guerres intérieures d’intensités et de durées variables. Comme de nombreux dispositifs d’exceptions susceptibles d’optimiser les coûts du contrôle, il va être saisi par et pour le capitalisme sécuritaire.
Le décret d’Etat d’urgence a permis pendant la guerre d’Algérie mais aussi en Nouvelle Calédonie en 1985, pendant les révoltes des quartiers populaires en 2005 et encore aujourd’hui d’intensifier les moyens de la chasse aux  « ennemis intérieurs » désignés par les états-majors politiques. Il permet l’emploi de dispositifs visant à paralyser la vie sociale de toute les parties de « la population » suspectées d’être des « terreaux de subversions ». Il a été employé pour déclarer des couvres-feux et industrialiser des perquisitions administratives, multiplier les gardes-à-vue, assignations à résidence et incarcérations arbitraires, il permet de démembrer des réseaux, d’interdire certains lieux et territoires, de les vider de leur population et d’ouvrir des camps d’internement camouflés en « centres administratifs », tout en continuant à faire tourner le marché capitaliste.
Pendant la guerre d’Algérie, le spèctre « anti-terroriste » désignait le « fellagha manipulé par les communistes », il s’agissait de pouvoir écraser les politisations révolutionnaires du peuple colonisé d’Algérie, de son prolétariat immigré en métropole et de tout ce qui combattait contre l’impérialisme français à l’intérieur du territoire.

Les guerres coloniales des années 1950 ont ainsi constitué le laboratoire et la matrice de nouvelles formes de pouvoir et d’accumulation basées sur la possibilité de rentabiliser le contrôle par un usage industriel et rationnalisé de la terreur d’Etat. Il faut expliquer qu’au cours des deux guerres mondiales de 1914-1918 et 1939-1945, les producteurs de marchandises liées à la guerre se sont organisés en strates extrêmement puissantes à l’intérieur des bourgeoisies occidentales. Ils sont devenus des complexes militaro-industriels qui se repaissent de la guerre permanente. Dans les grandes puissances, ils se sont appropriés de grands médias commerciaux pour « promouvoir la pensée de défense et de sécurité dans la population», comme ils le formulent.

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Communiqué unitaire sur St Denis.

Après les attentats et l’intervention du Raid à Saint-Denis : ni stigmatisation de nos quartiers, ni réduction de nos libertés

Si les « attentats de Paris » ont fait la Une des médias du monde entier, on oublie —y compris en France— que le quartier populaire de Saint-Denis à également été durement touché. Et dans les jours qui ont suivit, le quartier à été ébranlé encore, par d’autres violences : celles de la violence policière et sociale qui accompagne depuis le 13 novembre l’état d’urgence, celles dont sont victimes les familles qui ont perdus leurs logements, celles de la stigmatisation et des amalgames, celles du bâillon qui muselle les militantes et militants du quartier. Voilà la déclaration commune des associations, syndicats et organisation du quartier qui ne baisseront pas les bras et luttent dans ce moment difficile.

Dans la nuit du vendredi 13 au samedi 14 novembre, une série d’attentats ont ensanglanté Paris et Saint-Denis en faisant près de 130 morts. Nous condamnons fermement ces attaques meurtrières, nous déplorons les morts, et nous sommes solidaires des blessé-e-s et des proches des victimes.

Mercredi 18 novembre, la ville de Saint-Denis s’est réveillée sous l’assaut du RAID visant à interpeller des terroristes. Trois personnes sont mortes. Trente familles ont perdu leur logement et après une semaine de précarité extrême dans un gymnase attendent encore une prise en charge digne de ce nom, c’est-à-dire un relogement.

Non à la réduction des libertés publiques et à l’état d’urgence !

Ces actes terroristes suscitent parmi nous angoisse et peur. Nous ne sommes pour rien dans ces guerres que nous n’avons pas voulues et nous tous voulons vivre en sécurité. Pourtant, nous refusons la prolongation de l’état d’urgence qui signifie en réalité la restriction de nos libertés. Pas besoin de ces mesures pour enquêter et pour arrêter les terroristes.

En revanche, l’état d’urgence aboutit à l’interdiction de nous rassembler, d’exercer notre droit à nous exprimer et à revendiquer. Ainsi, les manifestations de solidarité avec les migrant-e-s, de la COP 21 ou contre les violences faites aux femmes ont été interdites. Des arrestations et des poursuites inacceptables sont engagées contre celles et ceux qui ont tenté de manifester. De même, de nombreuses perquisitions et gardes à vue se sont faites de manière totalement arbitraires, débouchant parfois sur des bavures, et des obligations de quitter le territoire français déloyales dont nous demandons l’annulation.

Nos quartiers ont droit au respect : pas de double peine pour les quartiers populaires

Nous n’acceptons pas non plus que l’intervention du Raid à Saint-Denis conduise à stigmatiser nos quartiers et à libérer la parole raciste et islamophobe sur les habitant-e-s de Saint-Denis. Les musulman-ne-s et les immigré-e-s n’ont rien à voir avec ces actes terroristes. De même, il est inadmissible de faire des migrant-e-s les boucs émissaires de ces attentats. Oui, il faut les accueillir. Tout simplement parce qu’ils et elles sont les premières victimes de Daech et du régime autoritaire de Bachar El Assad.

Leur guerre n’est pas la notre

Les attentats ont été commandités par Daech, une organisation politique et militaire réactionnaire et fasciste d’inspiration salafiste. Mais comment est née cette organisation ? La guerre et l’occupation de l’Irak menées par les pays occidentaux ainsi que la répression de la révolution syrienne par Bachar al-Assad, ont servi de terreau au développement. À la guerre menée par les Etats-Unis et leurs alliés en Irak et en Syrie répondent aujourd’hui des actes terroristes. Et ce sont les populations civiles, ici comme là-bas, qui font les frais de cette mécanique guerrière. Depuis le début de la guerre, la Syrie connaît en moyenne 150 morts par jour.

Impossible d’oublier, également, le rôle du capitalisme, quand les intérêts financiers et commerciaux des pays occidentaux contribuent au déséquilibre de l’ensemble du Moyen-Orient et contredit les discours prétendument humanistes de nos dirigeants.

Dans ce contexte, l’Etat français prétend mener une guerre contre le terrorisme mais les bombardements en Syrie et en Irak, avec les « dommages collatéraux » qu’ils provoquent, viennent avant tout nourrir le mythe du « choc des civilisations » et entretenir la spirale de la guerre. D’autant que, dans le même temps, le gouvernement maintient des relations cordiales avec l’Arabie saoudite et la Turquie, pourtant parmi les soutiens logistiques de Daech, et ne lève pas le petit doigt pour soutenir les révolutionnaires kurdes et syriens qui luttent en première ligne face à Daech et Assad.

Dans ces moments difficiles et pour sortir de ces logiques guerrières, nous devons nous rassembler et construire l’unité dans nos quartiers, nos entreprises, nos foyers, nos lycées et nos facs contre la guerre, contre la réduction des libertés publiques, contre le racisme, pour un autre monde.

Signataires : ACTİT (Association Culturelle des Travailleurs İmmigrés de Turquie) , Alternative Libertaire, AMF Saint-Denis, Coordination des sans-papiers 93, Coordination des foyers de travailleurs migrants, CGA, Centre social Attiéké, Collectif universel Paris 8 (étudiants turcs et kurdes), Comité Solidarité avec les Prisonniers Politiques, CGT Educ’Action Saint-Denis, ENSEMBLE (membre du Front de Gauche), Fédération Anarchiste Groupe Henry Poulaille, ICAD (Comité International Contre les Disparitions), Ligue des droits de l’Homme Section Saint-Denis Plaine Commune, NPA, MRAP, OCML-VP, Parti de Gauche (membre du Front de Gauche), Union Locale Solidaires, Solidaires étudiants Paris 8, Sud Education, Sud CT Mairie de Saint-Denis, SKB (Union des Femmes Socialistes turques).

Photo de CGA région Parisienne.