Se tirer une balle dans le pied ? Résistons ensemble, février 2014, n°127

bulletin A4 recto-verso du collectif Resistons Ensemble, collé entre autre dans et autour de la cité le Luthe à Gennevillier (92), à télécharger en PDF.

RESISTONS ENSEMBLE / bulletin numéro 127 / Février 2014

- Se tirer une balle dans le pied ?

- [ CHRONIQUE DE L’ARBITRAIRE ]
L’idéologie d’extrême droite en action
Répression des sans-papiers : la « gôche » continue et innove
Mort en GAV dans les Yvelines (78)
Non aux expulsions de squats à Montreuil/Bagnolet, soutien au collectif des Baras
Les primes de Valls
La Cour de cassation a rejeté le pourvoi de la famille d’Abou Bakari Tandia

- [SANS PAPIERS NI FRONTIÈRES]
Sans-papiers en lutte… contre l’Internationale du racisme et de la répression

- [LA PRISON TUE]
« On m’a condamné à mort »

- [AGIR]
Justice pour Ayoub, mutilé à vie par un tir policier
Concert de soutien « Urgence la police assassine »
Concert de soutien aux pirates somaliens
besancon.sous-surveillance.net
L’antifascisme, c’est l’affaire de toutes et tous !
À lire…

Pour télécharger ce bulletin mis en page au format pdf :
http://resistons.lautre.net/

Se tirer une balle dans le pied ?

L’IGA n’a pas inventé l’eau chaude. Normal, il s’agit de l’Inspection générale de l’administration, dont fait partie la police. Pourtant elle arrive à dire des choses à ne pas répéter. Dans son rapport, publié par Mediapart du 23 janvier on apprend que il y a des policiers « spécialistes » de l’« outrage et rébellion » (délit qui peut être puni d’amendes lourdes et de 6 mois de prison) qui ont déposé plainte jusqu’à 28 fois en un an, que le prix de la « protection juridique accordée aux policiers victimes d’outrages, de rébellions ou de violences a augmenté de plus de 50 % depuis 2006, passant de 8,7 millions d’euros à 13,2 millions d’euros en 2012… ». Bien sûr, l’IGA se dit choquée par des « abus », qui coûtent chers, mais, prudence, pas un mot sur la véritable « utilité » pour l’État de ces plaintes. Dans les quartiers populaires, on ne connaît que trop la fonction de ces accusations d’« outrage et rébellion ». Dès janvier 2004, notre réseau l’a dénoncé, dans un guide juridique : le « délit d’outrage sert d’abord à couvrir les violences policières, il permet de poursuivre ceux que les flics considèrent comme des gêneurs, aussi, aux flics d’arrondir leurs fins de mois. »(http://resistons.lautre.net/spip.php?article38). Contrairement, donc, à ce qu’affirme l’IGA, il ne s’agit aucunement de « bavures », d’« excès », mais bien d’un outil juridique qui représente une arme de dissuasion et destruction massive pour l’État.
Mais attention, trop c’est trop. Manuel Valls lors d’une visite au commissariat du Kremlin-Bicêtre, le 18 janvier dernier « s’est empressé d’enterrer les recommandations du rapport face à des syndicalistes d’Unité SGP Police buvant du petit lait… Et de conclure : « Un rapport de l’IGA ne s’impose pas au ministre. » Ce message venant du ministre de l’intérieur est un signe. Valls dédouane les « forces de l’ordre » (ce qui n’est pas nouveau ) mais cette fois-ci en face de sa propre administration. Il soutient et encourage publiquement et explicitement la transformation de la Police en une milice.
On dit que le poisson pourrit par sa tête. Mais nous, on n’a pas de chance, notre poisson a deux têtes. Face à la misère sociale, la répression, le racisme institutionnel de l’État, les plus misérables, les plus pauvres, faute de mieux, se tournent vers des perspectives qui leur paraissent nouvelles. De nouveaux gourous apparaissent, qui à l’instar de Valls, prêchent aussi la haine, la soumission, le racisme. Ce mois-ci, l’école est devenue une de leurs cibles.
Il est vrai que telle qu’elle est, l’école ne vaut pas grand-chose, elle est structurellement sélective, raciste à l’image de la société, mais, en l’absence d’une nouvelle société égalitaire et démocratique, y-a-t-il d’autres moyens pour des opprimés et exploités de recueillir , ne serait que des miettes de savoir, en vue de résister ? Alors, quand les extrémistes de tout bord propulsés par des dominants haineux se réunissent pour la boycotter, il faut se méfier. Le but de ces gens-là est aussi d’assommer les consciences. En les suivant, les plus méprisés, les plus pauvres se tirent une balle dans le pied.
Nous ne sommes pas sortis de l’auberge. Aux coups de matraque de Valls/Hollande s’ajoute l’enfumage idéologique de Dieudonné-Soral-Belghoul/Valls. Comme dans l’Allemagne des années 30, les premiers signes d’un glissement vers le fascisme apparaissent en France.

> [CHRONIQUE DE L’ARBITRAIRE]

L’idéologie d’extrême droite en action
À Clermont-Ferrand le 17 janvier un concert de soutien à la famille Asatryan et à l’ensemble des sans-papiers a été attaqué à l’arme à feu. Deux personnes ont été touchées par les tirs et conduites à l’hôpital. Les organisateurs qui constatent que les actions armées d’extrême droite se développent à Clermont-Ferrand alertent sur la gravité d’une banalisation de la violence xénophobe et de la haine en tant qu’idéologie politique. Infoshttp://www.educationsansfrontieres.org/article48801.html
Dans la même veine, un groupe d’une cinquantaine d’individus a manifesté le 11 janvier à Calais leur haine des sans-papiers, à base de slogans racistes. Un groupe d’une quinzaine de contre-manifestants présents ce jour-là a été encerclé, contrôlé, fouillé par les forces de l’ordre. La police a ses préférences ?

Répression des sans-papiers : la « gôche » continue et innove
Le 31 janvier , le ministère de l’intérieur socialiste a fait le bilan de sa politique en matière d’immigration : 27 000 expulsions, la « gôche » est fière d’annoncer que, contrairement aux apparences (ce chiffre est en recul, rappelons-nous des 36 000 expulsions, triste record de 2012), elle fait mieux que la droite. Pour se justifier, Valls a accusé ses prédécesseurs de gonfler leurs chiffres en y incluant les « retours volontaires » alors que lui se vante d’obtenir un « chiffre des retours dits contraints en métropole en 2013 supérieur au chiffre constaté en 2007, 2008, 2009, 2010, 2011 » et d’avoir supprimé le versement des « aides aux retours » (allouées notamment aux Rroms bulgares et roumains).
En réalité « contraints » ou « volontaires », tout est bon quand il s’agit d’expulser des étrangers. En effet, la Cimade révèle que dans les Yvelines (78), une nouvelle unité de la PAF (police aux frontières) a été créée en lien avec la préfecture du 78. Les personnes sont convoquées par téléphone ou par écrit à l’unité de la PAF pour leur mettre la pression afin qu’elles acceptent de repartir « volontairement ». Dans ce genre de cas, il faut savoir que la personne ne court aucun risque (administratif ou judiciaire) en ne se rendant pas à la convocation.

Mort en GAV dans les Yvelines (78)
Dans la soirée du 11 janvier, un homme de 45 ans est arrêté, après un accident routier .Les gendarmes de la brigade de La Queue-lez-Yvelines l’enferment dans une cellule, officiellement en « garde à vue dégrisement ».Il est mort dans la nuit d’une crise cardiaque n’ayant pas eu accès à ses médicaments : il était cardiaque et son épouse déclare pourtant qu’elle avait prévenu les flics.

Non aux expulsions de squats à Montreuil/Bagnolet, soutien au collectif des Baras
Le collectif des Baras est composé de près de 300 personnes, pour la plupart des hommes d’origine malienne ayant quitté la Libye où ils travaillaient, après la chute du dictateur Khadafi. L’an passé ces hommes ont tenté d’occuper un bâtiment vide, mais en ont été expulsés en mai dernier. Aujourd’hui la plupart vivent dans deux bâtiments qu’ils occupent : le premier à Montreuil, avenue du Président Wilson, dont l’expulsion a été reportée de 3 mois lors d’un jugement en décembre, le deuxième à Bagnolet (où une famille Rrom à la rue suite à l’expulsion d’un terrain rue de Paris les a rejoint ) dont le sort a été examiné par le tribunal de Pantin. Le 3 février, le verdict prend le parti de la société Emerson Net work et ordonne l’expulsion qui peut avoir légalement lieu à partir de 4 février. Le collectif des Baras nous appelle à les soutenir dans leur lutte, sur place au 124 avenue Gallieni à Bagnolet (métro Gallieni). RDV chaque samedi à 18h.

Les primes de Valls
Qui se souvient des déclarations fracassantes de Valls en 2004 qui affirmait finie la politique du chiffre de Sarkozy, la « prime de résultats exceptionnels ».
Or, une fois de plus, Valls c’est Sarkozy bis, légèrement modifié, le ramassage des « bâtons » continue. Avec les résultats qu’on connaît : favoriser la répression massive. Comme dit un CSR, cité par Le Monde : « Il suffit de faire une vacation à Calais, d’interpeller beaucoup d’étrangers en situation irrégulière, ce qui n’est pas très dur là-bas, et on touche la prime. ».

La Cour de cassation a rejeté le pourvoi de la famille d’Abou Bakari Tandia
« Cela signifie en clair que les policiers de Courbevoie qui ont provoqué, d’une façon ou d’une autre, le coma mortel de Abou Bakari Tandia le 5 décembre 2004 au commissariat, ne seront jamais inquiétés pour cela…. Donc en gros, il n’y aura jamais ni justice ni vérité pour Abou Bakari Tandia, certainement comme pour les nombreux cas plus récents qui ont été plus précipitamment soldés par un non lieu, notamment Ali Ziri à Argenteuil et Mahamadou Marega à Colombes pour ne mentionner que les plus “voisins”. La famille a décidé de saisir la Cour Européenne des Droits de l’Homme. Ce n’est pas terminé. »
Communiqué de l’Association Vérité et Justice pour Abou Bakari Tandia (extraits)

> [SANS PAPIERS NI FRONTIÈRES]

Sans-papiers en lutte… contre l’Internationale du racisme et de la répression
Marseille. Un jeune homme, demandeur d’asile, de 18 ans s’est noyé dans le port de Marseille le 11 janvier en tentant de s’ échapper du centre de rétention. Son copain a été repêché et a été reconduit au centre en vue de son expulsion.
Rome et Lampedusa. Vu l’ampleur des protestations suite à une vidéo, le gouvernement italien a été obligé de vider le centre de rétention de Lampedusa où les demandeurs d’asile étaient traités comme des « animaux ». Mais ce n’est pas fini, au « Centre d’identification et d’expulsion » (CIE) près de Rome, 9 réfugiés se sont cousu la bouche en guise de protestation. Le gouvernement « démocratique » envisage de durcir encore les conditions pour obtenir l’asile.
Tel-Aviv. Trente mille demandeurs d’asile politique, en majorité Érythréens et Soudanais, ont manifesté à Tel-Aviv le 5 janvier, sous les mots d’ordre : « Nous sommes tous des réfugiés ! Oui à la liberté, non à la prison ». En effet, le pouvoir israélien rejette systématiquement leurs demandes d’asile et la nouvelle loi votée le 10 décembre l’autorise à les placer dans les camps de rétention jusqu’à un an .ils ont également décrété une grève de trois jours notamment dans la restauration et l’hôtellerie.

> [LA PRISON TUE]

« On m’a condamné à mort »
Philippe Lalouel a 19 ans lorsqu’il est blessé par la police pendant un premier braquage à Marseille. À l’hôpital on le transfuse avec une poche de sang contaminé. À 21 ans il apprend en prison qu’il est porteur du VIH. L’époque n’est pas très optimiste pour les malades du sida, espérance de vie de 3 à 5 ans… « Je suis persuadé que ma maladie va me tuer rapidement. (…) Et quand on pense qu’on va crever, on essaye de retrouver sa liberté ». Suivent alors de courtes cavales ponctuées de vols, mais sans jamais verser de sang. Les condamnations s’accumulent jusqu’en 2012 quand l’avocat général requiert une « une peine d’élimination sociale » : il est condamné à vingt ans d’emprisonnement.
Le 30 et 31 janvier se tenait le procès en appel. Les amis, les soutiens sont là« L’année dernière, la cour d’assises avait “éliminé” un prisonnier anonyme. Cette année, les jurés ont exécuté, en toute conscience et connaissance de cause, un homme fier et digne » (extrait du communiqué des amis de Philippe Lalouel). La sentence : dix-sept ans qui s’ajoutent aux six qu’il lui reste. « Nous, les grosses peines, on nous enferme jusqu’à la mort ! » « C’est la guerre, je vous la déclare ! »
Plus d’infos : https://www.facebook.com/pages/Soutienlalouel/328914967247966 ethttp://lenvolee.net/contre-lelimination-sociale-de-philippe-lalouel/

> [AGIR]

Justice pour Ayoub, mutilé à vie par un tir policier
3 ans ont passé depuis qu’Ayoub Boutahra, lycéen de 17 ans, a perdu un oeil suite à un tir de flash-ball, reçu alors qu’il attendait le bus à proximité d’une intervention de la police. Dès 2011, sa famille a porté plainte, un comité de soutien très actif s’est constitué, une information judiciaire pour blessures involontaires a été ouverte (voir RE 105 et 118). En 3 ans, 3 juges d’instruction différents et rien n’a bougé. Mais Ayoub et ses soutiens ne lâcheront rien, ils exigent toujours justice et vérité et se rassembleront le samedi 8 février à Audincourt.

Concert de soutien « Urgence la police assassine »
le samedi 1er mars 2014 à 18 h à la CNT- 33 rue des Vignoles Paris 20e, m° Avron ou Buzenval
« Le ministre de l’intérieur a porté plainte contre Amal Bentounsi, la soeur d’Amine Bentounsi tué par la police. Amal est attaquée parce qu’elle a le courage de dénoncer sans relâche les pratiques violentes de la police à travers son site internet et le projet d’un clip dénonçant l’impunité policière. Amal Bentounsi invite toutes les familles de victimes de violences et de crimes policiers à prendre la parole lors de son procès qui se tiendra le lundi 07 avril à 09h. » Lu sur : http://paris.demosphere.eu/rv/31043

Concert de soutien aux pirates somaliens 
le samedi 8 février 2014 au Transfo 57, avenue de la République, à Bagnolet. « En Somalie, face à la famine, à la destruction des ressources en poissons par la pêche industrielle occidentale et à l’immersion de déchets toxiques le long des côtes, devenir pirate est à la fois un moyen de survie et un acte d’autodéfense. » « Entre 2008 et 2011, 22 Somaliens ont ainsi été enlevés pour être incarcérés et jugés dans l’hexagone. […] Parce que nous savons qu’en taule, tout a un prix […], mais aussi parce que la guerre contre les pirates est l’une des facettes extrêmes de la guerre aux pauvres, nous souhaitons apporter un peu de solidarité aux 15 pirates somaliens encore incarcérés en France. L’argent du concert servira donc à leur envoyer des mandats. »
À lire pour en savoir plus : Frères de la côte, Mémoire en défense des pirates somaliens, traqués par toutes les puissances du monde paru chez l’Insomniaque.
Infos http://transfo.squat.net/2014/01/15/samedi-8-fevrier-concert-desoutien-aux-pirtes-somaliens/

besancon.sous-surveillance.net
Après Lyon, Toulouse, Marseille, Paris… un nouveau site de cartographie collaborative des caméras de vidéosurveillance vient d’être lancé à Besançon.

L’antifascisme, c’est l’affaire de toutes et tous !
Manifestation dimanche 9 février 2014 à 14h Place Jules Joffrin, M° Jules-Joffrin. Infos http://paris.demosphere.eu/rv/30965

À lire…
Dans le climat nauséabond actuel, où la confusion envahit pas mal d’esprit, il est rafraîchissant d’entendre une voix qui se démarque à la fois de Dieudonné/Soral et de Valls/Hollande. À lire le communiqué du Réseau No Pasaran : Affaire Dieudonné/Valls : antisémitisme télévisé ou xénophobie d’État, faut-il vraiment choisir ?http://nopasaran.samizdat.net/

LU SUR http://paris-luttes.info/

Tarbes, France : Attaques incendiaires

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Bâtiment de l’Armée Française

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Prison de Tarbes

Nous revendiquons l’attaque incendiaire contre un bâtiment de l’armée française (35 RAP Tarbes, France) du 27 décembre 2013.

Nous revendiquons aussi l’attaque incendiaire contre la prison (Tarbes, france) du 25 décembre 2013.

Les deux attaques en solidarité et à l’appel international des 5 anarchistes de Barcelone.

En solidarité aussi à tous nos frères anarchistes incarcérés dans les centres d’exterminations des états terroristes.

Par ces actions nous voulons aussi prouver aux fascistes français que la rue n’est plus à eux.

Le temps ou ils tuaient impunément est révolu.

Nous appelons tous les nôtres à venger la mort de Clément Méric dans le sang.

Nous appelons tous les nôtres à s’organiser et à s’armer.

Mort à l’État.
Mort aux fascistes.
Mort au capitalisme.
Vive l’Anarchie.
Vive la liberté.

Nous n’avons pas communiqué avant par sécurité.
GADI (groupe action directe international)

Précision:
-L’attaque de la prison avec un engin incendiaire et un explosif qui n’a pas sauté.
-L’attaque du batiment de l’armée avec napalm et phosphate.

lu sur http://fr.contrainfo.espiv.net/

[Brésil] Vent de révolte et répression…

Brésil : Vent de révolte et répression…

Le vent de révolte sociale n’a pas fini de souffler au Brésil, malgré ce que veut nous en dire le silence d’une presse – locale et internationale – qui cherche à tout prix à en minimiser l’intensité, à ancrer le mouvement de contestation dans le temps et l’espace. Les innombrables émeutes, grèves, assemblées de rues, mutineries dans les prisons et occupations de terrains survenues régulièrement ces derniers mois sont là pour en témoigner, la répression aussi. Si les perquisitions, intimidations, arrestations, assassinats politiques et passages à tabac opérés par le pouvoir et sa police sont eux aussi des faits devenus quasi quotidiens, ils sont insuffisants à étouffer la subversion. Ce que nous pouvons observer ces derniers temps n’est pas juste la multiplication d’une série d’actes qui se font échos les uns aux autres, mais c’est surtout la constitution durable d’une multitude de fronts.

http://juralib.noblogs.org/files/2014/02/PhotoA.jpgGrève des professeurs à Rio de Janeiro

En guise de témoignage, voici une brève chronologie retraçant, de façon non exhaustive, certains faits marquants des deniers mois :

Au début du mois d’octobre, les professeurs de Rio de Janeiro, en grève depuis le mois d’août, sont violemment réprimés par la police et expulsés de la Chambre Municipale qu’ils occupaient. Une manifestation de soutien est appelée le 07 octobre et réuni près cinquante mille personnes à Rio de Janeiro. Des manifestants tentent de réinvestir la Chambre Municipale qui est la cible de plusieurs cocktails Molotov. Plusieurs magasins et banques sont détruits. Le Club Militaire, siège d’une fondation réunissant gradés et vétérans de l’armée, est également pris pour cible par les manifestants et est en partie incendié par des jets de bombes artisanales.

http://juralib.noblogs.org/files/2014/02/PhotoB.jpgManifestations en soutien aux professeurs à Rio de Janeiro

Quelques jours auparavant, le 04 octobre, de violents affrontements avaient eu lieu entre la police et les manifestants qui occupaient depuis 80 jours le parc du Coco, dans le centre de Fortaleza. Ces derniers occupaient le parc pour empêcher la réalisation d’un projet d’urbanisation du centre qui prévoit, entre autres, de raser une partie dur parc pour permettre la construction d’un pont routier. Les policiers militaires venus expulser le campement sont accueillis par des jets de pierre et des tirs de feux d’artifice auxquels répondent tirs de lacrymogène et de flashballs. Un policier et un journaliste sont blessés au visage, tandis qu’un manifestant est arrêté. Le campement est complètement détruit.

http://juralib.noblogs.org/files/2014/02/PhotoC.jpgExpulsion de l’occupation du parc du Cocó, Fortaleza

La même semaine, les habitants de la cité Parque Verde, à Belém manifestent contre les mauvaises conditions du quartier (état des égouts, des rues…) et bloquent la principale avenue du quartier à l’aide de pneus et objets enflammés. Ils résistent ensuite, à coups de pierres et projectiles, à l’intervention de Police Militaire, qui tente de disperser manifestants. Plusieurs personnes sont blessées par des tirs de flashballs, dont une emmenée d’urgence à l’hôpital en état inconscient.

Le 12 octobre, des centaines de familles occupent un terrain abandonné dans la périphérie de Belo Horizonte. Elles sont bientôt rejoint par des centaines d’autres. Moins d’une semaine plus tard, on compte près de 4000 familles installées sur la nouvelle occupation urbaine. Si ce type d’occupation de terrains est chose courante au Brésil, la rapidité avec laquelle cette occupation urbaine gagne une telle ampleur est un fait totalement inédit. Depuis le mois de juin, des dizaines de nouvelles occupations de terrains ont vu le jour, notamment dans les périphéries de Sao Paulo et Belo Horizonte, impliquant des dizaines de milliers de familles.

15 octobre : Des manifestations massives ont lieu dans plusieurs grandes villes du Brésil, à l’appel des professeurs en grèves. Elles se terminent par de violents affrontements et des centaines d’arrestations à Sao Paulo et Rio de Janeiro. Les manifestants arrêtés à Rio sont emmenés dans une Prison de Haute Sécurité, accusés d’être membres d’une organisation criminelle et placés sous la loi de Sureté Nationale. À Sao Paulo, une autre manifestation est réalisée le même jour par des mal-logés qui tentent d’envahir la mairie.

http://juralib.noblogs.org/files/2014/02/PhotoD.jpgManifestations en soutien aux professeurs à Sao Paulo

17 octobre : À Rio de Janeiro, suite au meutre d’un jeune par la police, les habitants de la favela de Manguinho se révoltent contre l’occupation policière représentée par l’UPP – Unité de Police Pacificatrice. Des affrontements ont lieu entre la police et les manifestants au cours desquels une jeune fille est blessée par balle à la jambe.

18 octobre : Des manifestants antispécistes pénètrent par effraction dans le laboratoire Institut Royal à Sao Roque, près de Sao Paulo, et libèrent près de 200 chiens qui y étaient utilisés comme cobayes. Le lendemain, une manifestation est organisée devant l’Institut, des affrontements ont lieu entre la police et les manifestants, armés de pierres et de gourdins. Plusieurs véhicules partent en fumée, dont une voiture de police et des véhicules appartenant à la presse.

Entre le 18 et le 23 octobre, plusieurs perquisitions et saisies de matérielles ont lieu chez des militants anarchistes à Belo Horizonte. Les perquisitions, menaces physiques ou de mort et tentatives d’intimidations à l’égard des militants et anarchistes ont eu lieu régulièrement dans les principales grandes villes du pays ces derniers temps.

Le 21 octobre : Des affrontements ont lieu à Rio, dans le quartier de Barra da Tijuca, entre des syndicalistes et la police au cours d’une manifestation contre la privatisation des sites de pétroles off shore (les fameux Pré-Sal).

http://juralib.noblogs.org/files/2014/02/PhotoE.jpgManifestation contre la privatisation du Pré-Sal, Rio de Janeiro

Dans la semaine du 20 au 26 octobre, une multitude de manifestations et d’actions sont organisées à Sao Paulo, et dans d’autres villes pour la gratuité des transports. Le 23, des centaines de manifestants investissent les rues dans la région du Grajau, quartier populaire dans la périphérie sud de Sao Paulo. Ils protestent, entre autres, contre la mauvaise qualité et le prix des transports publics. À la suite d’affrontements avec la police, 30 personnes sont arrêtées.

Le 25 octobre des manifestations sont organisées dans plus de 15 grandes villes du pays pour la gratuité des transports. À Sao Paulo, plusieurs terminaux de bus sont saccagés, des bus sont incendiés, des agences bancaires détruites, un colonel de la Police Militaire est tabassé par des manifestants… Près de 92 personnes sont arrêtées à l’issue de la manifestation. Des affrontements entre les manifestants et la police ont également lieux à Campinas, Natal et Porto Alegre.

Le 26 octobre, un ancien hôpital militaire est occupé dans le centre de Belo Horizonte par un groupe de gens qui veulent en faire Centre Culturel Autogéré. L’espace est baptisé Luiz Estrela, en hommage à un poète et performer transgenre qui vivait dans la rue, retrouvé mort au mois de juin. Certains soupçonnent qu’il ait été tué par la police. Ce type de squatt s’était fait de plus en plus rare dans les grandes villes brésiliennes ces dernières années en raison de la répression policière systématique, à la différence des occupations de terrains qui elles sont très fréquentes. Dans les semaines qui suivent, un autre bâtiment est occupé dans le centre de la ville afin d’être transformé en espace autonome.

Le 28 octobre : De violentes émeutes éclatent dans le quartier Vila Medeiros, zone nord de Sao Paulo après la mort du jeune Douglas Martins, 17 ans, assassiné par un policier. Douglas sortait d’un bar lorsqu’une voiture de police s’arrête à sa hauteur. Le coup de feu part d’un seul coup et atteint le jeune homme au thorax. En réaction, la population exprime sa rage sous diverses formes : trois bus et une voiture de police sont détruits, cinq véhicules brûlés, deux banques vandalisées, plusieurs barricades sont montées. Des feux se propagent, l’un deux atteint le réseau électrique et provoque un black out dans le quartier. Le lendemain, d’autres émeutes éclatent dans un quartier voisin après la mort d’un autre jeune tué par un policier en service.

http://juralib.noblogs.org/files/2014/02/PhotoF.jpgÉmeutes contre la violence policière à Sao Paulo

29 octobre : Plusieurs manifestations ont lieu dans différents quartiers de la banlieue de Belo Horizonte en réaction à l’expulsion d’un terrain occupé. Simultanément, les principales voies d’accès au centre de la capitale sont bloquées par des barricades de pneus enflammés. La police utilise flashballs et lacrymogènes pour tenter de disperser les manifestants qui répondent par des jets de pierre.

Le 31 octobre à Recife, Une manifestation réalisée par les vendeurs ambulants se termine en affrontements avec la police, jets de projectiles contre tirs de flashballs.

1er novembre : À Sao Paulo, une nouvelle vague d’occupations urbaines a lieu dans la région du Grajau, où cinq terrains différents sont occupés par des centaines de familles. Ce jour là, la communauté qui occupe le terrain de Estaiadinha, bloque plusieurs routes pour protester contre l’ordre d’expulsion. La police intervient et réprime violemment la manifestation tirant au flashball et lançant des des bombes de lacrymoègnes depuis un hélicoptère. Une situation similaire a lieu le même jour à Contagem, en périphérie de Belo Horizonte, où des centaines de manifestants issus de l’occupation William Rosa bloquent une route dans les deux sens à l’aide de barricades et pneus enflammés. La police intervient violemment le soir même et va même jusqu’à s’en prendre directement à la communauté en tirant des bombes de lacrymogènes dans les maisons tandis que des policiers militaires mettent le feu à plusieurs d’entre elles… Les affrontements ont lieu jusqu’à 02h00 du matin, mais la tentative d’expulsion échoue.

http://juralib.noblogs.org/files/2014/02/PhotoG.jpegManifestation contre l’expulsion de la communauté Estaiadinha, Sao Paulo

Le 05 novembre Le commissariat de police de la plage de Cumbuco, dans l’État du Ceara, est en partie détruit par des habitants qui protestent contre la mort d’un jeune de 21 ans. Ce dernier a été retrouvé mort après avoir été abordé par des policiers. En réponse, des habitants du village bloquent la route principale et attaquent le commissariat à coup de pierres. Le mois précédent, c’est le commissariat de la petite ville de Tarrafas, également dans le Ceara, qui avait été détruit par les habitants qui protestaient contre l’assassinat de José Pedroca do Carmo, agriculteur de 51 ans.

Le 05 novembre toujours, au soir, une base de la Police Militaire de la zone sud de Porto Velho, dans l’État de Rondonia, est attaquée par plusieurs individus. La façade est la cible de jets de pierre et les vitres d’une camionnette sont détruites. Quelques jours auparavant, une autre base de la Police Militaire avait été la cible d’une attaque dans la même ville.

06 novembre : À six mois de la coupe du Monde, le gouvernement de Rio de Janeiro annule la Soccerex 2013, la plus grande réunion mondiale sur le football, prévue initialement pour la fin novembre, par crainte d’« agitation sociale ».

13 novembre : Le laboratoire Institut Royal, situé à Sao Roque, est à nouveau la cible d’une action antispéciste. Les manifestants libèrent les animaux qui y restaient enfermés, principalement des rongeurs, et s’en prennent au matériel présent sur place. Entre temps, le laboratoire avait décidé de cesser ses activités à Sao Roque en raison des actions et manifestations dont il a été la cible.

http://juralib.noblogs.org/files/2014/02/PhotoI.jpgManifestation antispéciste devant le laboratoire Institut Royal à Sao Roque

Le même jour, la communauté paysanne de Flona Bom Futuro, près de Rio Pardo, dans l’État de Rondonia, résiste à une tentative d’invasion policière. Les habitants incendient plusieurs véhicules de police, parviennent à libérer deux personnes qui avaient été arrêtées et font fuir les policiers. Ils détruisent ensuite des ponts menant à la communauté pour empêcher d’éventuelles représailles. Le surlendemain, la communauté est la cible d’une gigantesque descente policière, encerclée par une cinquantaine de véhicules, au cours de laquelle dix personnes sont arrêtées. La communauté Flona Bom Futuro est la cible constante d’attaques et de pressions de la part de la police et de pistoleros à la solde de grands propriétaires de la région qui convoitent le terrain qu’elle occupe. Les conflits agraires sont fréquents et violents dans la région.

20 novembre : La très célèbre et touristique plage d’Ipanema, à Rio de Janeiro, est le théâtre d’affrontements entre des groupes de jeunes et la garde municipale après que celle-ci ait arrêté quelques adolescents accusés d’avoir commis des vols. La tente qui abrite la garde municipale est la cible de pierres et de projectiles lancés par un groupe qui exige la libération des personnes arrêtées. Les jeunes issus de quartier pauvres sont systématiquement victimes de contrôles et d’arrestations arbitraires lorsqu’ils fréquentent cette plage, située dans le quartier le plus bourgeois de la ville. Le mois précédent, la garde municipale avait été expulsée de la plage à coup de jets de noix de coco et de projectiles après avoir tenté de réglementer un jeu de ballon.

Le jour même, l’activiste et directrice de théâtre Gleise Nana sucombe de ses blessures à l’hopital où elle avait été conduite après qu’un incendie suspect se soit propagé dans son appartement à Duque de Caxias, en périphérie de Rio de Janeiro, quelques semaines auparavant. Peu de temps avant l’incendie, elle s’était plaint d’avoir reçu des menaces de la part de policiers. Elle avait rassemblé une grande quantité de vidéos témoignant des violences policières ces derniers mois.

24 novembre : Les travailleurs de la construction civile de Belo Horizonte, réunis en assemblée générale, se mettent en grève pour revendiquer un meilleur salaire et de meilleures conditions. Plusieurs manifestations sont réalisées dans les jours suivants au cours desquelles des travailleurs saccagent des chantiers et détruisent une partie du matériel qui s’y trouve. D’autres grèves de grande ampleur dans le secteur de la construction civile ont eu lieu dans la même période, notamment sur le chantier du barrage de Belo Monte ou encore à Recife.

29 novembre : Une manifestation est réalisée pour la gratuité des transports et contre la « mafia du transport publique » à Varzea Grande, dans le Mato Grosso, au cours de laquelle la population investit la principale station de bus de la ville et détruit le mur et les tourniquets qui obligeaient les usagers à payer un nouveau ticket pour faire un changement. 25 personnes sont arrêtées.

30 novembre : Dans la zone sud de Sao Paulo, près de 2000 mal logés occupent un terrain de plus de 500 hectares. Il s’agit du plus grand terrain occupé depuis ces derniers temps.

04 décembre : Près de 500 indiens manifestent à Brasilia pour la démarcation de leurs terres et contre les récents assassinats politiques dont plusieurs de leurs représentants ont été victimes. Une partie d’entre eux tente d’envahir le Palais de la Présidence et sont repoussés par les agents de sécurité après un combat au corps à corps.

http://juralib.noblogs.org/files/2014/02/PhotoH.jpgAffrontements entre indiens et vigiles du Palais Présidentiel à Brasilia

09 décembre : 19 personnes sont arrêtées dans la zone Nord de Sao Paulo accusées d’avoir participer aux émeutes du 28 et 29 octobre.

Le 15 décembre a lieu l’expulsion de Aldeia Maracana (“Communauté Maracana”), bâtiment occupé par des indiennes/indiens de différentes communautés. Le bataillon de Choc de la Police Militaire investi le lieu tandis que s’y tient la première rencontre de la FIP (Front Indépendant Populaire), organisation apartidaire réunissant différents mouvements de lutte autonomes ayant surgie dans l’effervescence politique de ces derniers mois. Près de 20 personnes sont arrêtées et emmenées au commissariat. Le lendemain, en réaction, le rectorat de l’UERJ, université voisine du squatt, est occupée.

Le 16 décembre, une nouvelle occupation urbaine voit le jour à Florianopolis. Près de 60 familles occupent un terrain au nord de la ville. L’occupation est baptisée Amarildo de Souza en hommage à un maçon torturé et assassiné par la police de Rio de Janeiro au cours des manifestations de juin/juillet dernier.

Le 18 décembre, un homme de 81 ans est tué d’une balle dans la tête au cours d’une manifestation contre la violence policière dans Communauté Mandela II, appartenant au complexe de favelas de Manguinhos, à Rio de Janeiro. La manifestation avait eu lieu suite à l’interpellation d’un jeune de 13 ans par les agents de l’UPP (Unité de Police Pacificatrice) et s’était soldée par des affrontements entre policiers et habitants.

Le 21 décembre une mutinerie éclate dans le Centre de Détention de Icoaraci, près de Belém, après qu’une tentative de fugue collective ait été empêchée par les mâtons. Les détenus mettent le feu à des objets et parviennent à détruire la quasi totalité des cellules du Centre. La Compagnie d’Opérations Spéciale de la Police Militaire intervient finalement pour mettre fin à la rébellion. Ce type de mutinerie est de plus en plus fréquent ces derniers temps. Le 19 décembre, c’est la Prison de Montes Claros, nord de Minas Gerais, qui avait été le théâtre d’une révolte au cours de laquelle les détenus avaient brûlés matelas et vêtements. Le 18, une rébellion de prisonniers dans la prison de Pedrinhas, à Sao Luiz, dans le Maranhao, s’était soldée par la mort de trois détenus après qu’une tentative de fuite ait été déjouée. Deux mois plus tôt, 10 détenus avaient été tués par la police lors d’une révolte similaire dans la même prison. Le 10 décembre, la prison de Maracanaú, près de Fortaleza, avait été secoué par une révolte au cours de laquelle une partie de la prison avait été détruite…

Le 23 décembre, une fille de 12 ans est abattue d’une balle dans la tête au cours d’une descente de police dans la favela Para-Pedro, dans la zone nord de Rio de Janeiro. Son petit frère, de 7 ans, est lui blessé au visage, également par un tir. En réponse, les habitants du quartier montent des barricades et enflamment des pneus, bloquant l’avenue principale du quartier. Quatre adultes, que la police accusait d’être des « trafiquants », ont également été tués au cours de l’opération et dix personnes arrêtées.

Le même jour, près de 150 personnes envahissent un supermarché dans le centre de Belo Horizonte. Après avoir criés plusieurs slogans contre le consumérisme, ils refusent de quitter les lieux sans emporter avec eux une grande quantité de riz, haricots, pâtes, huile et autres aliments de base « pour un Noël sans faim ».

À suivre…

Reçu le 26 décembre 2013

lu sur http://juralib.noblogs.org/

[Metz] Leurs combats sont les nôtres ! Nos combats sont les leurs !

Non à la régression des droits des femmes en Espagne et ailleurs !

20 décembre 2013, le gouvernement espagnol veut annuler la loi autorisant l’avortement, rappelant les sombres heures du franquisme. Il revient sur la loi obtenue en 2010 qui légalisait l’avortement jusqu’à 14 semaines d’aménorrhée (22 pour raisons médicales) au mépris des recommandations des textes internationaux de l’Organisation Mondiale de la Santé et de l’Organisation des Nations Unies.

Renouant avec des pratiques qui dénient la liberté de choix aux femmes au mépris des droits humains fondamentaux, il annonce clairement son projet de société : maintenir les femmes dans un statut social étroit et de soumission.

Cette attaque du gouvernement espagnol s’inscrit dans l’offensive européenne des opposant-e-s aux droits des femmes comme l’a illustré en décembre 2013 le rejet du rapport Estrela par le Parlement européen (rapport sur la santé et les droits reproductifs traitant de l’accès aux contraceptifs et à l’avortement, de la procréation médicalement assistée, de l’éducation sexuelle et de la liberté de conscience). Ce rapport proposait que l’avortement soit de la compétence de l’Union européenne, encourageant ainsi tous les états membres à l’autoriser.

Ce refus d’accepter le droit des femmes à disposer de leur corps, cette persistance à les considérer comme des sous citoyennes incapables de décider par elles-mêmes désigne l’enjeu : quelle société voulons-nous ?

Le combat des femmes, des forces démocratiques et associatives espagnoles pour ce droit fondamental est le nôtre, et nous le soutiendrons ici et ailleurs car il est le combat de celles et ceux qui veulent l’égalité entre les femmes et les hommes.

Il rejoint les luttes que nous avons menées et que nous continuons à mener dans notre pays. Car, si le droit à l’avortement est bien inscrit dans la loi française, la concrétisation du droit à travers des centres d’avortement nombreux, permettant un accueil et des soins de qualité, n’est toujours pas assurée de manière satisfaisante dans toutes les régions.

C’est aussi un soutien à toutes les femmes obligées de se rendre dans une autre région ou dans un autre pays parce que là où elles vivent l’accès à l’avortement est difficile, voire interdit.

Nous appelons à lutter pour une Europe où toutes les femmes pourraient disposer librement de leur corps sans contrainte étatique et religieuse, et qui intègre ces droits à la Charte européenne des droits fondamentaux, et à soutenir le combat des femmes espagnoles pour conserver l’acquis qu’elles ont gagné de haute lutte.

Solidaires Moselle exprime sa solidarité aux femmes et aux hommes qui, en Espagne, combattent aujourd’hui la perte d’une liberté fondamentale. Cette remise en cause s’inscrit dans un recul sans précédent pour l’Espagne et ses habitant-e-s qui les renvoient à la période sombre du franquisme.

BRISONS LE SILENCE SUR CE QUI SE PASSE EN ESPAGNE !
SOLIDARITÉ INTERNATIONALE !

Au même moment où le gouvernement espagnol Rajoy remet en cause le droit à l’IVG, il entend faire voter une loi dite de sécurité citoyenne. Cette loi viendrait remplacer la loi Corcuera, adoptée par le gouvernement socialiste de Felipe González en 1992, connue à l’époque comme la « loi du coup de pied dans la porte » car elle permettait aux forces de l’ordre de pénétrer un domicile et de le fouiller sans en avoir fait la demande préalable à un juge. Cette loi a par la suite été déclarée anticonstitutionnelle. Aujourd’hui, le Parti Populaire prétend rétablir et renforcer la loi de 1992.

Sachant que beaucoup de personnes arrêtées lors des manifestations, surtout depuis le début de la crise économique avec l’ampleur des mobilisations sociales contre les effets des politiques d’austérité, n’ont pas pu être condamnées au pénal, car le plus souvent les juges n’ont pas trouvé de faits constituant des délits dans les accusations de la police, ce nouveau texte étudie la possibilité de définir de nouvelles infractions punissables au niveau administratif. De 39 infractions passibles de poursuites administratives répertoriées aujourd’hui à ce sujet, le projet de loi en considère 55, dont 21 sont considérées très graves. La nouvelle loi qualifie les infractions en fonction de leur gravité et spécifie des montants pour les amendes nettement supérieurs aux montants actuels : très graves (punissables d’une amende de 30’001 à 600’000 euros), graves (amendes de 1001 à 30’000 euros) et mineures (amendes de 100 à 1000 euros).

Voici un aperçu des actes que le projet de loi considère comme des infractions :

• Participation à une manifestation devant une institution gouvernementale si la délégation gouvernementale n’a pas été préalablement informée de la manifestation.

• Convocation d’une manifestation via les réseaux sociaux ou tout autre moyen de diffusion en ligne.

• Diffusion d’images où apparaissent des agents anti-émeutes durant les manifestations (délit passible d’une amende maximum de 600’000 euros).

• Désobéissance ou résistance aux autorités, refus de s’identifier ou communication de données d’identifications fausses ou inexactes aux représentants des forces de sécurité de l‘État.

• Insulter, vexer, menacer ou contraindre les membres des forces de sécurité.

• Diffusion sur Internet de données relatives aux agents constituant un attentat contre leur vie privée ou celle de leur famille ou qui contribue à faire échouer une opération (amende maximum de 600’000 euros).

• Ne pas remettre de pièce d’identité à l’agent qui la réclame.

• Se couvrir le visage avec une capuche, une casquette ou un casque constituera une infraction très grave et sera passible d’une amende très élevée dans le cas d’une personne arrêtée lors d’une manifestation et présentant une attitude violente.

• Violences à l’encontre du mobilier urbain.

• Offenses ou outrages publics, verbaux ou écrits, à l’encontre de l’Espagne, de ses communautés autonomes, de ses symboles ou de ses emblèmes (passibles d’une peine de prison de sept à douze mois).

Et cette liste n’est pas exhaustive. Il n’y a pas si longtemps, l’Espagne était encore une dictature. Il n’y pas si longtemps non plus que la guerre civile a eu lieu. Tous les débats sont politiques. Informer d’un événement est un acte politique. Ne pas le faire est un acte politique. Le silence est, au plus haut point, un acte politique. Le choix de garder le silence se fige dans la mémoire des générations. Cette loi néo-fasciste qui pourrait être votée n’est pas sans lien avec la montée des fascismes en Europe. Cela nous concerne tous.

LEURS COMBATS SONT LES NÔTRES !
NOS COMBATS SONT LES LEURS !

Union syndicale Solidaires Moselle – tract pour le 1er février

Aujourd’hui la Grèce, demain en France

Certains nous expliquent qu’en France la révolte se trouve à « droite ». Desmercenaires payés par les mouvements de droite radicale propagent idéologie et mots d’ordres afin d’envoyer notre colère dans le mur ou de la retourner contre nous.

S’il est difficile d’avoir du recul sur la situation présente, il est plus aisé d’avoir en perspective ce que font les droites radicales lorsqu’elles sont en position de force. C’est le cas ailleurs en Europe.

En Grèce, les attaques se multiplient. Voici la dernière en date contre un centre social, c’est à dire un lieu animé par des militants. Cela se traduit concrètement par des familles logées gratuitement sans distinction de nationalité, de couleur de peau.

Nous avons déjà fait écho de la situation économique désastreuse en Grèce, desravages de la drogue, des attaques contre les immigrés et des réponses desmilitants antifascistes à toutes les agressions fascistes et racistes.
Puisque les droites radicales prétendent s’attaquer à la pédophilie, il est grand temps qu’ils balayent devant leur porte.
En Grèce, les nationalistes s’attaquent aux enfants d’immigrés qui dorment dans la rue. Ils font bien pire que les battre, ils font le contraire de ce qu’ils racontent sur le net.
Le viol a toujours été utilisé pour assoir une domination, en Grèce les nationalistes sont en position de force. Ils le seront peut-être aussi en France, grâce à la complicité de certaines personnes qui prétendent agir au nom des quartiers.

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En Grèce, les militants nationalistes sont des auxiliaires de police. En Italie, c’est la même chose. Des mouvements comme Casapound ont attaqué à main armée des centres sociaux lorsque ceux ci étaient seulement occupés de femmes et d’enfants. Ils font le travail de la police.

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soral-gendarmeEn France, Alain Soral  se déclare solidaire d’Aube Dorée et travaille avec Casapound. Il fait toutes ses vidéos avec des maillots de flic ou de maton, parce qu’il est dans le même camps qu’eux. Il fait partie de ceux qui défendent les possédants de manière agressive. Il se donne une allure rebelle mais ne veut pas changer de système économique. Il veut des supplétifs venus de banlieue pour assurer le leadership de la partie la plus conservatrice des dominants français.soral-raid

Tout est sous notre nez, bien plus visible que lesilluminatis. Une personne qui insulte gratuitement ou désigne un coupable sans preuve n’a pas raison parce qu’elle hurle. Une personne qui fait du fric sur le sentiment de colère ne peut avoir notre confiance.

Qui se bat contre la Françafrique? Qui lutte pour la cause palestinienne? Qui lutte contre les discriminations? Qui lutte contre l’islamophobie? Qui lutte contre les expulsions locatives? Qui se bat contre les crimes policiersracistes et sécuritaires? Qui se bat pour la justice sociale et économique?

Certainement pas les nationalistes. Ils ne veulent que le maintient de leur niveau de vie en sacrifiant tout ce qui ne colle pas avec leur vision raciale ou identitaire du monde.

La colère rend aveugle, et ceux qui savent l’instrumentaliser en profitent pour nous détourner de nos priorités pour nous affaiblir en nous divisant et en nous faisant les soldats d’une cause qui n’est pas la nôtre.

Il faut ouvrir les yeux, et vite.

LU SUR http://quartierslibres.wordpress.com/

 

Y a pas de couleur pour trahir, pas de couleur pour haïr

Les habitants des quartiers, les immigrés et leurs descendants peuvent avoir n’importe quelle orientation politique, y compris celles qui nuisent objectivement à leurs intérêts.

Ils peuvent donc voter PS, UMP ou encore FN.

Pour beaucoup de gens de ce pays la couleur de peau où l’origine sociale des gens serait une immunité contre la haine ou la trahison. La confusion actuelle qui rend n’importe quel discours équivalent à un autre n’aide pas à faire un tri dans ce qui est proposé par les partis politiques.

Ce flou a pour origine les renoncements de la gauche parlementaire et l’absorption du discours et des thématiques du FN par l’ensemble des partis politiques de gouvernement.

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François Hollande part en guerre contre la finance lors de sa campagne et fini par donner des milliards en cadeau aux entreprises, et, pour donner le change, de Manuel Valls au FN, tout le monde s’attaque aux Rroms et s’agite sur la proportion de personnes d’origine non européenne sur le sol français.

Au final, cela donne l’impression que toutes les formations politiques se valent. Tout se résume en technique de communication, tout est relativisé. Le fond est évacué, place à la course au buzz.

On peut donc trouver des personnes qui militent dans des organisations qui vont à l’encontre des intérêts du groupe social auxquels ils appartiennent. Cette stratégie du « chacun pour soi » peut se révéler payante pour une promotion personnelle.

triplette

Le fait d’appartenir à une minorité peut servir à grimper les échelons au sein du Parti et parfois d’évincer la concurrence. Ces dernières années, alors que les discriminations racistes n’ont cessé d’augmenter, on a assisté à un défilé de responsables politiques de tous bords issus de la « diversité ». Alibi et caution morale pour Le Parti, ils servent à grapiller quelques votes sur des bases communautaires que leurs partis dénoncent.
Leur ascension dans le Parti est une possibilité de tisser un réseau hors du Parti.
Pire, ils sont devenus des défenseurs d’un France forteresse dont il faudrait non seulement respecter les lois mais embrasser les coutumes et un folklore présentés comme un sésame pour être toléré sur le territoire, (parce qu’il est de notoriété publique les bons français sont plus respectueux des règles que les autres !).

A ce jeu, l’UMP s’est montré plus forte que ses concurrents ces dernières années. Il est vrai que la droite propose une réussite individuelle en accord avec un modèle de compétition sociale et d’individualisme absolu, hégémonique en France.
Le PS a longtemps joué la carte paternaliste avant de commencer à laisser la place à certains militants issus de l’immigration. Le FN, lui, est désormais prêt à soutenir n’importe quel candidat afin d’accéder rapidement à des postes de responsabilités politiques.
Le point commun entre ces deux partis, est de proposer un programme visant à conserver le niveau d’une partie seulement de la population, sans changement du fonctionnement économique de la société mais en y sacrifiant les quartiers populaires et l’immigration :
– étouffement silencieux et navré par le PS, qui lorsqu’il arrive au pouvoir s’empresse de faire des cadeaux économiques à ceux qui ont voté contre lui ;
– agressivité et véhémence pour le FN qui derrière des lignes économiques politiques à géométrie variable et contradictoires, affirme une volonté « re-franciser » l’hexagone.

Dans cette configuration, il est facile pour n’importe qui ayant l’envie de réussir de passer du PS au FN : même intérêts économiques, parfois même haine etmépris de classe. Et vu les circonstances, une ascension des plus rapide. Le racisme honteux et inconscient du PS est brandit comme un phénomène naturel de manière agressive par le FN. Plus besoin d’en débattre, il suffit de l’assumer. C’est d’ailleurs sur ces bases que certains ont basculé.

tshombe

Les plus naïfs pourront s’étonner qu’un candidat comme celui que le FN présente en Isère défende un programme qui ferme la porte aux réfugiés politiques et met à l’index ceux qui ont un parcours identique au sien.
Pourquoi une personne appartenant aux « classes moyennes » serait-elle différente des autres vivant la même situation dans ce pays ? Parce que née au Congo, réfugiée politique et noire ? Le choix de cette personne confirme que ce qui détermine les choix politiques, en dernière instance, sont les conditions économiques et matérielles plus que les discours sur la « race » ou la « culture ».

On pense ce que l’on mange : certaines personnes mangent bien et ne veulent pas partager ou changer de régime alimentaire pour que tout le monde puisse manger convenablement.
Même si les questions culturelles, de genre, ethniques, religieuses ont une grande importance et ne peuvent être évacuées, la classe sociale déterminée par la condition économique est fondamentale.

Le Front National n’est pas antisystème, il est juste un moyen de conservation des privilèges sociaux en sacrifiant les classes populaires, en maintenant un rayonnement de manière agressive autour de ses frontières et en tentant de ranimer ce qui reste de son imaginaire colonial.

Celui qui a connu l’exil et le déclassement suite à des persécutions politiques a la possibilité de continuer la lutte ou de refaire sa vie et de chercher la réussite personnelle. Le Congo est le pays de LumumbaMulele mais aussi de Tshombéhomme de paille des européens qui a financé les militants d’extrême droite dont Duprat (l’homme qui a inventé le Front National) dans les années soixante.

Il n’y a pas de couleur pour se ranger du côté des dominants, pas de couleur pour trahir, pas de couleur pour haïr.

LU SUR http://quartierslibres.wordpress.com/

Homme, blanc, 35 ans, provincial : le portrait-robot du policier type

LE MONDE | 22.01.2014 à 12h20 • Mis à jour le 22.01.2014 à 20h24 |Par Laurent Borredon et Alexandre Léchenet
Le ministre de l'intérieur, Manuel Valls, a participé à la cérémonie de bienvenue aux nouvelles recrues de la police nationale, à la préfecture de police de Paris, le 4 décembre.
Le ministre de l’intérieur, Manuel Valls, a participé à la cérémonie de bienvenue aux nouvelles recrues de la police nationale, à la préfecture de police de Paris, le 4 décembre. | AFP/PIERRE ANDRIEU

 

Il s’appelle Christophe, il a 35 ans, a grandi en province et il est blanc. Voilà le profil type du policier que l’on peut établir à partir des bénéficiaires de la prime de résultats exceptionnels. L’échantillon est important : près de 40 000 adjoints de sécurité (ADS), gardiens de la paix, officiers et commissaires, sur les 123 000 que comptait la police en 2013. Le mode d’attribution de la prime, qui permet à tous les types de services, catégories et directions d’être récompensés, garantit également une certaine représentativité.

Ce policier type est donc un homme, comme quatre policiers sur cinq. La féminisation est en cours, mais c’est un processus long. Pour la distribution de la prime, l’administration se garde de faire de la discrimination positive. La répartition est néanmoins inscrite sur les tableaux de bilan que font remonter les directions, agissant comme une piqûre de rappel et garantissant l’équilibre. Dans chaque direction, un quart de femmes sont ainsi récompensées, sauf chez les CRS, où elles ne sont qu’environ 6 %.

 

 

Parmi les policiers primés, ce sont les deux grades situés aux extrémités de la hiérarchie qui sont les plus féminisés : les ADS, héritiers des emplois jeunes (32,5 %), et les commissaires (25,7 %). Chez les gardiens de la paix et gradés, on plafonne à moins de 17 %. Ces répartitions correspondent aux proportions rencontrées dans l’ensemble de ces corps : 34 % de femmes chez les ADS, 18 % chez les gardiens, 23 % chez les officiers, 25 % chez les commissaires, et seulement 11,3 % à des postes de direction.

 

 

Christophe a grandi en province. C’est le cas de près de 80 % des policiers, et rien ne paraît pouvoir infléchir cette tendance de fond, ni la prime de fidélisation pour les policiers qui choisissent Paris et sa région, ni l’élargissement du recrutement par la voie des ADS. « Ils n’ont qu’une hâte, c’est de retourner en province », se désole-t-on à la direction générale de la police nationale (DGPN).

BEAUCOUP DE CHRISTOPHE ET STÉPHANIE, PEU DE KARIM

Le policier type s’appelle Christophe, mais il pourrait s’appeler Sébastien, Laurent ou Frédéric. Ces quatre prénoms sont en effet portés par 11,26 % des policiers. Et 12 % des femmes policiers s’appellent Stéphanie, Nathalie, Isabelle, Sandrine ou Céline. Ces prénoms, parmi les plus populaires en France, ont été donnés principalement entre 1965 et 1980. Chez les ADS, ce sera Nicolas, Julien ou Kévin.

 

 

La diversité des origines, ou son absence, se lit aussi dans les prénoms. Environ 1 500 policiers primés en portent un à consonance étrangère – à peine 3 % dutotal. Le premier (Karim) arrive en 143e position.

Bien sûr, il ne s’agit pas d’une mesure scientifique du poids des Français issus de l’immigration récente, difficile à établir en raison de l’interdiction des statistiques dites « ethniques » en France. Mais elle permet de se faire une petite idée du visage de la police. « Nous avons des policiers bien formés, mais ils n’ont jamais connu l’ambiance de l’Ile-de-France ou même des quartiers difficiles avant d’arriver », regrette un haut responsable policier.

Rendre infâme les autres pour masquer sa médiocrité

Chaque époque a ses contestataires et ses méthodes de luttes. Aujourd’hui, tout est vague, flou et mou, et surtout tout s’agite sur internet où les déclarations intempestives et les invectives font passer leurs auteurs pour des militants engagés dans l’action concrète et radicale. Le spectacle et le divertissement se substituent à la lutte sociale. Les diatribes des activistes d’internet résonnent comme une réunion de catcheurs : un show dont les confrontations physiques et politiques sont absentes.

La meilleure façon de se travestir en chevalier blanc sans proposer aucune réponse politique est de s’attaquer à un groupe imaginaire aux pratiques présentées comme déviantes. Bien sûr, il s’agit d’insinuer que ce groupe ultra puissant règne en maître sur la société, qu’il décide de tout et détruit des vies pour se protéger. L’ennemi devient une secte secrète entièrement dévouée au diable.

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Prenons un groupe qui connait un petit succès sur le net : le SKS Crew. Leur dernier titre la loi du silence « balance du lourd », ils « dénoncent grave ».
Que dénoncent-ils ? Que le pouvoir est aux mains des francs-maçons satanistes qui enlèvent et violent des enfants dans le plus grand silence et avec la complaisance des institutions.
Du lourd. Du trash même. Il suffit de regarder la forme pour s’en rendre compte.

Comment le SKS Crew s’y prend pour illustrer ses accusations gratuites et infondées ? En reprenant des images racoleuses d’émissions de télévision.
La médiatisation d’un certain nombre de condamnations permet de faire un clip dans lequel des corps d’enfants abusés sont exposés. Les accusations de secret n’ont cependant pas lieu d’être puisque ces condamnations sont intervenues après des enquêtes de police. En réalité, les images (bien réelles) ne servent qu’à choquer pour faire passer des théories fantasmés et ne reposant sur aucun élément concret. Une fois happé par des images d’une violence inouïe, le spectateur est prêt à tout entendre. Grâce à cette technique de manipulation classique où la forme dilue le fond, le message passe et n’est pas remis en question. L’instrumentalisation des images permet de construire un discours accusateur et de désigner la menace de son choix, en l’occurrence une élite masquée, omnipotente et maléfique.

On note au passage que le SKS Crew a une bien étrange conception de la défense des personnes martyrisées. Pas certain que les victimes et leurs proches se sentent réconfortés, éclairés ou restaurés dans leur dignité en découvrant des images d’eux dans un clip diffusé sur internet.

Les images que le SKS Crew instrumentalise sont en réalité issues d’affaires ne concernant pas les élites mais des gens des classes populaires, comme celle d’Angers. Dans cette affaire, comme dans la majorité des affaires de pédophilie, les prédateurs s’avèrent être des proches de leurs victimes. L’enfer est banal, parce qu’il est le lot quotidien de trop de gens, en particulier dans les quartiers. C’est la conséquence de la misère et non l’œuvre d’une secte.

En appliquant la grille de lecture du SKS Crew, on pourrait conclure que les cités HLM sont le plus grand repère de francs-maçons juifs communistes et écologistes, puisqu’on y trouve une grande partie des gens condamnés pour viol y compris sur mineurs.

Certes, les pauvres sont plus souvent condamnés que les riches pour les mêmes types de crime. Néanmoins, cette constante n’est pas la preuve d’un complot satanique mais résulte du fait que la justice appliquée en France continue d’être une justice de classe. Le diable n’a rien à voir là-dedans.

Lorsque des réseaux de pédophiles sont démantelés, il apparaît généralement que ceux-ci ne reposaient pas sur une allégeance à Satan, mais bien sur des rapports de soumission et de subordination de nature économique entre les organisateurs, les participants et les victimes du trafic. Globalement, le notable reste en position de force, tout comme l’occidental qui pratique le tourisme sexuel est en position économique dominante (il n’y a pas que des riches francs-maçons qui vont à Pattaya).

Le viol d’enfant ne toucherait que les pauvres, on en ferait une fatalité, un peu comme la drépanocytose ou le paludisme. Mais comme le viol d’enfant touche toutes les classes sociales, il devient un sujet dont on parle, parfois de manière sensationnelle ou spectaculaire.
Très souvent, ce sont les Rroms et les juifs qui se sont vus attribuer le rôle de violeurs ou de mangeurs d’enfants. Puis, dans les années 80, sont apparues les blagues racistes qui disaient qu’une petite fille maghrébine ou turque vierge était une môme qui courrait plus vite que son père. En somme, quand on veut salir un groupe, l’accusation d’inceste et/ou de pédophilie se révèle très commode et particulièrement redoutable. On peut aussi comparer cette démarche à celle de l’accusation de viol infondée qui a servit systématiquement de prétexte aux lynchages.

Aujourd’hui, dans l’ambiance de la France de la « manif pour tous », il est de bon ton de dire du mal des homosexuel.le.s et de regretter que la morale s’écroule en raison de lobbys francs-maçons.
Alain Soral, source d’inspiration de Rockin Squat (maitre étalon du rap qui parle d’élites satanistes et mentor de SKS Crew), compare explicitementl’homosexualité à la pédophile.
Dire qu’un homosexuel qui élève un enfant le fait pour avoir des relations sexuelles avec lui est ignoble et infondé, mais avec des images choc cela devient audible. C’est du même tonneau que lorsque certains réactionnaires expliquent qu’une éducation faite par un homosexuel influe sur l’orientation sexuelle de l’enfant. Jusqu’à preuve du contraire, l’écrasante majorité des homosexuels sont le fruit d’une éducation dispensée par des hétéros. En réalité, ces attaques ne contiennent ni explication rationnelle, ni démonstration scientifique ou sociologique. Elles servent simplement à forger un discours provocateur pour faire passer une idéologie.

S’agissant de savoir quelle idéologie promeut le discours du SKS Crew, pas besoin de chercher très loin. Les illustrations mises en avant par le SKS Crew témoignent de leur parti pris (on y voit Serge de Beketch et Roger Holleindre en héros de la cause).

Les grands héros du clip du SKS Crew sont des militants d’extrême droite issus de la sphère catholique traditionnelle combattant le droit à l’avortement. Là encore, on est dans le fantasme. Si l’Église et les valeurs chrétiennes protégeaient de la pédophilie, ça se saurait.

Le scoutisme traditionnel, dont Serge de Beketch (comme l’ensemble de sa famille politique) était un fervent défenseur, connait des affaires de pédophilie . Au passage, l’univers visuel de ce mouvement proche du nationalisme est façonné par les dessins de Pierre Joubert.

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Les images, bien que non violentes, parlent d’elles-mêmes.

Comme par la bouche de Mathias Cardet, on assiste à une tentative de réhabilitation de Roger Holleindre, ancien des troupes coloniales. Il est établi que les troupes coloniales se sont illustrées en Asie et en Afrique en pratiquant viols et mutilations sur l’ensemble des populations y compris les enfants. Ces crimes sont restés tabous, la honte des populations qui n’ont pas voulu dénoncer les viols subits ont permis aux militaires de cacher leurs méfaits. Le viol systématique, est une arme coloniale, la France pays impérialiste et colonisateur tente de faire oublier ses actes.
SKS Crew détourne les yeux de ces crimes commis par des défenseurs de la France, au nom de Dieu et de la Patrie. L’oubli et le pardon sont de mises pour les militaires français. Deux poids, deux mesures, surtout quand cela va dans le sens du riche, blanc et catholique.

Le SKS Crew utilise une méthode qui sidère et choque son public pour faire passer un message implicitement politique. Une secte sataniste ne ferait pas mieux, TF1 non plus d’ailleurs. Ce n’est pas du militantisme, ni de l’engagement. C’est faire du buzz avec l’ignoble et l’invérifiable pour tenter de glisser une disquette.
Cette technique est généralement utilisée par le groupe social majoritaire pour stigmatiser une minorité ou par des activistes politiques pour salir un opposant en le calomniant régulièrement dans les médias. De plus, la calomnie gratuite sur la supposée pédophilie confère une aura de bravoure à celui qui accuse. On en oublie alors les abjections qu’il commet lui-même.

Au final, les gens qui dénoncent « les élites pédophiles » ne combattent rien, et surtout pas la pédophilie. Ils lancent des accusations de pédophilie pour détruire publiquement leurs ennemis politiques ou leurs concurrents, et cela pour des raisons pécuniaires. Alain Soral déclare publiquement qu’il a des preuves d’activités pédophiles de responsables politiques mais qu’il ne les divulguera que si on lui fait des tracasseries judiciaires susceptibles de perturber ses activités commerciales. SKS Crew fait dans l’obscène pour attirer les regards et faire mousser sa petite entreprise.

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Christine Boutin est mariée à son cousin, Alain Soral a pratiqué le coït avec un chien (misères du désir, page 56), l’Eglise catholique et le mouvement scout ont nié les viols commis dans leurs rangs sur des enfants, les défenseurs de l’honneur de l’armée coloniale occultent volontairement les viols commis sur l’ensemble des populations colonisées. En appliquant le même raisonnement que le SKS Crew à ces éléments factuels, on arrive à la conclusion que le Jour de Colère et leurs soutiens sont un rassemblement de pédophiles. Exit la politique, tout dans le drame, pourvu que l’autre soit traîné publiquement dans la boue.

Les militants savent que de telles démarches ne sont pas soutenables, parce que dire n’importe quoi sur des sujets sérieux et graves demeure contre-productif.
Accuser un ennemi de ce qu’il n’est pas, c’est le salir et occulter du débat les choses que l’on n’assume pas soi-même.
Ce que les Soral, Holleindre, Boutin et autres icônes des droites n’assument pas c’est la médiocrité de leurs actions, parce qu’elles sont à l’opposé des valeurs qu’ils prétendent défendre.

Histoire de terminer sur des images choc, on repasse un classique du rap qui reflète les contradictions des classes populaires et dont la punchline la plus juste est « hardcore comme reconnaitre ses torts ».

Notre camp est celui de celles et ceux qui assument leurs actes et qui n’ont pas besoin de baver sur les autres pour lutter contre toutes les injustices.

LU SUR http://quartierslibres.wordpress.com/

La fortune des 85 personnes les plus riches est égale à celle de la moitié de l’humanité, selon une ONG

ECONOMIE – Si vous avez regardé le classement Forbes de ces dernières années, il n’est pas rare que vous soyez restés bouche bée devant le montant colossal des fortunes des Bill Gates et autres Carlos Slim.

Cependant, l’ONG Oxfam vient de publier un autre chiffre qui devrait lui aussi vous laisser coi. D’après un rapport sorti le 20 janvier dernier, la richesse combinée des 85 personnes les plus riches du monde est égale à celle de la moitié la moins riche de l’humanité.

« C’est sidérant qu’au 21ème siècle, la moitié de la population mondiale – soit 3,5 milliards de personnes – ne possède pas plus qu’une minuscule élite » a déclaré Winnie Byanyima, la directrice générale d’Oxfam international.

Une inégalité entre les plus riches et les plus pauvres qui se creuse, d’autant plus que cette minuscule élite (représentant 1% de la population mondiale) a vu sa part de revenus augmenter dans 24 des 26 pays pour lesquels des données sont disponibles entre 1980 et 2012, d’après Les Echos.

Les plus riches finalement peu affectés par la crise

« Même si la crise a momentanément entamé la part des richesses mondiales détenues par les plus riches, ces derniers se sont depuis largement rattrapés, » remarque l’Oxfam dans son rapport.

Les 1% les plus riches en Chine, au Portugal et aux États-Unis ont plus que doublé leur part de revenus national depuis 1980. Même dans les pays réputés plus égalitaires comme la Suède et la Norvège, la part de revenus allant aux 1% les plus riches a augmenté de plus de 50%.

Selon le quotidien économique français, les causes de ce creusement d’écart sont nombreuses: la déréglementation financière, les règles et les systèmes facilitant l’évasion fiscale, mais aussi les mesures d’austérité.

« Sans une véritable action pour réduire ces inégalités, les privilèges et les désavantages se transmettront de génération en génération, comme sous l’Ancien régime. Nous vivrons alors dans un monde où l’égalité des chances ne sera plus qu’un mirage » conclut l’Oxfam.

Wendy Bracat sur http://www.huffingtonpost.fr/

Jouissance émeutière et révolte érotique

 

Les nouvelles érotiques de Lilith Jaywalker permettent de s’immerger dans l’autonomie désirante. Mais la révolution sexuelle reste à accomplir. 

 

La littérature érotique d’aujourd’hui se révèle très souvent dépolitisée. Les niaiseries de Cinquantes nuances de Grey donnent le ton de la littérature sado maso la plus ringarde. Pourtant la littérature érotique peut aussi s’opposer aux contraintes sociales pour privilégier le plaisir. Cette démarche s’oppose donc radicalement à l’ordre social. Mais le milieu militant actuel se révèle très souvent puritain et préfère se référer à l’idéologie plutôt qu’à la vie. L’antisexisme et le postmodernisme coincé ne font que renforcer cette séparation entre plaisir et politique.

Mais il existe quelques exceptions. Lilith Jaywalker, dans le bien nommé Emeutia Erotika, associe désir d’insurrection et plaisir sexuel. Son recueil de nouvelles se révèle très original.

 

L’autonomie désirante pour érotiser la vie

Dans « Plat du jour », une lycéenne vit avec un étudiant dans un petit appartement. La jeune femme se révèle être une militante maoïste originale. « Le matelas au sol, recouvert d’un imprimé indien, était surplombé d’un poster de Mao affublé des moustaches de Dali », décrit la narratrice. Les maoïstes luttent surtout pour loger des familles et n’hésitent pas à occuper un bel immeuble. Mais l’autonomie désirantefréquente également le quartier. Cette tendance du mouvement autonome s’attache à politiser la vie quotidienne. Le désir devient le moteur de la révolution, mais aussi de la vie.

La narratrice décrit un homme de trente-cinq ans, amant d’une lycéenne, après avoir été l’amant de sa mère. Les trois personnes déjeunent ensemble, sans la moindre jalousie. La narratrice se joint aux deux amants pour une révision du baccalauréat particulièrement érotique et ludique. « Il déplora que Fourier ne soit pas étudié et continuait à philosopher quand je m’aperçu qu’elle lui peloter les couilles », décrit la narratrice. Elle se réjouit quand le couple l’invite dans son squat, et songe à ses désirs pour chacun d’eux. Mais elle doit abandonner ses fantasmes lorsque le jeune couple préfère alors dormir. « Adieu couilles, bites, chattes et nichons, je me retrouvais seule sur le palier avec toutes mes envies », déplore la narratrice frustrée.

Toujours dans le squat, elle rentre dans une pièce. Un homme pour lequel elle n’a aucun désir la déshabille. Elle se laisse faire. Même si cet homme la répugne elle savoure son baiser. « Long et délicieux », précise la narratrice. Elle s’abandonne alors au plaisir. Son dégoût pour ce corps vieux et rachitique ne l’empêche pas de jouir, bien au contraire.

 

La nouvelle « Emeutia Erotica » évoque la manifestation des sidérurgistes à Paris de 1979. La narratrice participe au cortège des autonomes, partisans de l’affrontement avec la police. Certes les sidérurgistes défendent leur travail et ne critiquent pas toujours l’oppression du salariat. Mais ces prolétaires s’affranchissent des bureaucraties syndicales pour privilégier l’action directe.

Cette manifestation du 23 mars 1979 débouche vers une émeute. Des vitres explosent dans l’obscurité des gaz lacrymogènes. Face aux forces de l’ordre, les manifestants doivent s’échapper dans la confusion. « A peine quelques encablures séparait mon crâne nu des premières matraques, dont j’entendais les coups pleuvoir », décrit la narratrice. Mais c’est lorsqu’elle se précipite dans un immeuble bourgeois avec d’autres manifestants que l’action devient la plus intéressante. Lorsqu’un jeune émeutier demande à la narratrice de l’essuyer, un frisson érotique se déclenche. Dans l’obscurité elle ne peut que céder à qon désir, de manière gourmande et sensuelle. «Ivre de foutre et de sang, je sentis monter en moi une folle envie de jouir », décrit l’émeutière. Elle évoque ensuite une scène de plaisir intense.

Les deux amants retrouvent ensuite le cortège de la manifestation. Les ouvriers vivent l’alignement des magasins de luxe comme une provocation et détruisent les vitrines. Cette vision d’émeute ne fait que renforcer le désir érotique.

 

 

Dans « Aux aguets », Sandra rejoint Paris dès ses dix-huit ans. Mais elle est rapidement déçue par l’atomisation et la séparation des individus qui règne dans la capitale. « Espérant trouver la liberté dans cet anonymat, jusqu’ici elle n’y avait rencontré que l’ennui », décrit la narratrice. Mais elle rencontre des squatteurs avec lesquels elle se lie. Elle pratique le vol en compagnie de Minty, une femme longiligne. Lorsque la police semble les surprendre, les deux filles s’embrassent sensuellement. Mais Minty, la femme qui a passionnément étreinte Sandra, se révèle être un homme.

Dans « Paris Vision », la narratrice est une femme de trente ans. Elle pensait pourtant mourir jeune. « Seulement, le jour fatidique vint et avec lui la même furieuse envie de jouir et d’en découdre, s’accommodant mal du néant éternel », exprime la narratrice. Avec Sean, elle entretien un amour fidèle et libre. « L’équation fut simple à résoudre : la fidélité des corps n’ayant rien à voir avec celle du cœur, nous ne nous cacherions rien et nous nous permettrions tout », décrit la narratrice. Cette relation permet de sortir de l’urgence sexuelle et de la séduction permanente pour mieux satisfaire ses désirs. La narratrice peut vivre une relation intense avec Yoann, qui en revanche exige l’exclusivité amoureuse. Cette relation amoureuse repose sur le désir, la sensualité et la spontanéité contre le culte de la performance et des manuels techniques desmagasines féminins. « Yoann était un de ses rares amants à savoir que technique et plaisir ne font pas bon ménage. Oublieux des performances, il avait l’intelligence des situations et se montrait toujours merveilleusement inspiré », se réjouit la narratrice.

 

 

La révolution sexuelle est une guerre en cours

Les nouvelles de Lilith Jaywalker tranchent avec le conformisme du petit milieu militant et autonome. Ses récits peuvent choquer les antisexistes et autres gauchistes puritains qui associent le désir et le plaisir à un simple rapport de domination. Au contraire, cette littérature érotique associe l’amour à la liberté. Toutes les normes et les contraintes sociales volent en éclat. L’ambiance insurrectionnelle attise le désir. Le cadre du couple, avec son enfermement et sa routine, est joyeusement démoli. Contre la sexualité marchande, mécanique et formatée, c’est un érotisme sensuel qui s’exprime librement.

Ses récits semblent d’autant plus jubilatoires que le mouvement autonome d’aujourd’hui, loin de l’autonomie désirante héritière des années 1968, s’attache à unedéfense acharnée de l’ordre moral. Le couple et le patriarcat deviennent des remparts les plus solides contre la domination masculine selon ses gauchistes antisexistes. Les anarcho-citoyennistes refusent d’évoquer la moindre perspective de révolution sexuelle. Ils préfèrent aménager le patriarcat en dénonçant la domination masculine, comme d’autres s’indignent de la gloutonnerie de certains patrons. Ils refusent de remettre en cause le couple, la famille, l’école et toutes les institutions patriarcales qui répriment les désirs. Les autonomes font même de l’amour libre une cible politique à combattre.

Ses idéologues gauchistes adoptent les bonnes vielles manœuvres staliniennes et réactionnaires d’un Clouscard ou d’un Michéa. Ils font semblant de vivre dans un monde d’orgie permanente, alors que la morale sexuelle demeure enracinée, pour proposer un retour au puritanisme. Un petite minorité de traders et de petits bourgeois, et apparemment de petits chefs autonomes, peut vivre effectivement une libération amoureuse. Mais pour le prolétariat, c’est la misère affective et sexuelle qui prédomine.

La révolution sexuelle reste donc à réaliser. Une sexualité conformiste diffuse les normes de compétition et de performance. Ses nouvelles formes d’inhibitions s’ajoutent à celles de la société patriarcale et de l’ordre moral qui reste bien ancrées malgré l’étalage du spectacle pornographique. C’est sans doute la limite des récits de Lilith Jaywalker. La frustration n’est jamais durable et ne fait qu’attiser le désir. Ses nouvelles ne parlent pas de la répression sexuelle toujours présente. En revanche, Lilith Jaywalker ravive le souvenir d’une autonomie désirante qui place le plaisir au centre de la lutte et de la vie.

 

Source : Lilith Jaywalker, Emeutia Erotika. Six nouvelles, Sao Maï, 2013

 

Articles liés :

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Insurrection des désirs dans l’Italie des années 1970

Contre l’ennui militant

La littérature érotique de Pierre Loüys

Guillaume Apollinaire et le plaisir érotique

Contrôle des corps et misère sexuelle

 

Pour aller plus loin :

Blog de Lilith Jaywalker

Sébastien Schiffres, « L’Autonomie désirante« , issu d’un mémoire sur La Mouvance autonome en France de 1976 à 1984

Vanina, Réflexions autour de la « libération sexuelle », publié dans le journal Courant alternatif le 20 janvier 2011

 

LU SUR http://zones-subversives.over-blog.com

Le CRIF et l’extrême-droite

Le CRIF est une structure communautaire qui se veut l’unique interlocuteur des juifs de France auprès des pouvoirs publics et de la société. Créé à la Libération, il a peu à peu dérivé à droite, en se faisant notamment le défenseur inconditionnel d’Israël. Le CRIF prétend représenter les juifs français sans que sa représentativité et son influence réelles au sein des juifs de France ne soient ni questionnées ni prouvées. Son influence vient du fait qu’il regroupe des personnalités introduites dans différents cercles de pouvoir (économiques, politiques ou médiatiques) et non du fait qu’il est une organisation de masse. Il est le regroupement d’une partie des élites juives vivant en France.

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Excluant tout autre voix juive ne se soumettant pas à sa ligne politique, le CRIF se transforme en tribunal communautaire et condamne les opposants en les affligeant du stigmate de la « haine de soi » – c’est-à-dire en les accusant de trahir l’identité juive.

Les discours des dirigeants du CRIF reflètent les évolutions de leur vision politique et les stratégies qui en résultent. Ainsi, lors de l’accession de Jean-Marie Le Pen au second tour de l’élection présidentielle en 2002, Roger Cukierman, alors président du CRIF, déclare à un journal israélien que cette victoire politique de l’extrême-droite servirait à réduire l’antisémitisme musulman et le comportement anti-israélien en France. Le score du FN est alors analysé comme un message adressé aux musulmans de France leur indiquant de se tenir tranquille.
Cette simple phrase condense l’analyse politique dominante au sein du CRIF : l’extrême-droite ne représente plus un danger pour les juifs de France mais uniquement pour les musulmans de France.
Jean-Marie Le Pen n’est pourtant pas connu pour sa sympathie envers les juifs, c’est même sa patine anti-juive qui lui a fait perdre le soutien d’associations juives américaines lors des présidentielles de 1988.
Pour le CRIF, le Front National apparaît cependant comme une digue de défense face à un supposé danger islamique. Dans cette perspective, le CRIF et le FN deviennent des alliés objectifs, malgré l’antisémitisme déclaré de Jean-Marie Le Pen et la présence au sein du FN de cadres dont le négationnisme n’est un secret pour personne.

Gilles-William Godnadel, figure médiatique et politique du CRIF, constitue un trait d’union entre l’extrême-droite et certaines structures juives. Sa proximité avec Anne Kling, membre de la mouvance identitaire et auteur de la France Licratisé, est de notoriété publique. Par choix stratégique et compatibilité idéologique, des figures majeures du CRIF et une partie des droites radicales partagent ainsi la conviction que les populations arabo-afro-musulmanes issues notamment des quartiers populaires constituent désormais le principal danger pour la France.

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Pour d’autres fractions de l’extrême-droite, dont Alain Soral et Dieudonné sont les porte-voix, le danger prioritaire demeure juif. Leur objectif est d’utiliser les populations des quartiers populaires comme troupes de choc contre une communauté juive présentée comme omnipotente et cause de tous les problèmes. Enrôler des supplétifs : vieille technique qui rappelle l’armée d’indigènes du temps de l’empire colonial et dont le FN vante encore les mérites dans son nouveau programme.

Rien d’étonnant si Gilles-William Goldnadel rend service gratuitement à des personnes comme Anne Kling ou discute avec Marine Le Pen par l’intermédiaire d’Alain Soral. Tous travaillent dans le même objectif : renforcer un pouvoir basé sur des logiques culturelles et religieuses en France et en Palestine occupée.

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Le FN et les nationalistes n’aiment pas les juifs. Ils font toutefois parfois alliance face à des ennemis qu’ils estiment plus importants, comme le communisme ou l’islam. C’est pour combattre le premier que des personnes comme William Abitbol ont adhéré à l’organisation d’extrême-droite Occident.

peninque_natafC’est principalement pour combattre le second que des militants comme Jean Claude Nataf, le leader âgé de la « LDJ »,côtoient des gens comme Philippe Péninque, l’un des instigateurs d’Egalité et Réconciliation. Les identitaires et la LDJ ont participé ensemble aux assises contre l’islamisation de la France, aux côtés de Riposte Laïque qui estsolidaire de Troisième Voie.
Serge de Beketch, figure des nationalistes, compte parmi lesvolontaires pour défendre Israël lors de la guerre des 6 jours.
Plus récemment, maître Dassa Le Deist, premier avocat d’Esteban Morillo, lemeurtrier de Clément Méric, est l’avocat de l’association « vigilance halal ». Ses déclarations sont alors relayées par les réseaux russes, ceux-là mêmes qui constituent une tribune pour Alain Soral.

De nombreux nationalistes considèrent Israël comme un avant-poste occidental en Orient et une digue face aux masses arabes et musulmanes dans une perspective de guerre de civilisations.
Ce positionnement permet une double évacuation du racisme : on pousse les juifs à s’installer en Palestine occupée et on peut ensuite dire que les tensions en France entre les musulmans et le reste de la communauté nationale ne sont que le résultat de l’importation de la lutte palestinienne en France.
Cette ligne politique est commode pour les droites radicales et toutes les élites françaises car elle permet d’évacuer totalement du débat les dimensions économiques et sociales, tant sur la question palestinienne que sur les tensions sociales en France.

Pour les stratèges du CRIF, il est préférable d’avoir des antisémites sionistes que des antisionistes antiracistes : c’est dans ce cadre que se concrétise politiquement une même vision du monde partagée par le CRIF et l’extrême droite.
Ainsi, il n’est pas contradictoire de voire des leaders de partis européens dedroite radicale partir en voyage en Israël, bien qu’ils aient affichés des positions clairement antijuives par le passé.
Après tout, le sionisme est un nationalisme basé sur des mythes culturels et religieux qui se concrétisent par une colonisation : un pur produit de la pensée européenne en somme.

Cette vision exclut totalement la dimension économique et sociale. La violence qui s’est abattue sur les juifs en France sous Vichy et l’occupation a été possible en grande partie parce que beaucoup parmi celles et ceux qui l’ont subie étaient pauvres et immigrés. Leur arrivée récente en France depuis l’Europe de l’Est et leur précarité économique ne leur permettaient pas d’échapper à la violence par des réseaux de solidarité ou en s’assurant une protection par leur pouvoir économique.
Aujourd’hui, ce sont les immigrés des anciennes colonies et les Rroms, éternels pauvres, qui sont dans cette situation.
Comme l’explique Frantz Fanon, les crimes perpétrés en France ont marqué les mémoires parce qu’ils se sont déroulés sous les yeux des métropolitains. En revanche, les crimes coloniaux ont toujours été passés sous silence. A ce sujet, les défenseurs de l’empire colonial français et les sionistes peuvent tenir une position commune : affirmation du rôle positif d’une colonisation et reconnaissance des massacres de la Seconde Guerre mondiale. Cette posture permet de transformer les anciens bourreaux en résistants (on voit actuellement le FN récupérer le champ lexical de la Résistance en comparant la présence de musulmans en France à l’occupation nazie) et les actuelles victimes de discriminations en barbares (les immigrés musulmans sont décrites comme des hordes par le FN ou Soral, et assimilés à des terroristes tant par l’extrême droiteque les sionistes).

sticker FN

eurabiaDans ce cadre, les sionistes tentent d’imposer une adhésion à leurs positions politiques comme condition sine qua nond’appartenance au monde « civilisé ».
Les discours et la stratégie du CRIF aboutissent à la construction d’une spécificité juive, parce qu’il serait naturel que la République d’après 1944 soit un pouvoir politique qui ne puisse faire autrement qu’être leur protecteur face à une double barbarie : celle du nazi non républicain ou du musulman non compatible avec la démocratie.

Le CRIF néglige cependant totalement la possibilité que les pouvoirs publics puissent très bien passer d’une vision « positive » d’une minorité à une vision négative, et ce en très peu de temps. Considérer la République comme seule garante de la sécurité des juifs et autres minorités, c’est oublier rapidement que c’est dans le personnel politique, policier, économique et administratif de la Troisième République, que s’est forgée la colonne vertébrale du régime de Vichy – Maurice Papon, haut fonctionnaire, ayant continué ses œuvres après l’épuration. Aujourd’hui, une partie des élites françaises, pour se dégager de toute responsabilité concernant la crise économique, cherche des boucs émissaires. Le CRIF semble considérer que les juifs ne seront pas visés et qu’Israël constitue leur salut. Pour combien de temps encore ces deux options seront-elles valides ?

 

lu sur http://quartierslibres.wordpress.com

Manuel Valls est un homme dangereux

Faute de changement après la défaite de l’UMP aux élections présidentielles de 2012, on assiste à une réussite du clonage : Nicolas Sarkozy reprend vie au Ministère de l’Intérieur sous les traits de Manuel Valls. Les ritournelles et les cibles des forces répressives de l’Etat restent les mêmes. Les opérations de communication demeurent une constante.
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Manuel Valls n’a pas de solution à apporter aux problèmes sociaux et n’a pas vocation à le faire. Il se retrouve au poste de premier flic de France parce qu’il sait menacer et faire du chiffre. Son boulot, c’est de faire rentrer les gens dans le rang ou de les mettre au ban de la société.
Il gère le territoire et les populations. Il ne règle pas les problèmes, il soumet et sanctionne. Manuel Valls reste le garde barrière agressif d’une république dont les contours sont flous et la définition abstraite. Il dessine lui-même les frontières de ce qui est convenable ou non, légitime ou pas. A défaut de combattre les injustices, il désigne les ennemis qu’il prétend combattre au nom des valeurs républicaines.

Pour gagner un combat, il est avantageux de désigner un adversaire à sa portée. C’est ce que fait Manuel Valls. Il nomme ses adversaires :
Les sans-papiers, plus simples à combattre que les patrons qui les exploitent, dans la droite ligne du renoncement du Parti Socialiste des années 80.
Les Rroms, parce qu’il est toujours plus facile de s’en prendre aux plus démunis et de créer un consensus autour de la haine d’autrui que de combattre le racisme.
L’islam, en tant qu’ennemi intérieur et danger pour la fameuse laïcité républicaine…
Aujourd’hui, il désigne Dieudonné comme le nouvel ennemi public N°1.

Notre garde barrière ne fait pas cela au hasard. Il remet les clés de la protestation médiatique à une personne dont il ne craint rien. Le PS ne craint pas plus le FN diabolisé que Manuel Valls ne tremble devant Soral, Dieudonné & Cie. On peut même dire le FN et le PS ont un point commun : la volonté de s’adresser au peuple dans sa globalité en excluant les classes populaires de leur programme économique. Il y a aussi les liens d’affaires qui rapprochent parfois les deux partis : un trait d’union financier apparait entre Jérôme Cahuzac et les cadres ou conseillers du FN ; le PS et le FN ont trempé aussi  dans la françafrique après le déclin des réseaux Foccart.
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Manuel Valls utilise la même technique que François Mitterand lorsqu’il a cherché à détruire toute contestation à gauche afin de cacher ses renoncements : transformer la colère sociale en racisme.
Ce jeu est dangereux. Parce qu’il ne fait pas disparaître la colère, ni les raisons de la colère. Bien au contraire. En faisant des discours fondés sur les tensions raciales et culturelles, Manuel Valls divise et permet le passage à l’acte àl’encontre des plus faibles. Il faut rappeler qu’avant d’être ministre, il était maire d’Evry. C’est lors d’un de ses mandats qu’il regrettait de ne pas voir assez de « blancs » dans un quartier de sa ville.

Pas assez de blancs pour dire trop de noirs. On peut aussi remarquer que lorsque Christiane Taubira a été attaquée par des racistes, Manuel Valls n’a pas mis trop de zèle à retrouver et sanctionner les fautifs. On constate également que les paroles islamophobes ou racistes des policiers se libèrent sur le net et se concrétisent sur le terrain, sans réaction franche de leur ministre.
En revanche, lorsqu’il s’agit de jouer avec l’Histoire et l’antisémitisme des années 40, sans qu’il y ait aujourd’hui de menace mortelle évidente pesant sur les juifs français, Manuel Valls assure le show. A cet endroit, il convient de rappeler que l’antisémitisme des années 40 était une doctrine promue par l’Etat Français. S’il n’est pas une doctrine officielle de l’Etat français actuel, le racisme à l’encontre des populations immigrées, musulmanes ou Rroms est aujourd’hui toléré, voire légitimé par les pouvoirs publics. Il reste aussi l’expression politique et publique de larges fractions de votants acquises au FN et à l’UMP.

Manuel Valls se positionne comme le défenseur de la communauté juive en danger. La défense d’une égalité à géométrie variable devient alors le privilège accordé par l’Etat à une communauté spécifique. Cette posture du ministre vise de toute évidence à provoquer un retour de flamme en sa faveur, et des associations comme la LICRA ou le CRIF, dupes ou complices, jouent le jeu. Peut-être pensent-elles ne pas être, in fine, les grandes perdantes des tensions sociales transformées par les renoncements de la gauche en tensions raciales et religieuses ?

En pratique, la méthode de Manuel Valls entérine le fait qu’il y a bel et bien une hiérarchie dans les discriminations. Cette vision n’est pas seulement celle de l’UMP et du FN, mais devient potentiellement recevable pour tout le champ politique, y compris à « gauche ».
Certaines discriminations sont tolérables parce que folkloriques, ancrées dans les mentalités ou résultant de lointains carnages coloniaux ; d’autres sont intolérables pour la « République » parce que plus récentes et perpétrées devant témoins. Il est plus difficile d’occulter à la population hexagonale la déportation par voie ferroviaire sur le territoire français que la déportation à fond de cale de l’Afrique vers le nouveau monde. En jouant avec le racisme et en exacerbant les distinctions, Manuel Valls rend crédible l’idée selon laquelle certains sont plus égaux que d’autres, non pas sur des bases économiques mais sur des bases raciales ou religieuses.

Toute la classe politique, du PS à l’UMP, s’est appuyée sur le FN pour détourner la colère sociale sur les immigrés et l’ennemi intérieur « musulman ».
Manuel Valls a passé un cap supplémentaire en faisant de l’antisémitisme, racisme reconnu et combattu par l’État, un miroir déformant pour la révolte des quartiers populaires.

Si on conteste, on devient antisémite. Ainsi, la lutte pour l’égalité devient un combat pour des intérêts particuliers, dans une hiérarchie bien établie. En haut, il y a les classes dominantes qui vivent tranquilles ; en bas et au milieu, la guerre fait rage, sur des critères raciaux et culturels qui évacuent les questions économiques et sociales.

L’action de Valls a pour objectif de préserver le déséquilibre économique qui existe en France en tapant sur les classes populaires et en les criminalisant au besoin. En faisant de Dieudonné (qui sert objectivement les mêmes intérêts économiques que le PS) l’incarnation de la révolte, il tente de tuer dans l’œuf toute perspective de révolte. La contestation sociale et la lutte ne peuvent dès lors être menées qu’avec une marque déposée à l’INPI.
valls vice président
Manuel Valls est dangereux. Il a décidé sciemment de mettre en scène un combat fictif avec un ennemi qu’il a désigné pour des raisons stratégiques. Lorsque l’Etat veut détruire un ennemi, il a les moyens de le faire discrètement. Mais Manuel Valls a préféré opter pour la médiatisation d’un combat truqué. Ce faisant, il nous étrangle en nous proposant deux alternatives lui laissant chacune toutes les cartes en main : se rallier sans conditions à sa vision de la société ou être désignés comme des racistes en puissance.
Le PS d’avant nous proposait la résignation du vote par défaut ; Manuel Valls nous propose la capitulation totale ou l’assimilation à l’une des rares formes de racisme combattue par l’Etat. Valls se sert du repoussoir Dieudonné pour tendre le nouveau piège de la « République ».

lu sur:quartierslibres.wordpress.com

J’AIME PAS LES QUENELLES

PAR Je ne sais pas si la quenelle est un salut nazi, mais faire un bras tendu en haut ou en bas ne m’a jamais vraiment excité. Le poing serré exalte mon petit coeur de punk intérieur, la main tendue me glace. Je suis une petite nature.

Je ne sais pas si la quenelle est « anti-système », mais si tout le monde la fait y compris les militaires, les flics, les matons, ma réticence à tout ce qui porte un uniforme me fait plutôt croiser les bras. Quand je vois des miloches, des pandores, des perdreaux faire la nique à l’ordre établi, mon petit nez d’anar ne renifle pas trop la Révolution.

Je ne sais pas si la quenelle est un bras d’honneur au complot sioniste, à l’état d’Israël, au Crif, au peuple élu, mais si c’est le cas, il faudrait l’assumer un peu plus, ça éviterait des débats sans fin, et on pourrait discuter sérieusement politique et enjeu de pouvoir.

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[Finlande] Manif de hockey et émeute contre le capitalisme et le nationalisme – Tampere, 6 décembre 2013

Pendant ce temps-là, à Tampere (Finlande):

Ça bouge en Finlande en ce moment. Le 6 décembre près de 500 personnes ont protesté contre la célébration présidentielle à Tampere, au cours de la manif de hockey contre le nationalisme et le capitalisme. Des vitrines de banques et de magasins ont été pétées et les flics ont été attaqués.

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Le 6 décembre c’est le jour de l’Indépendance. C’est aussi la réception annuelle de l’élite organisée par le président finlandais. Normalement leur petite sauterie se tient dans le palais présidentiel à Helsinki, mais cette année la palais étant en cours de rénovation ils ont déménagé leur fête nationaliste et élitiste à l’hôtel de ville de Tampere.

En 1918 Tampere était le bastion des Rouges durant la guerre civile. Nous ne l’avons pas oublié. Sur la place qui est dans le centre et aux alentours des milliers de révolutionnaires ont été tués. Nous voulions montrer qu’il y a toujours des révolutionnaires ici, que nous n’avons pas oublié le passé. Une manifestation a été organisée sur le thème très populaire ici du hockey sur glace. Le nom de la manif était “La fête de hockey sur glace des intrus” (Kiakkovierasjuhlat).

Tampere1Près de 500 personnes ont participé, certains fidèles au hockey, d’autres à la pyrotechnie. Nous n’avons pas réussi à nous introduire dans le gala du président, mais la réalité de la société de classe a résonné durant la nuit et les jours suivants dans tous les journaux nationaux qui étaient choqués par les vitrines brisées et les flics blessés.

La manif a continué dans les rues environnantes après que les flics nous aient empêché de marcher sur la rue principale. Alors que la majorité des gens pensaient que la manif était finie et quittaient la scène, des participants voulaient revenir vers le lieu de la fête présidentielle. À ce moment là une personne a été arrêtée. Ensuite ils sont repartis vers les grilles de l’hôtel de ville de Tampere et ont réussi à attaquer les flics une fois de plus. La plupart des gens étant partis au fur et à mesure, la police a arrêté au hasard des individus.

Au total 28 personnes ont été arrêtées. Elles ont été relâchées les jours suivants avec des charges mineures contre elles et des amendes allant de 60 à 200 euros.

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Le citoyennisme est une illusion – À bas l’État

Le citoyennisme est une illusion – À bas l’État

Traduit de takku par camotazo, 12 décembre 2013

Frantz Fanon : la vie oubliée du damné de la terre

Il y a 52 ans, presque jour pour jour, mourrait Frantz Fanon non loin de Washington. La mémoire humaine est souvent trop sélective. Il paraît aussi que nul n’est prophète chez lui. C’est le cas de Fanon, penseur français d’origine martiniquaise et révolutionnaire algérien, qui demeure largement méconnu en France, en Martinique comme en Algérie. Le psychiatre reste pourtant une figure majeure pour tous les révolutionnaires tiers-mondistes, souvent africains et afro-américains – un paradoxe qui ne fait que refléter la complexité de celui qu’Aimé Césaire qualifiait de « premier penseur de la colonisation et de la décolonisation ». Rappelons à notre bon souvenir, aux côtés des fanoniens Matthieu Renault et Magali Bessone, l’auteur du légendaire essai Les Damnés de la terre.

Intellectuel incontournable pour certains, révolutionnaire exemplaire pour d’autres, initiateurs de la violence et danger pour l’Occident pour les derniers, Frantz Fanon est assurément de ceux qui ne font pas consensus. Ce paradoxe tient sans nul doute à la radicalité de ses écrits et de son action. Inspirateur du FLN, de la décolonisation africaine ou encore du Black Panther Party, il ne pouvait pas faire l’unanimité. Chose un peu plus surprenante : si Fanon est très connu des milieux militants et intellectuels, son nom n’a que peu été porté aux oreilles d’un public plus large.

fanon

Frantz Fanon : psychiatre, penseur et révolutionnaire

Frantz Fanon, le révolutionnaire

Né en 1925, à Fort-de-France, Frantz Fanon est issu d’une famille nombreuse de la petite bourgeoisie. Jeune, il connait la Martinique pétainiste de l’amiral Robert, marquée par les pénuries alimentaires et la division raciste de la société. Il fréquente le Lycée Victor Schœlcher, où il a comme professeur Aimé Césaire, puis s’engage à dix-sept ans dans la résistance avec son ami Marcel Manville au sein de l’armée du général de Lattre de Tassigny. Après un retour en Martinique pour obtenir son baccalauréat, le futur révolutionnaire s’installe à Lyon afin d’effectuer des études de médecine pour devenir psychiatre. Il suit en parallèle des cours de psychologie et de philosophie, notamment ceux deMaurice Merleau-Ponty, qu’il admire, et de l’ethnologue Leroi-Gourhan. Dans le même temps, d’après son amie et biographe Alice Cherki, il dévore les ouvrages de Marx qu’il apprécie particulièrement, mais ne lira jamais Le Capital, ceux de Lévi-Strauss, de Mauss, de Hegel, de Heidegger, de Lénine ou encore de Trotsky. Il garde cependant un mauvais souvenir de cette époque : c’est à l’université qu’il découvre un monde profondément raciste.

Après sa thèse en 1951, il rédige son premier ouvrage théorique, Peau noire, Masques blancs : un pamphlet où le Martiniquais analyse le racisme et le colonialisme d’un point de vue psychanalytique. Il se borne à décrire la double aliénation – du colonisé et du colon – qui apparaît dans les sociétés coloniales. Un thème qu’il étendra par la suite à toute forme de système de domination et qui restera central dans toute son œuvre. Démarrant par une citation d’Aimé Césaire, « Je parle de millions d’hommes à qui on a inculqué savamment la peur, le complexe d’infériorité, le tremblement, l’agenouillement, le désespoir, le larbinisme. » tiré du Discours sur le colonialisme, ce livre ne fait pas de concession. Plus qu’une simple analyse sociale, Fanon entend bien « libérer l’homme de couleur de lui-même » et commence dès lors un nécessaire militantisme : « L’objectivité scientifique m’était interdite, car l’aliéné, le névrosé, était mon frère, était ma sœur, était mon père ». Cet ouvrage fait l’effet d’une bombe : très mal reçu en France, il sera même un temps interdit à la vente.

« Son livre est interdit en France dès sa sortie : le ministère de l’intérieur de l’époque déclare qu’il « menace la sécurité de l’État ». »

Ce ne sera pas sur les terres qui le virent naître que le psychiatre mènera ses plus grands combats : la Martinique, la Guadeloupe et la Guyane s’engagent en 1946 dans la voie de la départementalisation sous l’impulsion d’Aimé Césaire. Les camarades insulaires de Frantz Fanon ne sont pas prêts pour l’indépendance et l’intellectuel le sait. Les Antillais verront ainsi éternellement en lui un homme qui a davantage lutté pour les autres que pour les siens. Ce paradoxe, Césaire l’a très bien compris quand il déclare : « Le tragique ? C’est que sans doute cet Antillais n’aura pas trouvé des Antilles à sa taille et d’avoir été, parmi les siens, un solitaire ». Simone de Beauvoir, qui le connaissait bien, écrit dans son autobiographieLa Force des choses : « On le sentait tout de même gêné de ne pas militer dans son pays natal ».

C’est donc en Algérie qu’il livrera bataille. En 1953, il est nommé médecin-chef d’une division de l’hôpital psychiatrique de Blida-Jionville. Là-bas, il côtoie au quotidien le colonisé qui est son patient. Il explore de très près la détresse et la douleur algériennes. Il doit s’opposer à l’École algérienne de psychiatrie d’Antoine Porot qui décrit l’Algérien comme « un menteur, un voleur, un fainéant et un débile ». Pour Fanon, il ne fait aucun doute que c’est le système colonial qui déshumanise les Algériens. Il n’occupe ce poste que trois ans ; dès 1954, la Révolution algérienne se met en place et le psychiatre la soutient. Fanon démissionne deux ans plus tard pour rejoindre le Front de libération nationale (FLN). L’année d’après, il est expulsé d’Algérie et rejoint Tunis où il collabore à El Moudjahid, organe de presse du FLN. Il fait ensuite partie de la délégation algérienne au congrès panafricain d’Accra, au Ghana, en 1959, puis devient l’ambassadeur du Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA) auprès de l’Afrique noire.

jean-paul-sartre

Jean-Paul Sartre

Il écrit dans la foulée son troisième livre : L’An V de la révolution algérienne, sociologie d’une révolution. En 1960, il fait la rencontre de Jean-Paul Sartre : l’admiration est réciproque depuis longtemps déjà. Le philosophe existentialiste préface l’œuvre majeure de Fanon, Les Damnés de la Terre. À la fois manifeste en faveur de la décolonisation, analyse de la violence inhérente aux sociétés coloniales (« Le colonialisme […] est la violence à l’état de nature »), ce livre est interdit en France dès sa sortie : le Ministère de l’intérieur déclare alors qu’il « menace la sécurité de l’État ». Il ne manquera pourtant pas de s’imposer comme une œuvre essentielle au sein des mouvements tiers-mondistes et anticolonialistes. Atteint d’une leucémie, Fanon décède le 6 décembre 1961 à Washington, quelques mois avant l’indépendance algérienne. Quantitativement pauvre, son œuvre est néanmoins dense et sa pensée, en plus d’être encore trop ignorée, est souvent mal comprise.

Frantz Fanon, penseur de la colonisation

La pensée de Fanon est très liée à sa formation de psychiatre. En tant que marxiste, il s’intéresse naturellement à la structure sociale des sociétés qu’il analyse, mais sa profession le pousse à réfléchir plus particulièrement à l’aliénation. Il n’est pas tout à fait exact de le considérer, d’une façon exclusive et cloisonnée, comme un penseur des colonisés : c’est tout le colonialisme, qui crée une double aliénation sur le colonisé comme sur le colon, qu’il examine dans son œuvre. Peau noire, Masque blanc jette les bases de cette étude en profondeur. Le psychiatre se penche d’abord sur les rapports entre noirs et blancs : le Noir, animalisé par le système colonial inégalitaire par essence est emprisonné par le colonialisme même s’il peut provoquer différents types de réactions sur lui (« le Noir qui veut blanchir sa race est aussi malheureux que celui qui prêche la haine du Blanc ») ; le Blanc est juridiquement et socialement supérieur au Noir. Chacun intériorise en lui ce rapport et accepte volontiers les clichés racistes. Et ce rapport poursuit Fanon, n’est pas le propre des sociétés coloniales : il existe également en France car le problème est avant tout le racisme en tant que fait de société.

Le rap et Frantz Fanon

Si Fanon est un oublié de l’intelligentsia française, le rap français lui est largement reconnaissant. Les fanonistes les plus remarqués sont certainement ceux qui appartiennent à l’école du « rap de fils d’immigrés » qui est composée de La Rumeur, Anfalsh (et sa tête d’affiche, Casey), Al ainsi que de Shéryo et du groupe Less du Neuf à une époque. Engagés et réfléchis, ces rappeurs ont toujours eu pour priorité de dénoncer les injustices qui frappaient principalement les minorités en France. Il n’est donc pas illogique de retrouver dans leurs musiques des références au penseur antillais. La Rumeur est sans aucun doute le groupe qui montre le plus souvent sa sympathie pour Fanon : on peut apercevoir un exemplaire des Damnés de la Terre sur la couverture de leur mixtape Nord Sud Est Ouest, ainsi que des références plus explicites surNature morte ou Le chant des Casseurs. De son côté, Casey n’hésite pas à parler des « pamphlets de Fanon » qu’elle bouquine.

Mais Fanon est une figure appréciée par un large éventail de rappeurs. On pourrait citer parmi eux : MédineDisiz,M.A.P.Rockin’ SquatDemi-Portion ou encore Rocé, qui se déclare « lecteur de Kateb, Fanon et consorts ». La raison est fort simple : le hip-hop est un mouvement qui se considère en marge de la société, du moins pour sa partieunderground, et dont les activistes sont souvent issus de communautés minoritaires. Le radicalisme de Fanon, son engagement en faveur des peuples du Tiers-Monde et sa marginalité au sein des milieux intellectuels en font une icône naturelle. C’est certainement pour cela que Youssoupha, dans Noir Désir, peut clamer : « Récupérez vos Voltaire et vos Guevara / Mon histoire est écrite par Frantz Fanon et par Sankara ».

Outre-Atlantique aussi, le Martiniquais est une référence pour les milieuxunderground, certainement grâce au Black Panther Party. Dès les années 1970, des précurseurs comme Last Poets ou Gill Schott Heron (« Never can a man build a working structure for black capitalism./ Always does the man read Mao or Fanon ») n’hésitaient pas à faire référence au psychiatre.

Fanon n’est cependant pas reconnu uniquement dans le rap comme l’atteste le titre Year of tha Boomerangde Rage Against The Machine.

Le racisme est une doctrine qui instaure et justifie une hiérarchie fondée sur une prétendue différence biologique entre des individus d’ethnies différentes. Dans une société raciste, le racisme n’est que l’expression de la domination sociale, explique-t-il dans son livre posthume Pour la Révolution africaine: « Le racisme n’est pas un tout mais l’élément le plus visible, le plus quotidien, pour tout dire, à certains moments, le plus grossier d’une structure donnée  ». La France est pour lui du mauvais côté de la barrière. Il écrit dans Peau noire, Masques Blancs : « Une fois pour toutes, nous posons ce principe : une société est raciste ou ne l’est pas. Tant qu’on n’aura pas saisi cette évidence, on laissera de côté un grand nombre de problèmes. Dire, par exemple, que le nord de la France est plus raciste que le sud, que le racisme est l’œuvre des subalternes, donc n’engage nullement l’élite, que la France est le pays le moins raciste du monde, est le fait d’hommes incapables de réfléchir correctement ».

Il décrit la société française ainsi : « Le Français n’aime pas le Juif, qui n’aime pas l’Arabe, qui n’aime pas le Nègre ». Le Noir en France subit la même aliénation que dans les pays colonisés. Il n’est qu’une minorité dans un pays raciste qui le renvoie face aux préjugés que l’on porte sur lui. Quand le Martiniquais s’installe dans l’Hexagone, il veut alors devenir Blanc et s’assimiler à lui. Il adopte le langage du Blanc et perd son accent et son créole. Fanon s’oppose alors à Sartre qui, dans Anthologie de la poésie nègre et malgache, développe l’idée que l’adoption du langage blanc par le Noir est une manière de s’opposer au colon. De son côté, le Blanc développe une relation particulière avec le Noir, qu’il ne voit jamais comme son égal. Dans la société raciste, estime Fanon, le Blanc impose ses valeurs au Noir qui perd tous repères. C’est pour cela que le psychiatre voit en la « négritude » de Césaire, Senghor et Damas une impasse, qu’il va jusqu’à qualifier de « mirage noir ».

S’il reconnaît que la négritude peut permettre aux Noirs de se libérer de l’emprise blanche, ce mouvement exalte à ses yeux une culture erronée. Pour Fanon, le repli sur la famille, la religion et les valeurs traditionnelles auraient pu être une solution si celles-ci n’avaient pas été perverties par le colonialisme. De plus, la négritude essentialise le Noir et l’enferme. À titre d’exemple, quand Senghor déclare que « l’émotion est nègre » dans L’Homme de couleur (1939), il interdit au Noir d’être un être de raison. La dernière critique de Fanon à l’encontre de ce mouvement tient au fait que le psychiatre se veut universaliste : s’il est d’accord avec Aimé Césaire sur la nécessité qu’a le Noir à prendre conscience de sa couleur, il rejette l’exaltation de prétendues valeurs noires en disant : « Pour nous, celui qui adore les nègres est aussi “malade” que celui qui les exècre ». Pour lui, briser le colonialisme impose de briser toute ethnicisation.

C’est au nom de l’universalisme que Frantz Fanon combat en Algérie. Un universalisme qui lui permet en outre d’élargir le champ de son analyse : ce n’est plus seulement le Noir et le Blanc qui l’intéressent mais le colonisé et le colon, l’opprimé et l’oppresseur, le dominé et le dominant. Il s’éloigne finalement de la dialectique marxiste et de la lutte des classes pour s’approcher de Hegel et de la dialectique de l’esclave et du maître. Fanon veut aider tous les dominés à se libérer des dominants. En Algérie, il doit s’opposer à l’École algérienne de psychiatrie : les pathologies sont diverses et fréquentes chez les indigènes algériens et cette École les explique par des défauts et des caractéristiques inhérentes aux Algériens et dont ne souffriraient pas les Européens.

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Aimé Césaire

Fanon démontre très rapidement qu’ils ne font que transposer leur aliénation coloniale sur leurs patients. L’exemple du voile, développé dans L’An V de la révolution algérienne, l’illustre parfaitement : à l’époque, beaucoup de voix s’élèvent pour dévoiler la femme algérienne et l’administration, estime défendre la femme dominée par le patriarcat algérien en combattant pareille coutume. Ce que Fanon remarque, c’est que ce n’est qu’un moyen d’européaniser la société algérienne. Contrairement à ses collègues, le but poursuivi par Fanon n’est pas d’adoucir la douleur du colonisé. Non, ce qu’il veut avant tout, c’est libérer le colonisé.

Frantz Fanon, penseur de la décolonisation

Une erreur répandue et qui a servi à le discréditer est de voir en Fanon un théoricien de la violence. Certes, elle est présente partout, des Damnés de la Terre jusqu’à la célèbre préface de Sartre: « Car, en le premier temps de la révolte, il faut tuer : abattre un Européen c’est faire d’une pierre deux coups ; supprimer en même temps un oppresseur et un opprimé ». Mais à vrai dire, la violence n’intéresse pas le psychiatre. En tout cas pas en tant que telle. Fanon veut décoloniser les opprimés et la décolonisation va plus loin que l’indépendance. C’est une liberté totale et d’abord mentale ; le théoricien entend opérer une «décolonisation des esprits ». Si cette idée est surtout présente dans Les Damnés de la Terre, elle se trouvait déjà dans Peau noire, Masques blancs lorsqu’il écrivait dans sa conclusion : « Je ne suis pas esclave de l’Esclavage qui déshumanisa mes pères ».

« Cet universalisme lui permet d’élargir le champ de son analyse. Fanon veut aider tous les dominés à se libérer des dominants. »

Comme chez Georges Sorel, la violence n’est pour Fanon qu’une réponse à une oppression et un moyen de se libérer. Ce n’est pas une fin en soi, mais tout au plus un moyen. C’est ainsi qu’il l’exprime en déclarant : « Le colonialisme n’est pas une machine à penser, n’est pas un corps doué de raison. Il est la violence à l’état de nature et ne peut s’incliner que devant une plus grande violence ». L’oppression aliène l’opprimé qui n’a plus que la violence pour lui et en lui (« La première chose que l’indigène apprend, c’est à rester à sa place, à ne pas dépasser les limites ; c’est pourquoi les rêves de l’indigène sont des rêves musculaires, des rêves d’action, des rêves agressif »). La société coloniale prive le colonisé de tout : de valeur, d’amour, de liberté et même d’air. Toute vie décente lui est interdite. Même indépendant le colonisé n’est pas libre. Pour cela il faut qu’il soit indépendant et désaliéné, ce qui suppose une renaissance du dominé (« La décolonisation est très simplement le remplacement d’une “espèce” d’hommes par une autre “espèce” d’hommes»).

Frantz Fanon

Fanon par Zacharie Marignel, pour RAGEMAG.

Son analyse en termes de dominants et de dominés dévie de celle développée par Karl Marx etFriedrich Engels. À l’encontre des philosophes allemands, le Martiniquais ne pense pas que le prolétariat soit la seule classe révolutionnaire par essence. À l’instar de Bakounine, il estime que la paysannerie et le lumpenproletariat ont un rôle essentiel à jouer dans la Révolution. Contrairement aux pays européens, les colonies sont majoritairement rurales et les paysans y sont les plus opprimés. La paysannerie est donc la première classe à libérer. Elle doit se libérer et doit libérer la société. Le paysan de Fanon est le prolétaire de Marx. Ce sont sur ses épaules que repose la Révolution. Son diagnostic est sans appel : «Il est clair que, dans les pays coloniaux, seule la paysannerie est révolutionnaire. Elle n’a rien à perdre et tout à gagner. Le paysan, le déclassé, l’affamé est l’exploité qui découvre le plus vite que la violence, seule, paie. Pour lui, il n’y a pas de compromis, pas de possibilité d’arrangement. La colonisation ou la décolonisation, c’est simplement un rapport de force. L’exploité s’aperçoit que sa libération suppose tous les moyens et d’abord la force ». Mais cet aspect de la classe paysanne est souvent ignoré jusque dans le FLN que soutient Fanon (« La paysannerie est laissée systématiquement de côté par la propagande de la plupart des partis nationalistes »).

Black Panther Party - 1960s

Membres du Black Panther Party dans les années 1960.

Plus étonnant, du moins pour un marxiste, est le rôle qu’il donne au lumpenproletariat. Pour rappel, lelumpenproletariat ou « sous-prolétariat » est la partie du prolétariat urbain non organisée qui vit en marge de celui-ci. Composée de rebuts, vagabonds ou pilleurs, cette couche de la société est vue par Marx et Engels comme ne possédant aucune conscience politique. Les deux philosophes recommandent même au prolétariat de s’en méfier, le lumpenproletariat servant d’après eux souvent les intérêts de la bourgeoisie et de l’aristocratie dont il dépend. Pour Fanon, la donne est différente : lelumpenproletariat n’est pas forcément contre-révolutionnaire ; il peut même constituer « une des forces la plus spontanée et la plus radicalement révolutionnaire d’un peuple colonisé » (Les Damnés de la Terre), une fois doté d’une conscience politique. Cette analyse s’épanouira notamment au sein du Black Panther Party, qui perçoit dans les Noirs des ghettos le lumpenproletariat américain.

« Si Fanon dérange, c’est parce que sa vie et son œuvre – toutes deux indissociables – dérangent. »

Le penseur ne s’intéresse d’ailleurs pas seulement qu’aux moyens de parvenir à la décolonisation mais aussi à l’avenir du pays décolonisé. Dans cette perspective, il se méfie de la bourgeoisie nationale qui se constitue durant la lutte pour l’indépendance (« La naissance de partis nationalistes dans les pays colonisés est contemporaine de la constitution d’une élite intellectuelle et commerçante »). La nation ne doit pas se reconstituer en se mettant au service d’une élite. C’est à cette dernière de servir le peuple : « Il semble que la vocation historique d’une bourgeoisie nationale authentique dans un pays sous-développé soit de se nier en tant que bourgeoisie, de se nier en tant qu’instrument du capital et de se faire totalement esclave du capital révolutionnaire que constitue le peuple ».

Le vrai danger est de voir la bourgeoisie nationale se substituer aux colons et étouffer tout espoir de liberté. Pour Fanon, la seule voie possible est le socialisme : « Les bourgeoisies nationales ne sentant plus la menace de la puissance coloniale traditionnelle se découvrent soudain de grands appétits. Il nous faut encore une fois revenir aux schémas marxistes », souligne-t-il dans Pour la Révolution africaine. C’est d’ailleurs ce qu’il écrit dans la conclusion des Damnés de la Terre : la libération ne peut pas passer par le capitalisme. Les anciennes colonies ne doivent pas chercher à devenir des pays capitalistes, sauf à devenir – à l’instar des États-Unis – à leur tour une caricature de l’Europe. Ils ne doivent pas non plus céder au second impérialisme de leur époque, soviétique. En pan-africaniste, le seul chemin qu’entrevoit le penseur est la coopération des anciennes colonies constituées en nations libres.

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Chefs historiques du FLN.

Si Fanon dérange, c’est parce que sa vie et son œuvre – toutes deux indissociables – dérangent. Elles dérangent d’abord la France car Fanon renvoie la République universaliste à ses contradictions, comme le relève Alice Cherki dans Fanon, Portrait : «Fanon fait apparaître comment la notion de “race” n’est pas extérieure au corps républicain et comment elle le hante ». Il dérange aussi l’Algérie, sa patrie d’adoption qui l’a partiellement oublié. Même si l’hôpital psychiatrique de Blida-Jionville porte aujourd’hui son nom, peu de références au révolutionnaire ont été maintenues. Il a d’ailleurs fallu attendre les années 1980 pour que son nom apparaisse, sur la pointe des pieds, dans les manuels scolaires du pays. La raison de cette légère amnésie ? Le FLN que Fanon soutenait est un parti qui, s’il s’inspire certes du socialisme, se réclame avant tout du nationalisme arabo-musulman. Difficile, dès lors, pour lui, d’ériger en héros de la liberté un Noir agnostique.

Enfin, sa Martinique natale demeure encore pour le moins frileuse. Si un établissement scolaire porte son nom, sa popularité reste très faible en comparaison d’Aimé Césaire, comme l’atteste le résultat du vote pour le nom de l’aéroport de la Martinique. Elle considère encore qu’il n’a rien fait pour elle tout en voyant en lui celui qui lui rappelle sans cesse son manque de volonté d’indépendance, elle qui préféra s’intégrer plutôt que de se libérer… La portée de la pensée de Fanon n’a pourtant cessé de s’actualiser un peu partout dans le monde. Laissons alors sa fille, Mireille Fanon-Mendès-France, en parler : «En Afrique, en Europe, en Asie, au Moyen-Orient, en Amérique, Fanon apparaît aujourd’hui comme plus actuel que jamais. Il fait sens pour tous les militants de la liberté et des droits humains, car l’émancipation est toujours l’objectif premier des générations qui arrivent à l’âge de la maturité politique. »

Entretien avec Magali Bessone

Maître de conférences en philosophie politique à l’Université de Rennes 1, spécialisée sur les questions liées au racisme, Magali Bessone a notamment préfacé un ouvrage regroupant les principales œuvres de Frantz Fanon.

En quoi la pensée de Fanon peut-elle nous aider à combattre le racisme ?

Le racisme « ordinaire » fait l’actualité depuis quelques semaines : au-delà d’effets médiatiques liés aux échéances électorales, au-delà plus largement d’une stratégie de désignation de boucs émissaires qui ressurgit sans cesse (l’histoire l’a hélas montré) en période de crise économique et qui conduit aux replis identitaires sur du « nous » fantasmé, je crois qu’il y a là une sorte de mise en visibilité d’une réalité raciste de la France qui subsistait à couvert ou déguisée. Le racisme n’avait pas disparu, il avait seulement changé de visage et pris l’apparence de la respectabilité. Fanon nous le rappelle : « un homme raciste dans une société coloniale est un homme normal ». Or si la France n’est plus ouvertement coloniale, elle a hérité, sans jamais la déconstruire réellement, de la réalité sociologique de l’organisation inégalitaire et hiérarchisée du colonialisme, dissimulée sous les idéaux prétendument « aveugles à la différence » du républicanisme. La pensée de Fanon nous rappelle l’actualité de la structure coloniale en France et la nécessité de la déconstruire, pour arriver enfin à la certitude que « Le Nègre n’est pas. Pas plus que le Blanc. »

Le processus de « décolonisation des esprits » prôné par Fanon est-il aujourd’hui achevé ?

Fanon, militant, psychiatre et humaniste, traquait la colonisation et ses effets tant dans les structures politiques, sociales et économiques, que dans les esprits : le racisme, comme rapport de domination lié au « schéma épidermique racial » et comme produit culturel de la colonisation produit une déshumanisation, une aliénation à la fois socio-économique et psychique des racisés, qu’il a diagnostiquée dans de nombreux travaux, dès 1952 et l’article Le syndrome nord-africain. Ce faisant, les racisants, les dominants, nourrissent l’illusion d’être « sans race ». Ce double processus est loin d’être achevé : « l’inconscient colonial » est encore très présent dans les revendications universalistes de la figure du « citoyen » français. Mais comme le rappelait inlassablement Fanon, la décolonisation des esprits ne peut passer que par la décolonisation réelle, effective, des structures sociales.

Entretien avec Matthieu Renault

Docteur de philosophie politique à l’université Paris VII Diderot et à l’Università degli Studi di Bologna. Il a soutenu une thèse sur Frantz Fanon en septembre 2011, intitulée « Frantz Fanon et les langages décoloniaux. Contribution à une généalogie de la critique postcoloniale », ainsi qu’un livre la même année qui a pour titre « Frantz Fanon, de l’anticolonialisme à la critique post-coloniale ».

Quel rôle a joué Frantz Fanon dans les différents mouvements de décolonisation, hors de celui algérien ?

fanonTout d’abord, il faudrait regarder son rôle en Afrique quand il était encore vivant, c’est-à-dire entre la fin des années 1950 et le début des années 1960. Quand il était en Tunisie, il est devenu ambassadeur auprès de l’Afrique noire du gouvernement algérien provisoire. Il participait à différentes conférences, notamment au Ghana et en Tunisie. Certes, il travaillait pour le gouvernement algérien mais il était engagé dans un mouvement en un certain senspanafricain. Il a toujours pensé que la lutte algérienne était complètement intégrée à un projet africain et allait même au-delà. Au moment où il est mort, une grande partie de l’Afrique est décolonisée. Ou je dirais plutôt indépendante, car je fais toujours la différence entre « indépendance » et « décolonisation ». Pour Fanon, la décolonisation est un processus plus long que l’indépendance et se poursuit après celle-ci. Il faut une décolonisation des structures cognitives et des esprits. Pour revenir à la question, après sa mort, il a dû jouer un rôle chez Amílcar Cabral, en Guinée. L’indépendance des colonies portugaises vient après et il y a de nombreuses similitudes entre la pensée du guinéen et celle de Fanon, par exemple sur le rôle de la culture ou la critique des bourgeoisies nationales. Il faudrait voir l’influence de Fanon dans le socialisme africain, comme en Tanzanie mais pas dans la version de Senghor. Hors d’Afrique, l’influence la plus importante du psychiatre se situe sans aucun doute aux États-Unis. Même s’il n’est pas question de décolonisation à proprement parler, la situation des Noirs américains a souvent été décrite comme une situation de colonisation interne. Un usage assez intensif a été fait des Damnés de la Terre dans le mouvement Black Power et en particulier chez le Black Panther Party. On retrouve cela dans l’un des bouquins fondateurs du mouvement…

Celui de Bobby Seale et Huey Newton ?

Oui, celui-là [ndrl : A l’affût. Histoire du parti des Panthères noires et de Huey Newton de Bobby Seale] ! Ils retiennent de Fanon le rôle de la violence et son analyse sur le lumpenproletariat. Mais il y a un héritage perdu de Fanon. Il y a aussi des lectures dans des situations qui ne sont ni coloniales, ni post-coloniales, comme au Japon à une époque. En revanche, il y a eu une sorte de déni de Fanon, en Martinique, jusque dans les années 1980. Il était vu comme une sorte de traître à la Patrie. Il y a eu un colloque à Fort-de-France dans les années 1980 sur Fanon [ndlr : en avril 1982] et à partir de là, il y a eu une appropriation plus importante, notamment dans les mouvements indépendantistes. Mais elle reste limitée.

Est-ce qu’en France métropolitaine, la pensée de Fanon peut avoir un rôle dans la lutte contre le racisme ?

Je pense qu’elle joue déjà un rôle mais il reste à voir comment. Elle doit certainement jouer un rôle dans les mouvements décoloniaux français. Je crois aussi qu’elle sera amenée à jouer un rôle plus important. Parce qu’ils mettent l’accent sur le fait que le racisme est un reste du colonialisme. Ils revendiquent que le racisme n’est pas un problème individuel et moral mais bien un problème structurel. La raison du racisme serait à chercher dans les structures matérielles. Il ne suffit pas de comprendre qui est raciste et qui ne l’est pas. Fanon rejette l’idée que les masses sont plus racistes que les élites, cela a peu de sens : il faut analyser si un pays est raciste ou ne l’est pas. Ils rejoignent aussi l’idée que la décolonisation va plus loin que la simple indépendance et doit s’effectuer autant dans les anciennes colonies que les anciennes métropoles. De plus, elle doit se faire pour les descendants d’ex-colonisateurs et pour les descendants d’ex-colonisés. Le processus doit être réciproque. C’est toute son idée de « décolonisation des esprits » qui reste à faire et à clarifier. Il faut comprendre ce qu’est le phénomène de colonisation des esprits, pourquoi il perdure et se reproduit vers de nouvelles formes. Il faut rappeler que pour Fanon, cette colonisation des esprits ne perdure pas d’elle-même dans un imaginaire mais à cause de structures matérielles et politiques qui soutiennent certaines formes de domination. Par exemple, pour reprendre l’exemple du penseur dans Les Damnés de la Terre, la ségrégation spatiale dans les formes d’urbanisation et de division de l’espace public joue un rôle.

Quelle lecture font les études post-coloniales de Fanon ?

La grande réussite des études post-coloniales est d’avoir rétabli Fanon en tant que penseur et théoricien à part entière. En France, on voyait avant tout en lui un révolutionnaire, un homme d’action dont la pensée restait au second plan, ce qui rendait sa réappropriation plus compliquée et l’ancrait dans un passé colonial dépassé. Les études post-coloniales montrent comment Fanon utilisait des théories nées en Europe – notamment le marxisme – pour les distendre ou les traduire, afin de les rendre plus aptes à servir les peuples colonisés. Leurs défauts ont été semblable à ce qui a été fait en France, à savoir le décontextualiser. Ils ont aussi souvent perdu les sources intellectuelles sur lesquelles il travaillait. Mais depuis que la bibliothèque de Frantz Fanonet de sa femme ont été déposées au ministère de la culture algérien, il y a de plus en plus d’études dessus. Nous pouvons maintenant travailler librement sur ses sources, notamment les anglophones qui ont souvent manqué ce contexte intellectuel. Il y a eu un moment une lecture du psychiatre comme théoricien de l’identité. Mais je me suis toujours opposé à cette idée, car ce n’est pas son langage. Il réfléchit en termes de conscience de races et de classes mais jamais en termes d’identité. Il y a une troisième voie à creuser qui est de s’inspirer de ce qu’ont fait les études post-coloniales et de le remettre dans son contexte historique et politique. On ne peut pas juste voir en lui un penseur du multiculturalisme. Ce n’est pas ce qu’il était. Il voulait plus une rupture avec l’Europe mais qui serait dans un deuxième temps une condition de l’ouverture à l’autre.

Boîte Noire

Kévin Victoire sur http://ragemag.fr