Lille : Début de vengeance sur un commissariat

[Aujourd’hui mercredi 20 avril] une nouvelle mobilisation contre la loi El Khomri a eu lieu à Lille. Suite à cette manifestation, un petit cortège, voulant aller se réunir pour l’ag de lutte à l’Insoumise, s’est fait chargée par la BAC. Plusieurs personnes ont réussi à se réfugier dans les locaux de la CNT qui se trouvent à proximité. C’est alors qu’une centaine de keufs a bloqué l’entrée du quartier moulins, puis est rentré en fracturant la porte de la CNT, saccageant l’intérieur, et a arrêté deux personnes arbitrairement, en n’oubliant pas de gazer les gens du quartier.
Nous prenons acte et esquissons un début de réponse à la répression que nous subissons et à la violence de la police. La façade d’un commissariat de lille a été redécorée avec de l’huile usagée et quelques messages explicites ont été inscrits.
Soutien aux inculpés !

PS : et au fait, on n’aime toujours pas la police.

Actualité lue sur Attaque – Indymedia Lille

#OuEstLaViolence ? Compte-rendu subjectif d’un médic’ sur la manifestation du jeudi 31 mars

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Ce jeudi 31 mars, une nouvelle manifestation lycéenne et étudiante est organisée en toute autonomie des bureaucraties syndicales et partisanes. Départ Nation à 11h, pour rejoindre la grande manifestation de l’après-midi à Place d’Italie. Dès 10h30, les flics font déjà bien sentir leur présence sur la place de la Nation. Une petite heure plus tard, le cortège se forme, des slogans sont lancés, la manif quitte la place et s’engouffre dans le boulevard Diderot. Des jeunes, déterminé-es comme jamais à battre le pavé sous une pluie battante.

Il ne s’agit pas ici pour moi de faire un compte-rendu de la manifestation, mais simplement de rédiger un récit des interventions médicales que j’ai pu faire, et d’en profiter au passage pour donner quelques conseils.

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 » J’ai juste eu le temps de photographier le sang frais sur le trottoir avant le passage de la camionnette de nettoyage.

Violences policières systématiques à l’encontre des lycéens

Non, l’élève victime de violences policières rendu tristement célèbre par la vidéo qui a circulé ce jeudi 24/03/16 sur les réseaux sociaux et dans les médias ne constitue pas un cas isolé, il n’est que le symbole de la brutalité systématique exercée ce matin-là par les forces de l’ordre à l’encontre des jeunes manifestants de la cité scolaire Bergson (Paris 19e) alors mobilisés contre la loi El Khomry. Malheureusement, d’autres jeunes ont été touchés, parfois gravement, sans que des images chocs ne soient montrées à leur sujet, mais les faits n’en sont pas moins avérés et je peux en témoigner.

Voici déjà deux semaines que la rue Pailleron où est sise l’entrée de la cité scolaire Bergson est émaillée d’incidents liés à cette mobilisation : plusieurs altercations entre lycéens et forces de l’ordre ont eu lieu, suite aux blocages par les élèves de leur établissement. Mais ce jeudi 24 mars, les cris des jeunes qui m’ont fait me précipiter à la fenêtre de cette même rue aux alentours de dix heures du matin étaient d’un tout autre ordre : c’étaient des cris de détresse.

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SAINT-DENIS : RUE DE LA RÉPUBLIQUE Comment survivre à un assaut antiterroriste

Le 18 novembre dernier, le monde entier a pu suivre en direct l’assaut de la police contre un immeuble de Saint-Denis. Deux personnes liées aux attaques du 13 novembre y mourraient, ainsi qu’un membre de leur famille. Immédiatement, l’opération fut décrite comme hyper-violente, on parlait de 5000 balles tirées par la police. Il fallu par la suite sécuriser l’immeuble pour éviter qu’il ne s’écroule. Après quelques semaines, le récit officiel et dithyrambique des exploits du RAID prenait un coup dans l’aile lorsque les premières expertises établirent que les policiers s’étaient principalement tirés les uns sur les autres pendant de longues heures. [1] Au détour de quelques articles de journaux, nous apprenions aussi que des voisins avaient été blessés par la police, d’autres placés en garde-à-vue antiterroriste, et certains en centre de rétention [2]. Si les journaux noircissent encore des pages et des pages à propos des survivants du Bataclan, les habitants de Saint-Denis qui se sont retrouvés à la rue après avoir subi un assaut de plusieurs heures ainsi qu’un certain nombre d’humiliations n’intéressent pas grand monde. Des lecteurs de lundimatin sont allés les rencontrer.

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« Quand tu as la tête qu’il ne faut pas en ce moment »

Le tee-shirt qui n'a pas plu aux fonctionnaires de police. DCLe tee-shirt qui n’a pas plu aux fonctionnaires de police. DC

Ni sa bouille ni son tee-shirt ne revenaient aux policiers qui l’ont contrôlé au début de l’état d’urgence.

Délio a 21 ans. C’est un Marseillais monté à Paris pour des études de graphisme. Il vit à Bagnolet (Seine-Saint-Denis). Récit d’un dérapage verbal qui en dit long.

Lundi 14 novembre, deux jours après les massacres de Paris, lui et sa copine sortent du supermarché, les mains chargées de courses pour prendre le métro station Gallieni, terminus de la ligne 3 à 14h. « On était devant les portiques du métro. J’ai mis un peu de temps pour retrouver ma carte dans mes poches. Trois agents de sûreté RATP et quatre de la police nationale qui me regardaient s’approchent. Un policier m’arrache mes sacs de courses des mains. Je leur dis attention aux œufs. Ils étaient tendus. Ses collègues font un petit périmètre pour dévier les gens. Il me demande de me tourner contre le mur. Il me fouille et pas sommairement, me palpe les poches, regarde mon téléphone. Le policier me demande si j’ai un objet dangereux sur moi qui peut servir d’arme ou qui peut blesser, je dis que non. Un autre me demande mes papiers. Je lui tends mon passeport. »

« l’Etat c’est le capitalisme donc c’est un message contre l’Etat »

Le policier remarque alors son sweat-shirt avec l’étoile rouge et le slogan « non au capitalisme et au racisme » porté sous sa veste ouverte. « C’est un petit cadeau de ma mère qui l’avait acheté à un meeting de Mélenchon. Après coup, j’ai regardé l’étiquette, c’est le nom du site socialisme.be » explique Délio. Le sweat est vendu par le Parti socialiste de lutte (PSL) la gauche radicale belge. « Et là il me dit :  » c’est un message contre l’Etat, il ne faut pas porter ça en ce moment, il vaut mieux garder ses opinions pour soi, surtout ce genre de messages. Je lui réponds qu’on est en France, qu’on peut encore porter ce qu’on veut, que c’est pas contre l’Etat. Il me répond que « l’Etat, c’est le capitalisme donc c’est un message contre l’Etat ». J’insiste en disant que je porte ce que je veux. Il me répond « plus pour très longtemps ! » Je lui lance « Vous avez hâte d’avoir tous les droits et d’arrêter qui vous voulez ? » Il me répond « Oui les petites faces de merde comme toi, on a hâte de pouvoir les arrêter sans raison, les petites faces de pine, les petites faces de shiteux comme toi ».

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L’état d’urgence annoncé par Hollande ça fait mal aux libertés…

L’état d’urgence a été décrété par Hollande suite aux attentats de Paris. De plus, les contrôles aux frontières seront rétablis jusqu’à nouvel ordre. Mais ça veut dire quoi au juste état d’urgence ? Il faut se questionner maintenant afin que les événements atroces ne laissent place à la peur et au pouvoirs aveugles et démesurés de l’État.

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« J’ai également demandé des renforts militaires. J’ai également convoqué le Conseil des ministres. Deux décisions seront prises : l’état d’urgence sera décrété, ce qui veut dire que plusieurs lieux seront fermés, la circulation sera interdite dans certains endroits. L’état d’urgence sera décidé sur l’ensemble du territoire.

François Hollande aux alentours de minuit le vendredi 13 Novembre 2015

C’est quoi l’état d’urgence ? C’est un texte régi par une loi voté le 3 avril 1955.

Depuis la Seconde Guerre mondiale il a été utilisé à plusieurs reprises :

  • Durant la guerre d’Algérie, mais uniquement sur le territoir colonisé (l’Algérie française), de 1955 à 1961 avec des durées indéterminées pour des durées allant jusqu’à 12 mois).
  • Dans les territoire occupés en Kanaky (Nouvelle-Calédonie) pendant près de 6 mois.
  • En 2005 pendant la vague d’émeutes qui toucha les cités françaises. C’était pour l’instant l’unique fois qu’il avait été utilisé en France métropolitaine.

C’est donc la première fois que l’état d’urgence est décrété sur l’ensemble du territoire français. En 2005 seuls certains départements étaient concernés par l’état d’urgence.

Quelles en seront les principales conséquences sur les libertés publiques ? Elles seront très importantes :

Une circulation amoindrie :

La déclaration de l’état d’urgence donne pouvoir au préfet dont le département se trouve en tout ou partie compris dans une circonscription prévue à l’article 2 :

1° D’interdire la circulation des personnes ou des véhicules dans les lieux et aux heures fixées par arrêté ;

2° D’instituer, par arrêté, des zones de protection ou de sécurité où le séjour des personnes est réglementé ;

3° D’interdire le séjour dans tout ou partie du département à toute personne cherchant à entraver, de quelque manière que ce soit, l’action des pouvoirs publics.

En gros, le préfet peut décider de boucler complétement un quartier. Il peut aussi faire des cas individuels. Ainsi il fait en sorte qu’une liste de personnes soient interdites d’une partie du territoire. Le tout en procédure hyper rapide. Tout pouvoir au préfet.

Des mises en liberté surveillées facilitées :

Le ministre de l’intérieur dans tous les cas et, en Algérie, le gouverneur général peuvent prononcer l’assignation à résidence dans une circonscription territoriale ou une localité déterminée de toute personne résidant dans la zone fixée par le décret visé à l’article 2 dont l’activité s’avère dangereuse pour la sécurité et l’ordre public des circonscriptions territoriales visées audit article.

L’assignation à résidence doit permettre à ceux qui en sont l’objet de résider dans une agglomération ou à proximité immédiate d’une agglomération.

En aucun cas, l’assignation à résidence ne pourra avoir pour effet la création de camps où seraient détenues les personnes visées à l’alinéa précédent.

L’autorité administrative devra prendre toutes dispositions pour assurer la subsistance des personnes astreintes à résidence ainsi que celle de leur famille


En gros chaque personne fichée à l’antiterrorisme pourra se faire coincer chez lui à partir de demain. Par chance (on est vraiment bien en France), il est précisé que nous ne pourrons pas être parqué dans des camps.
On notera le côté vague d’une telle appellation. Toute personne jugée par l’État (juge, préfet…) comme « dangereux » va pouvoir se retrouver sous séquestre.

Libertés publiques et politiques restreintes :

Le ministre de l’intérieur, pour l’ensemble du territoire où est institué l’état d’urgence, le gouvernement général pour l’Algérie et le préfet, dans le département, peuvent ordonner la fermeture provisoire des salles de spectacles, débits de boissons et lieux de réunion de toute nature dans les zones déterminées par le décret prévu à l’article 2.

Peuvent être également interdites, à titre général ou particulier, les réunions de nature à provoquer ou à entretenir le désordre.

Donc. En gros, vous aurez l’interdiction de vous plaindre de cette situation. Toute personne qui contestera l’état existant sera suceptible d’être réprimée. Il est donc possible que les futures manifs de la COP soit interdites.

Censure et perquisitions à domiciles facilitées

Le décret déclarant ou la loi prorogeant l’état d’urgence peuvent, par une disposition expresse :

1° Conférer aux autorités administratives visées à l’article 8 le pouvoir d’ordonner des perquisitions à domicile de jour et de nuit ;

2° Habiliter les mêmes autorités à prendre toute mesure pour assurer le contrôle de la presse et des publications de toute nature ainsi que celui des émissions radiophoniques, des projections cinématographiques et des représentations théâtrales.

Les dispositions du paragraphe 1° du présent article ne sont applicables que dans les zones fixées par le décret prévu à l’article 2 ci-dessus.

Tout est dit. La presse peut être interdite. Les gens peuvent se faire perquisitionner selon le bon vouloir des autorités policières…

Vous n’aurez pas le droit de ne pas être d’accord

Les infractions aux dispositions des articles 5, 6, 8, 9 et 11 (2°) seront punies d’un emprisonnement de huit jours à deux mois et d’une amende de 11 euros à 3 750 euros ou de l’une de ces deux peines seulement. L’exécution d’office, par l’autorité administrative, des mesures prescrites peut être assurée nonobstant l’existence de ces dispositions pénales.

Les peines de prisons peuvent pleuvoir. Enfin peine… on est pas sûr qu’il y ait réellement un jugement… Visiblement il s’agit de peines sortant de tout contexte pénale.

Donc en gros on est face au pire du pire de toutes les formes d’État. Les flics ont des droits quasi illimités, ils seront sur les nerfs. Faites gaffe à vous.

lu sur PARIS LUTTES INFO

A propos des photos dans les manifestations

1. Pourquoi cette campagne ?
Suite à l’explosion de l’usage des appareils photo (smartphones, tablettes, drônes,…) par les manifestants, certaines personnes n’ont pas tout à fait conscience du danger qu’elles courent et font courir à d’autres en capturant des images et en les diffusant sur le net.

Un gréviste lançant un pavé (ou se tenant à côté d’un de ses camarades qui en ferait autant), une travailleuse qui aurait menti à son patron pour aller à une manifestation, des sans-papiers qui ne savent pas que l’Office des Etrangers tiendront leur activité politique en motif contre leur régularisation, un jeune manifestant qui s’est discrètement éclipsé face à des parents ou à des profs réactionnaires, militante antifasciste menacée par l’extrême-droite dans son quartier. Tous ces exemples, toutes ces « exceptions », nous les connaissons. Les manifestants prennent le danger de manifester face aux répressions policière, fasciste, patronale. Ils prennent le danger d’être fiché par la police et d’être filmé par des chaînes de télévision bourgeoises. Mais lorsqu’ils se retournent vers la manifestation, vers leurs camarades, ce sont certains manifestants qui le menacent, parfois sans même s’en rendre compte.

Certaines personnes argumentent que nous devons tous manifester à visages découverts dans les manifestations et que si les manifestants ne veulent pas être exposés aux yeux de tous, ils devraient se masquer, ayant ainsi le choix entre prendre un risque supplémentaire ou être interdit de manifestation. Dans d’autres cas, ce sont des gestes de rupture qui ne peuvent plus avoir lieu tant les téléphones et les perches à selfie sont omniprésentes.

Un coup de pied pour la banque, 50 photos pour la police...Un coup de pied pour la banque, 50 photos pour la police…

S’il est clair que les images des luttes doivent circuler et servir à partager les informations ainsi qu’à la propagande, le problème ne doit pas être retourné : la photographie doit rester un outil du mouvement social, et pas l’inverse. Trop souvent à présent, les manifestants sont devenus les modèles involontaires et forcés de photographes irresponsables.

Un assemblage d'images prises à des moments différents par des personnes différentes, lors des émeutes de Baltimore, ont permis à la police de lancer un avis de recherche.Un assemblage d’images prises à des moments différents par des personnes différentes, lors des émeutes de Baltimore, ont permis à la police de lancer un avis de recherche.

Face à cette problématique et suite à des situations où des militantes et des militants ont dû payer le prix de ces photos à la place des photographes, le Secours Rouge lance une campagne et une plateforme pour que les photos en manifestations -et ailleurs dans la scène- soient prises de façon responsable et réfléchie.

2. La plateforme No Photo
La Plateforme No Photo est une série de comportements que des organisations s’engagent à respecter et à diffuser parmi leurs membres. Essentiellement, cette plateforme fait la promotion d’un usage responsable et intelligent. Il serait idiot d’interdire en bloc tout usage de la photographie en manifestation. Cette plateforme demande en somme à chaque photographe de réfléchir à chaque étape de sa photographie aux personnes qu’il met en danger.
- Avant de prendre quelqu’un en photo : cette personne est elle d’accord d’être prise en photo ?
- En transportant des photos qui n’ont pas été traitées : suis-je en mesure de détruire des photos qui pourraient servir de preuves contre des militants au cas où je suis arrêté ?
- En mettant la photo en ligne : cette photo est elle débarrassée des données qui identifient le photographe (EXIF) ? Permet elle de reconnaître des militants ? Met elle des progressistes en danger ?

La plateforme sera bientôt proposée aux signatures des organisations.

3. Matériel
Deux matériels ont été imprimés :
- Un dépliant qui informe sur les risques et les méthodes de la photographie en manifestation. Télécharger
- Un autocollant avec un logo explicite que les personnes qui ne veulent pas être prises en photo peuvent porter.

4. Tutoriels

4.1 Effacer les métadonnées avec JStrip
JStrip permet d’effacer les métadonnées de nombreux formats de fichiers différents.
Tutoriel à venir.
Télécharger Jstrip

4.2 Flouter les visages avec Photoshop
Veuillez régler la qualité de la vidéo (minimum 720p) pour que la vidéo ne soit pas floue.

4.3 Flouter les visages avec Gimp
Tutoriel à venir.
Télécharger Gimp.

4.4 Prendre des photos avec Obsuracam
Tutoriel à venir.
Lien Google Play Store

5. Liens et notes
- Mediactivista

lu sur SECOURS ROUGE

PONT-DE-BUIS, OCTOBRE 2015. On y va ensemble, on rentre ensemble.

Voilà deux semaines que nous annoncions la tenue d’un festival contre les armes de la police à Pont-de-Buis, petite bourgade du Finistère. Voilà plusieurs années que la police blesse ou mutile régulièrement des manifestants ou de simples badauds lors d’opérations de sécurisation de l’espace public. Qui ne connait pas un cousin éborgné par un tir de flashball « maladroit » ? En France, c’est (entre autres) l’entreprise Nobelsport qui élabore et vend ces armes. « Bon vivant rimant avec prévoyant », ce week-end d’octobre, des manifestant ont pris les devants. Des lecteurs de lundimatin [1] nous racontent.


Les douze voitures bardées de caravanes, barnums et cantines s’enfoncent dans la nuit. Il s’agit d’atteindre un champ qui surplombe le Colisée de la Douffine, sur les hauteurs de Pont-de-Buis. 15 km et 3 pannes plus loin le cortège s’arrête, la nuit est calme, il faut maintenant monter le camp.

Nous sommes le 22 au soir, au fond du Finistère, aux abords de NobelSport, principale usine d’armement de la région. Demain on marche sur l’usine pour bloquer sa production. Le défi est posé et la préfecture le relève, elle décide de nous empêcher d’approcher du site. Au même moment à 800 km de là, la famille de Rémi Fraisse, tué par les gendarmes un an plus tôt sur la zad du Testet, essuie une série d’offenses publiques et d’interdictions préfectorales. Impossible pour elle de rendre hommage à Rémi sans être accompagnée par ceux-là même qui lui ont pris la vie. Le cadre est posé, cette date anniversaire doit passer inaperçue : la police tue, le calme règne.

Vendredi 23 octobre 2015

À Pont-de-Buis, le vendredi matin, l’infoline circule. Objectif : atteindre le point de rassemblement au milieu du village. La gendarmerie a barré tous les accès à l’exception de l’entrée sud. Pendant deux heures, les manifestants contournent le dispositif pour arriver sur la place. Il est 16h, nous sommes près de 500 et, en contrebas, les canons à eau précédés par des grilles bloquent les deux ponts d’accès à l’usine.

Le piège est tendu comme un an avant dans les rues de Nantes, une grille antiémeute comme seul réceptacle à la détermination des manifestants, un écran blanc pour réduire la colère en spectacle. Dès cet instant la foule masquée et partiellement équipée pour le combat est mise face à ses propres contradictions. Subir ou choisir le lieu et le moment de l’affrontement. Tenir un point de cristallisation ou foncer la tête baissée dans un mur. Autant de questions irrésolues dans nos stratégies de lutte. Il existe des surgissements assez conséquents pour percer des dispositifs de la sorte, rien ne justifie pourtant de s’y acharner lorsqu’on est sûrs de perdre.

Une prise de parole publique de l’assemblée des blessés par la police permettra d’éviter le flottement indésiré et de charger de sens notre présence. La manif repart pour tenter sa chance ailleurs, après que le camion des bleus a été maculé d’un orange éclatant. Quelques conseils bien placés d’habitants du village nous conduisent ensuite devant une passerelle gardée par un dispositif beaucoup moins lourd. Une charge plus loin, les manifestants prennent possession de la passerelle avant de faire demi-tour. Un extincteur rempli de peinture pour inonder les visières des gendarmes, quelques pierres pour accompagner leur retraite et nous étions presque de l’autre coté de la rivière. Mais l’enjeu au fond n’était pas là. Notre but n’était pas de nous introduire dans l’usine, il nous reste à découvrir les gestes qui permettraient d’y faire autre chose que précipiter la catastrophe. Notre objectif était de la rendre visible et de bloquer sa production, ce qui était le cas ce vendredi.

A la veille de deux jours de discussions et d’action il fallait éprouver une certaine intelligence collective. Le slogan no tav « si parte, si torna, insieme » (on y va ensemble, on rentre ensemble) gagne progressivement l’ambiance du week-end. Après cette démonstration, nous remontons vers le camp et le temps d’une nuit de fête nous célébrons cette première journée.

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ACAB DISSERTATION

Tout comme l’information, les humeurs populaires changent très rapidement. Alors que la mort de Rémi Fraisse en octobre 2014 avait suscité un sentiment diffus de défiance vis-à-vis de la police, les attentats de janvier ont vu des milliers de citoyens applaudir les snipers et CRS qui protégeaient leur manifestation « Je suis Charlie ».

Si la population française n’est certainement pas un tout homogène, il pourrait paraître opportun d’examiner le rôle que les forces de police occupent dans notre imaginaire politique ainsi que dans notre organisation sociale.

C’est afin de nourrir ce débat que nous avons décidé de publier cette dissertation qu’un lecteur de LundiMatin a eu la gentillesse de nous envoyer. Professeur de philosophie dans un lycée général et technique, il avait décidé suite aux manifestations liées à la mort de Rémi Fraisse, d’interroger ses élèves sur le sens du graffiti ACAB (« All Cops Are Bastards », tous les flics sont des batards). Il nous a fait parvenir la copie qui avait à ses yeux suivi au plus près la méthodologie requise : thèse, antithèse, synthèse.

Extraits :

« Peut-on cependant considérer que tous les policiers sont, non pas des enfants illégitimes, mais des individus mauvais et donc méprisables ? Du « CRS =SS » de 1968 à « un bon flic est un flic mort », la détestation de la police semble constante. Mais s’il faut reconnaitre un certain sens de la formule à ce qu’on appelle parfois la rue, il semble peu pertinent d’en rester au niveau de cette rage adolescente et c’est alors le caractère universel d’un tel jugement qu’il faut interroger. Car enfin, que certains policiers soient peu aimables, c’est entendu (comme certains facteurs ou certaines caissières) mais faut-il pour autant le penser de tous les policiers ? Y a-t-il sens à détester la police en son entier ? Et encore, que certains honnissent la police, c’est un fait, mais tous la détestent-il ? Répondre oui dans les deux cas serait méconnaitre la fonction réelle de la police qui est de rendre possible la vie collective en préservant la société des excès de certains d’entre nous, au moyen du droit et de la force si nécessaire. »

 

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