Gazette activiste toulousaine autogérée par ses lectrices-eurs à photocopier à volonté ! Numéro #11 DISPONIBLE !
Des sketches racistes à « Mohammed Dubois » : les Arabes font marrer
Dans les années 70, les films se moquaient sans scrupule des maghrébins. Cela continue, différemment. Des chercheurs se penchent sur cet objet jamais étudié : l’humour sur les Arabes.
LA SUITE SUR RUE 89
Paris: Des anarchistes s’invitent au cortège anarchiste du 1er mai
Le premier mai est une journée particulière pour les anarchistes puisqu’elle commémore l’exécution des martyrs de Chicago par la justice étasunienne, condamnés à tord pour l’explosion d’une bombe faisant 7 morts dans le camp de la police lors d’une manifestation de masse pour la journée de travail de 8h.
Cette journée est donc dédiée à la mémoire de ces martyrs et est supposée se passer le plus paisiblement du monde en paradant dans de nombreuses villes, drapeaux à la main et camion sono en fin de cortège, afin d’exprimer clairement un puissant sentiment d’indifférence et de passivité face aux exactions de l’État.
Cependant, lors du défilé de Paris, la fête aura été troublée par des éléments indésirables. Le cortège libertaire hétéronome organisé par la FA, AL, la CNT et la CNT-AIT (tendance Gap) aurait été infiltré par des anarchistes. Ces derniers ont fait preuve d’une violence inouïe en attaquant les vitrines d’une banque. Du jamais vu pour les libertaires présents.
« Non seulement ils portent atteinte à la propriété privée, ce qui est inadmissible, mais ils troublent la paix publique, ce qui est encore plus grave ! » confie une manifestante et militante synthésiste encore sous le choc. « C’est totalement contre-productif comme attitude. Nous nous efforçons de faire connaitre l’anarchisme à travers le vente de livres et l’organisation de foires à l’autogestion avec la participations des autorités locales. Ce n’est pas pour voir nos efforts réduits à néant par des squatteurs crasseux et des individus violents qui ne payent aucune cotisation à personne ! C’est à se demander si ce n’est pas la CIA qui les finance. »
Peu après l’attaque de la vitrine bancaire, un évènement plus dramatique se produit. Un agent de la DCRI déguisé en civil pris l’initiative d’aller stopper les fauteurs de trouble. C’est alors que les « hitléro-totos » s’en prirent à lui et le passèrent à tabac. Heureusement le Service d’Ordre de la CNT veille et parvient à extirper le policier des pattes de ses agresseurs. Un membre dudit Service d’Ordre explique que « c’était très dur à voir. Autant de haine chez des individus… J’ai presque cru qu’ils allaient sortir un flash-ball pour lui tirer au visage. C’est un coup à perdre un œil ça. D’autant plus qu’on le connait très bien le Lafon [NdlR – il s’agit du policier en question], il est toujours aux manif’ avec nous. On pourrait presque dire que c’est un intime. »
Après avoir vaillamment sauvé leur camarade des griffes autonomes, la CNT appelle au calme par le biais de leur camion sono: « Les policiers sont des travailleurs comme les autres, arrêtez d’être méchants ou sinon on arrête la manif’ ! »
Aussi surprenant que cela puisse paraître cette déclaration ne fit pas l’unanimité au sein du cortège. Les anarchistes infiltrés étaient peut-être plus nombreux que prévu.
On nous expliquera plus tard que les auteurs de ces violences sont des anarchistes « très très sectaires et très très méchants qui passent leur temps à foutre le bordel un peu partout. Ils invitent même les gens à ne pas participer aux élections que certains d’entre nous utilisent pour promouvoir l’anarcho-légalisme-électoraliste dans le respect des institutions et dans une démarche citoyenne. »
Ailleurs dans le monde il semblerait que de nombreux incidents de ce genre aient aussi eu lieu. Mais faute de cortège rassemblant des organisations libertaires, aucune critique constructive de cette violence aveugle n’aura été faite sur place et personne n’aura pu venir au secours de la police.
Anarcho-Figaro
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Article humoristique et volontairement provocateur réalisé à partir des informations données par Paris-Luttes.info sur un sujet grave: La gangrène légaliste et pacifiste en milieu anarchiste.
Solidarité totale avec celles et ceux qui attaquent !
LU SUR AAA
Un premier mai libertaire très agité
Le premier mai libertaire c’est d’habitude l’occasion d’une balade dans l’Est parisien… Cette année, ça a été beaucoup plus tendu. Compte-rendu partiel qui sera complété au fur et à mesure avec les différentes informations rassemblées. Pour tout complément d’information, notamment sur les interpellé-e-s, écrire à paris-luttes-infos (arobase) riseup.net.
Mise à jour 9 h samedi : cinq personnes étaient en garde à vue, trois d'entre elles hier soir sont sorties à 20 h. Trois personnes sont accusées à tort de dégradations, et deux de violence sur agent dépositaire de l'autorité publique.
Acte I : la balade mouillée
Arrivée à place des Fêtes, comme d’habitude, il y a un peu de monde, sans être très massif. Entre 500 et 1 000 personnes. Comme d’habitude, somme toute.
L’ambiance est assez sympa, bien qu’un peu folklorique comme souvent. Beaucoup de drapeaux noir et rouge et noir. Les orgas sont présentes. La FA a un beau bloc en tête de manif, la CNT, groupée autour du camion a un peu moins de monde que d’habitude. Alternative libertaire est présent plus en queue. Des groupes collent des affiches autour de la manif. Les slogans sont comme d’habitude tournés vers nos ennemis les bourgeois et les flics. « A bas l’état, les flics et les patrons », « Pierre par pierre, mur par mur, nous détruirons toutes les prisons« …
En haut de la rue de Belleville, il pleut beaucoup trop, les tracts commencent à fondre dans la main et les afficheurs arrêtent d’afficher. On se dirige tranquillement vers une manif K-Way…
Acte II : Hein quoi ? Qu’est-ce qui se passe ?
Jusqu’ici c’était tranquille. Arrivée au niveau du métro Belleville, ça se speede d’un coup sans qu’on comprenne vraiment pourquoi [1].
Certains camarades s’appliquent à défoncer une agence du Crédit Lyonnais.
Lafon, le super flic de la DCRI chargé de l’extrême gauche à Paris, cherche à s’interposer pour arrêter les vilains casseurs. L’imprudent trébuche. Non sans quelques dissensions dans le cortège, il se carapate en courant grâce à une exfiltration par le SO de la CNT.
Passé ce léger incident, on continue à descendre la rue du Faubourg du Temple. Une autre banque est éclatée. Puis c’est au tour de Monoprix de se faire complètement exploser la vitrine. A noter que celle-ci n’a résisté que 6 secondes. Pas très solide. Décidément malchanceuse, c’est encore une banque LCL qui se fait casser sa devanture. Métro Goncourt on voit pour la première fois des robocops, en l’occurrence des gardes mobiles, qui essuient quelques rares jets de bouteilles.
- Le monoprix après le passage de la manif
Acte III : 2e round, retour au calme forcé
Une personne de la CNT prend la parole pour expliquer que la manif ne « pourra pas continuer dans ce climat de violence extrême« . Elle est huée par une partie conséquente de la foule, et pas seulement ceux qui cassaient des trucs.
Pendant ce temps, les flics se positionnent en latéral, avec des tenues anti-émeutes. On sent qu’il y aura plus grand chose de possible.
On se ramène ensuite sur le boulevard Ferry où on s’aperçoit qu’il y a de plus en plus de flics, et notamment des civils qui sont massifs. On avance assez vite et on se retrouve sur le boulevard Richard Lenoir à 200 m de la place de la Bastille. On sent que les flics cherchent des gens pour pouvoir les serrer (sans doute les gens qui ont tapé leur collègue précédemment).
On tourne dans la rue du Chemin vert (trajet déposé à la préfecture) où on stationne pendant 20 minutes sous une pluie battante. On n’aurait jamais dû s’engager dans cette rue, idéale pour une nasse policière. Les flics en ligne forment une prison à ciel ouvert et commencent à faire sortir les gens au compte-goutte. Sauf qu’ils avaient repéré du monde à arrêter et les BACeux plongent sur eux et s’en saisissent.
S’en suit une grande mêlée ponctuée par un gazage. Le groupe est séparé en plusieurs morceaux et une grosse partie se retrouve sur le boulevard Beaumarchais tandis que le reste est encore dans la nasse. La même scène se reproduit plusieurs fois, jusqu’à ce qu’au final il n’y ait plus personne dans la nasse. Au passage les flics ont fait des arrestations. 4 à priori.
Nous sommes ensuite repoussés par les flics et leurs boucliers jusqu’à la place de la Bastille, désespérément vide pour un Premier Mai…
Notes
[1] Apparemment selon d’autres sources, le Franprix avant l’arrivée à Belleville avait déjà fait les frais d’une autoréduction puis d’une descente en règle de la vitrine.
LU SUR PARIS LUTTES INFO
SORTONS DE L’OMBRE
MAI 2014 AU RÉMOULEUR (BAGNOLET)
[Toulouse] Festival des 3 ans de la CREA
Shock! – N2K Maska – Cerveaux grenades @kb
UN FUSIL DANS LA MAIN ET UN BOUQUIN DANS L’AUTRE!
http://www.youtube.com/watch?v=78EkmdfWkRo
Emission du 26 Avril 2014 – Radio Vosstanie
312 minutes d’émission. ! (ouf…)
Pendant l’émission quelques morceaux de l’album SamplObsession
Chanson du CMDO
[Toulouse] « La police a été extrêmement violente pour casser la Crea. Ça fait plusieurs années qu’ils nous ont dans le viseur et là avec l’arrivée de Jean-Luc Moudenc, ils ont voulu marquer le coup »
Toulouse : un militant blessé par un tir de Flashball lors de l’évacuation d’un squat
Un jeune homme a déposé plainte jeudi 24 avril 2014 auprès du procureur de Toulouse après avoir été grièvement blessé par un tir policier le 21 avril à Toulouse, lors de l’évacuation de deux maisons squattées. Yann Zoldan, psychologue de 26 ans, souffre de multiples fractures à la joue droite, causées selon lui par l’impact d’un tir de LBD 40×46 (le Flashball nouvelle génération, plus puissant et plus précis).
Les forces de l’ordre étaient intervenues lundi 21 avril en fin d’après-midi pour déloger des familles de deux maisons récemment squattées, au 38, rue Louis-Plana, à Toulouse. Plusieurs militants de la Crea (campagne pour la requisition, l’entraide et l’autogestion), un collectif toulousain qui depuis trois ans « réquisitionne » des bâtiments vides pour y créer des « centres sociaux autogérés », étaient présents. « C’était des maisons inoccupées depuis des années et nous avons les preuves qu’on les occupait depuis plus de 48 heures (passé ce délai, la police ne peut normalement plus intervenir en flagrant délit et le propriétaire doit obtenir une décision de justice pour procéder à l’expulsion des squatteurs), dit Mathieu Rigouste, sociologue et militant qui a été interpellé au passage. Mais les policiers sont passés outre. Le nouveau maire, Jean-Luc Moudenc (UMP), s’est fait un devoir de réprimer la Crea. »
Selon les militants interrogés, à la vue des agents de la brigade anticriminalité (Bac) et des CRS venus en nombre, les occupants auraient préféré quitter les lieux eux-mêmes. « Il a fallu sortir les affaires, organiser des voitures, c’est alors qu’un camarade (Mathieu Rigouste) a été interpellé par la Bac, explique Louise, une étudiante de 26 ans. Plusieurs personnes se sont rapprochées pour savoir pourquoi ils l’interpellaient. Les policiers de la Bac ont sorti les matraques et un LBD. La violence a monté d’un coup. Ils ont lancé une grenade assourdissante à travers la rue. »
Vers 20 heures, intrigué par une première déflagration, Clément, un voisin de 26 ans, a assisté à la scène depuis son palier, au rez-de-chaussée du 30, rue Louis-Plana. « J’ai clairement entendu un CRS dire “Celui-là, attrapez-le”, ils ont couru vers un gars et là c’est parti en vrille avec des coups de matraque, des mecs qui se sont retrouvés au sol, puis j’ai entendu une nouvelle déflagration de Flashball », décrit le jeune homme, électricien et musicien. C’est à ce moment que Yann Zoldan, qui cherchait à fuir, aurait été touché. « Je m’étais réfugié derrière une poubelle, un policier en civil m’a dit “Sors et cours”, donc je suis sorti en levant les mains en l’air et en le regardant, affirme le jeune homme, militant du droit des animaux. Le policier a essayé de me donner un coup de matraque, j’ai reculé et là je me suis pris le tir. Je suis tombé sur les genoux, puis c’est devenu la confusion. » Selon lui, seul un policier de la Bac était armé d’un lanceur de balles de défense et l’arme était dotée d’un « viseur » (caractéristique des LBD 40×46). « Plusieurs militants lui avaient dit “Ne visez pas la tête”», se souvient Yann Zoldan.
Soutenu par ses amis, Yann Zoldan est mis à l’abri chez le voisin Clément, qui avait laissé sa porte ouverte, au cas où. « Il était conscient mais complètement sonné et pissait le sang, c’était impressionnant, décrit ce dernier. On lui a donné les premiers secours puis je l’ai emmené aux urgences de Purpan. » Diagnostic : une joue droite en miettes. Après scanner, le certificat du médecin des urgences daté du 21 avril dénombre pas moins de cinq fractures des os du visage : « Fracture mandibulaire droite, fracture du malaire, fracture du sinus maxillaire, facture du plancher de l’orbite, hémosinus du maxillaire droit. »
Des blessures « compatibles avec l’impact de la balle de Flashball », a précisé deux jours plus tard le médecin légal, qui a attribué une ITT de dix jours renouvelable. « Le médecin des urgences m’a dit que des morceaux d’os avaient explosé et que si j’avais été touché un peu plus haut, au niveau de la tempe où les os sont plus fins, ç’aurait été la mort à coup sûr », indique Yann Zoldan. Le jeune homme, doctorant en psychologie, devrait être opéré dès que sa joue aura dégonflé pour « mettre des plaques de métal ».
Son avocat, Me Julien Brel, a déposé plainte jeudi 24 avril devant le procureur de Toulouse pour violences avec arme par personne dépositaire de l’autorité publique, en demandant l’ouverture directe d’une information judiciaire. L’avocat connaît bien ces blessures. Il défend déjà Joan Celsis, un étudiant toulousain qui avait perdu un œil en mars 2009, après un tir de Flashball. L’affaire avait abouti à non-lieu, confirmé le 14 mars 2013 par la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Toulouse, faute d’identification du policier tireur.
Les quatre militants interrogés assurent qu’il n’y a eu aucune violence envers les forces de l’ordre le 21 avril 2014. « De ce que j’ai vu, les squatteurs n’étaient pas du tout dans une attitude agressive qui aurait justifié la réponse des policiers, ils étaient en train de partir petit à petit », indique Clément, le voisin. « La police a été extrêmement violente pour casser la Crea, estime de son côté Louise. Ça fait plusieurs années qu’ils nous ont dans le viseur et là avec l’arrivée de Jean-Luc Moudenc, ils ont voulu marquer le coup. » D’après la jeune femme, les policiers auraient saisi et donné des coups de pied dans l’appareil photo d’un militant, qui photographiait les interpellations et les « violences policières ».
Selon plusieurs témoignages, quatre personnes auraient été interpellées ce soir-là, dont Mathieu Rigouste, 33 ans. Chercheur en sciences sociales et militant, le jeune homme a été placé en garde à vue pour « violation de domicile » selon son avocat Me Julien Brel. « Puis ils lui ont rajouté refus de prélèvement d’ADN et ont prolongé sa garde à vue jusqu’à mercredi 11 heures, pour l’interroger sur des faits plus anciens », explique l’avocat. Près de 40 heures de garde à vue qui ont abouti, selon Me Julien Brel, à une simple « convocation à la maison de la justice et du droit pour un rappel à la loi »…
Auteur de plusieurs ouvrages consacrés aux quartiers populaires et à l’idéologie policière (L’Ennemi intérieur paru en 2009 ou encore La Domination policière parue en 2012), Mathieu Rigouste parle d’une « arrestation arbitraire ». « Comme d’habitude, les policiers ont désigné des chefs, ils essaient de fabriquer des responsables pour mieux réprimer, alors que la Crea est un mouvement de gens en galère sans chef », dit-il.
Leur presse (Louise Fessard, Mediapart, 25 avril 2014)
[Flics, Porcs, Assassins] Quand Manuel Valls muselle la critique de la police
Quand Manuel Valls muselle la critique de la police
On l’a vu dernièrement, le ministre de l’Intérieur a la censure facile. Mais s’il parade pour interdire un spectacle de Dieudonné, il reste plus discret sur les poursuites qu’il intente ou dont il menace ceux qui osent s’en prendre aux bavures de la police nationale.
Le 7 avril prochain aura lieu le procès d’Amal Bentounsi, attaquée par le ministre pour « diffamation envers une institution représentant l’autorité publique ». En cause : son site internet Urgence, notre police assassine qui répertorie les violences policières mortelles.
Valls en relais d’Hortefeux
Amal y dénonce régulièrement l’impunité judiciaire dont bénéficient certains auteurs de bavures, comme celle qui coûta la vie à son frère Amine le 21 avril 2012. Celui-ci fut abattu d’une balle dans le dos par un agent de la BAC à Noisy-le-Sec (Seine-Saint-Denis) alors qu’il fuyait un contrôle d’identité. Bénéficiaire d’une permission de sortie de prison, Amine Bentounsi n’avait toujours pas regagné la maison d’arrêt de Châteaudun (Eure-et-Loir). Plusieurs propos tenus à l’égard de policiers dans un vidéo-clip titré “Outrage et Rebellion”, valent à l’auteure du site les foudres du premier flic de France. Notamment en cause : « Vous voulez commettre des violences et crimes en toute impunité sans jamais être inquiété par la police ? Vous êtes violent, insultant, ne respectez pas le code de la déontologie ? (…) La police est le meilleur des métiers pour être au-dessus des lois. »
Amal n’est pas la seule à être dans le viseur de l’Intérieur. En novembre prochain, ce sera au tour du blog Le Jura Libertaire de comparaître pour « injure et diffamation publiques contre la police ». En juillet 2010, Brice Hortefeux annonce qu’il porte plainte contre ce site Internet et celui d’Indymédia Grenoble. Il reproche à ces médias alternatifs d’être « hostiles à la police ». Ceux-ci avaient dénoncé les exactions policières perpétrées dans le quartier populaire de Villeneuve lors des révoltes de juillet 2010. Révoltes elles-mêmes survenues à la suite de la mort de Karim Boudouda, abattu par des policiers de la BAC au mitan du mois. Trois ans d’enquête plus tard, le plaignant est toujours le ministre de l’Intérieur, mais il s’appelle Manuel Valls.
Dénoncer les dérives de l’institution policière
Dans un autre registre, le Réseau Résistons Ensemble contre les violences policières et sécuritaires subit lui aussi la pression. En décembre dernier, le collectif distribuait à Gennevilliers son 125e bulletin mensuel intitulé Crimes policiers, crimes racistes, trente ans après rien n’a changé. Quatre agents de la BAC embarquent alors les dangereux militants au poste de police et les placent en cellule sans autorisation de téléphoner. Une arrestation en représailles au contenu édité dans le bulletin, leur signalent les policiers avant de les menacer de poursuites judiciaires pour propos diffamatoires. Des empreintes digitales sont relevées et le matériel n’est pas restitué. Une intervention identique avait déjà eu lieu en avril 2013. Dans les mêmes conditions, pour les mêmes raisons. Deux événements tous deux restés sans suite. « S’agit-il d’une initiative locale du commissariat de Gennevilliers ? Il serait important de recenser, pour commencer, ce genre d’atteintes graves à la liberté de presse, d’opinion et d’expression », s’interroge le collectif dans un échange de mail sur un réseau militant.
Dénoncer les dérives de l’institution policière demeure une activité sensible. Elle n’est pourtant pas vraiment infondée. Contrairement à d’autres pays, aucun recensement officiel des bavures n’existe en France. On compte autour de dix morts par an en moyenne, liées à une action des forces de l’ordre. Et dans les faits, peu de d’agents de celles-ci sont, sinon emprisonnés, au moins jugés pour leurs actes mortels. Non-lieu, relaxe, acquittement, classement sans suite jalonnent cinquante ans de quasi impunité en la matière. Environ 5% des policiers et gendarmes impliqués dans des affaires judiciaires de ce type sont passés derrière les barreaux. Souvent au prix de la grande lenteur des procédures [Lire à ce propos sur le site Basta ! : « Homicides, accidents, « malaises », légitime défense : 50 ans de morts par la police » et « Bavures policières mortelles : trente ans de quasi impunité ? »]. Le policier ayant tué Amine Bentounsi, toujours en fonction, a pour sa part été mis en examen pour homicide volontaire. Ce qui est rare. Mais la tenue de son procès se fait attendre. L’instruction close en septembre dernier vient d’être relancée par une demande de contre-expertise balistique de la part de l’avocat du policier.
Le précédent de La Rumeur
Intimider, affaiblir moralement et financièrement ceux qui luttent auprès des familles de victimes de violences policières plutôt que de concourir à leur quête de vérité et de justice… Manuel Valls semble avoir choisi sa voie. Dans la droite ligne de ses prédécesseurs UMP. Pas sûr que cela serve ses intérêts.
Le rappeur Hamé du groupe La Rumeur nous le rappelle. Nicolas Sarkozy l’attaque en justice en 2002 en tant que ministre de l’Intérieur puis que président pour des propos tenus dans le fanzine qui accompagnait la parution du premier album du groupe. À savoir, « les rapports du ministère de l’Intérieur ne feront jamais état des centaines de nos frères abattus par les forces de police sans qu’aucun des assassins n’ait été inquiété ». Après huit ans d’acharnement judiciaire, la Cour de cassation relaxe finalement Hamé en 2010. Les magistrats ont estimé que si ses écrits « revêtaient un caractère injurieux, [ils] ne constituaient pas le délit de diffamation envers une administration publique ». Au delà de défendre la liberté d’expression, le rappeur s’est servi du passage devant le juge pour démontrer le fondement de ses dires en appelant à la barre historiens, sociologues, policiers, citoyens… L’affaire La Rumeur a-t-elle fait jurisprudence ?
En attendant, Amal Bentounsi invite toutes les familles de victimes de bavures à prendre la parole au palais de justice de Paris. « Nous demanderons à la justice qui sera là pour me juger, de prendre ses responsabilités et de condamner ces policiers qui commettent des meurtres en toute impunité », déclare-t-elle. Et faire de ce tribunal une tribune autour d’une question encore taboue. Serait-ce le but recherché par le ministère de l’Intérieur ?
Ludo Simbille, Regards.fr, 27 mars 2014
Les violences policières au cœur d’un procès
Les violences policières étaient aujourd’hui au cœur du procès de la sœur d’un homme tué par un policier en 2012, jugée par le tribunal correctionnel de Paris pour diffamation après une plainte du ministère de l’Intérieur.
Amal Bentounsi, sœur d’Amine Bentounsi, tué d’une balle dans le dos le 21 avril 2012 à Noisy-le-Sec (Seine-Saint-Denis), est poursuivie pour “diffamation publique envers une administration publique”. Elle avait déclaré dans une vidéo publiée sur son site : “Vous voulez commettre des violences, crimes, en toute impunité sans être inquiété ? La police recrute”. Fondatrice du collectif “Urgence notre police assassine”, elle avait été visée par une plainte signée par Manuel Valls, alors ministre de l’Intérieur, en janvier 2013.
Très émue, cette mère de famille a raconté que pour elle, “tout a basculé” à la mort de son petit frère. Cette commerçante s’est retrouvée alors au “bord de la route”, “victime collatérale” du drame. “Pour moi, ça a été trop fort, trop lourd. (…) Il fallait que je crie, il fallait que ça sorte. C’est pour ça que j’ai créé ce site et que par un soir dramatique, j’ai monté ce clip”, s’est-elle expliquée. Dans la salle d’audience, de nombreux amis et militants associatifs étaient venus la soutenir.
Tout en reconnaissant du “courage” au magistrat qui a mis en examen pour homicide volontaire le policier en cause, qui a argué de la légitime défense, Amal Bentounsi a regretté que ce dernier “continue à percevoir son salaire en attendant son procès et pour l’instant, il n’est pas en détention provisoire”. “Est-ce qu’un justiciable policier a plus de droits qu’un justiciable ouvrier ?” s’est-elle interrogée.
Quatre témoins ont décrit les violences policières qu’ils combattent et exprimé le sentiment d’impunité des policiers ressenti dans certains quartiers. “Amal est une victime. Nous sommes des victimes et nous sommes traités comme des agresseurs”, a déploré Farid El-Yamni, frère de Wissam El-Yamni, décédé à 30 ans, après avoir été interpellé dans des conditions controversées la nuit de la Saint-Sylvestre 2011 à Clermont-Ferrand. Deux policiers ont été mis en examen dans cette affaire.
“Il y a des gens qui ont le droit de critiquer la police. Amnesty international dit dans un rapport que la police est au-dessus des lois. J’ai moi-même écrit ces choses-là”, a témoigné Mathieu Rigouste, chercheur en sciences sociales.”Par contre, ce sont souvent le même genre de personnes qui sont attaquées”, a-t-il opposé, “il semblerait que le pouvoir n’ait pas intérêt à laisser ceux qui subissent la violence policière la dénoncer”.
“Je ne suis pas certaine” que le blog soit le “bon vecteur” pour la “thérapie personnelle” de la prévenue, ni pour faire “avancer son dossier” ou faire “avancer le débat citoyen”, a commenté la procureure Aurore Chauvelot. “Est-ce que pour autant les propos de Mme Bentounsi dépassent les limites admissibles de la liberté d’expression dans une société démocratique ? Je ne le crois pas”, a-t-elle poursuivi. L’avocat de Amal Bentounsi, Me Michel Konitz, a également demandé la relaxe, expliquant que les propos de sa cliente étaient un “cri de douleur”.
Le ministère de l’Intérieur n’était pas représenté. La décision sera rendue le 28 mai.
Leur presse (LeFigaro.fr avec l’Agence Faut Payer, 7 avril 2014)
Qu’est ce que « Jour de Colère? »
5 avril 2014 : manifestation contre les crimes policiers et les violences policières
30 ans après la marche pour l’égalité et contre le racisme, lancée pour répondre à la multiplication des crimes racistes et sécuritaires, il semble que rien n’a changé : la liste des victimes dans les commissariats, à bord de fourgons de police, morts suite à une intervention des forces de l’ordre, s’allonge indéfiniment. Ces dernières années, les morts au cours de courses-poursuite, par clé d’étranglement, par pliage ou encore les personnes mutilées par des tirs d’armes prétendument « non létales », se sont multipliées.
Les « bavures » policières n’existent pas. La police tue et violente depuis des décennies, dans des circonstances souvent similaires, et souvent les mêmes personnes : on est passé des ratonnades d’Algériens dans les bidonvilles de la région parisienne dans les années 1960 à la « neutralisation » de « suspects » dans les « quartiers sensibles » aujourd’hui. Et quand elle n’endeuille pas une famille, des amis, des quartiers entiers, la police laisse derrière elle des blessés de plus en plus nombreux.
Aux mobilisations des familles réclamant Vérité et Justice pour leurs proches morts aux mains de l’état ou mutilés par la police, la justice répond presque invariablement par des non-lieux ou des acquittements, dans les cas où une instruction a été ouverte. A l’inverse, quand des révoltes éclatent suite à un crime policier, la machine judiciaire se met en route immédiatement pour faire tomber des têtes et distribue de lourdes peines de prison. D’un côté les syndicats policiers et l’état cherchent à renforcer l’impunité policière, notamment par l’instauration d’une « présomption de légitime défense » équivalant à un véritable permis de tuer, une peine de mort qui ne dit pas son nom. De l’autre, on assiste à de véritables exécutions judiciaires, les atteintes à des policiers étant de plus en plus sévèrement punies, et la justice cherchant à tout prix à trouver des coupables.
Les familles et proches de victimes doivent le plus souvent attendre des années pour voir une instruction ouverte, quand un non-lieu ne vient pas tout bonnement clore des années de souffrance et d’attente. Quand l’instruction aboutit à une mise en examen des policiers, ceux-ci sont très rarement reconnus coupables. Et quand c’est le cas, ils sont condamnés à des peines de principe. « Que vaut la vie de Youssef ? » demandaient les proches de Youssef Khaïf, abattu d’une balle dans la nuque par un policier à Mantes-la-Jolie en 1991. à cette question, la Justice, qui acquitta son meurtrier dix ans plus tard, répond toujours de la même manière : la vie d’un Noir ou d’un Arabe vaut moins que la liberté d’un policier et que le sacro-saint maintien de l’ordre républicain, quand bien même ce dernier n’était pas menacé.
Depuis des années, les familles et les comités Vérité et Justice réclament une reconnaissance de ces crimes, une manière d’honorer leurs défunts, que les médias et la justice salissent souvent pour légitimer leur mise à mort. Elle réclament la fin des pratiques policières mortelles comme la clé d’étranglement, le pliage ou les courses-poursuite pour de simples infractions au code de la route. La fin aussi des pratiques de chasse de la police qui aboutissent à la multiplication des accidents mortels et des mutilations, notamment par l’usage intensif du flash-ball.
Au-delà des crimes eux-mêmes, c’est la recherche de vérité et le combat des familles, mais aussi de tous ceux qui dénoncent publiquement la violence de l’état et de sa police, qui sont de plus en plus réprimés. Lorsque la police ne tire pas pour tuer les indésirables, elle tire pour blesser ceux qui les soutiennent : flash-ball, LBD et grenades sont de plus en plus souvent utilisés, en banlieue comme lors de manifestations, pour faire taire ceux qui s’organisent.
Il n’est plus rare également de voir le Ministère de la Justice s’en prendre à ceux qui dénoncent ces violences sur internet, comme ça a été le cas pour le site Copwatch en 2012 ou pour Urgence Notre Police Assassine (site animé par Amal Bentounsi, dont le frère Amine a été tué d’une balle dans le dos en 2012) cette année, attaqués en justice pour diffamation et contraints de se justifier d’utiliser leur liberté la plus fondamentale, la liberté d’expression.
L’état, sa police et sa Justice, ont le monopole de la violence. Face à eux, nos forces sont éparses. C’est pourquoi il est plus que temps de s’organiser autour des familles et proches de victimes, pour trouver la manière d’unir nos forces dans un combat si inégal face à la police et la justice.
Rejoignez-nous dans cet effort pour obtenir la vérité et pour dénoncer la vraie nature de la police !
RDV le SAMEDI 05 AVRIL 2014 à 15H à la sortie du METRO ANVERS (PARIS)
P.-S.
En marge de cette manifestation, le collectif Urgence-Notre-Police-Assassine a lancé depuis début mars une campagne d’affichage : des autocollants sont mis à disposition dans villes de France pour dénoncer la police. Les participants sont invités à prendre des photos et à les faire parvenir au collectif UNPA pour faire entendre leur voix et rendre leur campagne plus visible : urgence-notre-police-assassine@live.fr
« Nous trouverons un chemin ou nous en ouvrirons un »
Hannibal