Extrême-droite: la terreur qui n’était pas terroriste.

A Paris, au début du mois de juin on a jugé des terroristes. Quelques jeunes hommes d’Alsace Lorraine qui ont décidé, en 2013, de partir combattre en Syrie. Où ils se sont retrouvés dans les rangs de Daech. Ces jeunes hommes ont fait la guerre, quelques mois. Ils sont revenus assez vite,  ont été arrêtés quelques semaines après leur retour et sont en prison depuis. Le procureur a réclamé la peine maximum pour «association de malfaiteurs en vue de la préparation d’actes de terrorisme».

En Ukraine, à peu près simultanément, Gregoire Moutau, un jeune homme de la même région que les précédents a été arrêté. Ce n’est pas un terroriste, du moins si l’on en croit la communication de l’Etat français qui a tenu à écarter publiquement cette qualification. Grégoire Moutau partait régulièrement en zone de guerre ukrainienne, il est d’extrême-droite, il a été pris à la frontière avec une centaine de kilos d’explosifs et des armes de guerre. Sur des enregistrements diffusés par les services de sécurité ukrainiens, on entend la voix présentée comme celle du jeune homme détailler des objectifs d’attentats.
Qu’est-ce qu’un terroriste ? Le débat serait long. Une chose est certaine : en France, de toute façon, un terroriste n’est pas un militant d’extrême-droite.
La sentence ne souffre quasiment aucune exception.
l’article en intégralité sur infos-antiraciste

L’état d’urgence annoncé par Hollande ça fait mal aux libertés…

L’état d’urgence a été décrété par Hollande suite aux attentats de Paris. De plus, les contrôles aux frontières seront rétablis jusqu’à nouvel ordre. Mais ça veut dire quoi au juste état d’urgence ? Il faut se questionner maintenant afin que les événements atroces ne laissent place à la peur et au pouvoirs aveugles et démesurés de l’État.

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« J’ai également demandé des renforts militaires. J’ai également convoqué le Conseil des ministres. Deux décisions seront prises : l’état d’urgence sera décrété, ce qui veut dire que plusieurs lieux seront fermés, la circulation sera interdite dans certains endroits. L’état d’urgence sera décidé sur l’ensemble du territoire.

François Hollande aux alentours de minuit le vendredi 13 Novembre 2015

C’est quoi l’état d’urgence ? C’est un texte régi par une loi voté le 3 avril 1955.

Depuis la Seconde Guerre mondiale il a été utilisé à plusieurs reprises :

  • Durant la guerre d’Algérie, mais uniquement sur le territoir colonisé (l’Algérie française), de 1955 à 1961 avec des durées indéterminées pour des durées allant jusqu’à 12 mois).
  • Dans les territoire occupés en Kanaky (Nouvelle-Calédonie) pendant près de 6 mois.
  • En 2005 pendant la vague d’émeutes qui toucha les cités françaises. C’était pour l’instant l’unique fois qu’il avait été utilisé en France métropolitaine.

C’est donc la première fois que l’état d’urgence est décrété sur l’ensemble du territoire français. En 2005 seuls certains départements étaient concernés par l’état d’urgence.

Quelles en seront les principales conséquences sur les libertés publiques ? Elles seront très importantes :

Une circulation amoindrie :

La déclaration de l’état d’urgence donne pouvoir au préfet dont le département se trouve en tout ou partie compris dans une circonscription prévue à l’article 2 :

1° D’interdire la circulation des personnes ou des véhicules dans les lieux et aux heures fixées par arrêté ;

2° D’instituer, par arrêté, des zones de protection ou de sécurité où le séjour des personnes est réglementé ;

3° D’interdire le séjour dans tout ou partie du département à toute personne cherchant à entraver, de quelque manière que ce soit, l’action des pouvoirs publics.

En gros, le préfet peut décider de boucler complétement un quartier. Il peut aussi faire des cas individuels. Ainsi il fait en sorte qu’une liste de personnes soient interdites d’une partie du territoire. Le tout en procédure hyper rapide. Tout pouvoir au préfet.

Des mises en liberté surveillées facilitées :

Le ministre de l’intérieur dans tous les cas et, en Algérie, le gouverneur général peuvent prononcer l’assignation à résidence dans une circonscription territoriale ou une localité déterminée de toute personne résidant dans la zone fixée par le décret visé à l’article 2 dont l’activité s’avère dangereuse pour la sécurité et l’ordre public des circonscriptions territoriales visées audit article.

L’assignation à résidence doit permettre à ceux qui en sont l’objet de résider dans une agglomération ou à proximité immédiate d’une agglomération.

En aucun cas, l’assignation à résidence ne pourra avoir pour effet la création de camps où seraient détenues les personnes visées à l’alinéa précédent.

L’autorité administrative devra prendre toutes dispositions pour assurer la subsistance des personnes astreintes à résidence ainsi que celle de leur famille


En gros chaque personne fichée à l’antiterrorisme pourra se faire coincer chez lui à partir de demain. Par chance (on est vraiment bien en France), il est précisé que nous ne pourrons pas être parqué dans des camps.
On notera le côté vague d’une telle appellation. Toute personne jugée par l’État (juge, préfet…) comme « dangereux » va pouvoir se retrouver sous séquestre.

Libertés publiques et politiques restreintes :

Le ministre de l’intérieur, pour l’ensemble du territoire où est institué l’état d’urgence, le gouvernement général pour l’Algérie et le préfet, dans le département, peuvent ordonner la fermeture provisoire des salles de spectacles, débits de boissons et lieux de réunion de toute nature dans les zones déterminées par le décret prévu à l’article 2.

Peuvent être également interdites, à titre général ou particulier, les réunions de nature à provoquer ou à entretenir le désordre.

Donc. En gros, vous aurez l’interdiction de vous plaindre de cette situation. Toute personne qui contestera l’état existant sera suceptible d’être réprimée. Il est donc possible que les futures manifs de la COP soit interdites.

Censure et perquisitions à domiciles facilitées

Le décret déclarant ou la loi prorogeant l’état d’urgence peuvent, par une disposition expresse :

1° Conférer aux autorités administratives visées à l’article 8 le pouvoir d’ordonner des perquisitions à domicile de jour et de nuit ;

2° Habiliter les mêmes autorités à prendre toute mesure pour assurer le contrôle de la presse et des publications de toute nature ainsi que celui des émissions radiophoniques, des projections cinématographiques et des représentations théâtrales.

Les dispositions du paragraphe 1° du présent article ne sont applicables que dans les zones fixées par le décret prévu à l’article 2 ci-dessus.

Tout est dit. La presse peut être interdite. Les gens peuvent se faire perquisitionner selon le bon vouloir des autorités policières…

Vous n’aurez pas le droit de ne pas être d’accord

Les infractions aux dispositions des articles 5, 6, 8, 9 et 11 (2°) seront punies d’un emprisonnement de huit jours à deux mois et d’une amende de 11 euros à 3 750 euros ou de l’une de ces deux peines seulement. L’exécution d’office, par l’autorité administrative, des mesures prescrites peut être assurée nonobstant l’existence de ces dispositions pénales.

Les peines de prisons peuvent pleuvoir. Enfin peine… on est pas sûr qu’il y ait réellement un jugement… Visiblement il s’agit de peines sortant de tout contexte pénale.

Donc en gros on est face au pire du pire de toutes les formes d’État. Les flics ont des droits quasi illimités, ils seront sur les nerfs. Faites gaffe à vous.

lu sur PARIS LUTTES INFO

Nous sommes tous des hypocrites Bienvenue dans un monde de plomb

Nous sommes tous des hypocrites. C’est peut-être ça, ce que veut dire « Je suis Charlie ». Ça veut dire : nous sommes tous des hypocrites. Nous avons trouvé un événement qui nous permet d’expier plus de quarante ans d’écrasement politique, social, affectif, intellectuel des minorités pauvres d’origine étrangère, habitant en banlieue.

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Née en 1960, Nathalie Saint-Cricq est la fille de Jacques Saint-Cricq, président du conseil de surveillance deLa Nouvelle République du Centre-Ouest, la petite-fille de Jean Meunier, fondateur du même journal et homme politique français, et l’épouse de Patrice Duhamel, ex-directeur général de France Télévisions et frère d’Alain Duhamel, chroniqueur politique vedette de France Télévision et de Libération, Les Dernières Nouvelles d’Alsace, Nice-Matin et Le Point. Fin juin 2012, elle succède, au poste de responsable du service politique de France 24, à Fabien Namias, fils de Robert Namias, ex-directeur de l’information de TF1. | VOIR LA VIDÉO

Nous sommes des hypocrites parce que nous prétendons que les terroristes se sont attaqués à la liberté d’expression, en tirant à la kalachnikov sur l’équipe de Charlie Hebdo, alors qu’en réalité, ils se sont attaqués à des bourgeois donneurs de leçon pleins de bonne conscience, c’est-à-dire des hypocrites, c’est-à-dire nous. Et à chaque fois qu’une explosion terroriste aura lieu, quand bien même la victime serait votre mari, votre épouse, votre fils, votre mère, et quelque soit le degré de votre chagrin et de votre révolte, pensez que ces attentats ne sont pas aveugles. La personne qui est visée, pas de doute, c’est bien nous. C’est-à-dire le type qui a cautionné la merde dans laquelle on tient une immense partie du globe depuis quarante ans. Et qui continue à la cautionner. Le diable rit de nous voir déplorer les phénomènes dont nous avons produits les causes.

À partir du moment où nous avons cru héroïque de cautionner les caricatures de Mahomet, nous avons signé notre arrêt de mort. Nous avons refusé d’admettre qu’en se foutant de la gueule du prophète, on humiliait les mecs d’ici qui y croyaient – c’est-à-dire essentiellement des pauvres, issus de l’immigration, sans débouchés, habitant dans des taudis de misère. Ce n’était pas leur croyance qu’il fallait attaquer, mais leurs conditions de vie. À partir de ce moment-là, seulement, nous aurions pu être, sinon crédibles, du moins audibles.

Pendant des années, nous avons, d’un côté, tenus la population maghrébine issue de l’immigration dans la misère crasse, pendant que, de l’autre, avec l’excuse d’exporter la démocratie, nous avons attaqué l’Irak, la Libye, la Syrie dans l’espoir de récupérer leurs richesses, permettant à des bandes organisées d’y prospérer, de créer ces groupes armés dans le style de Al Quaïda ou de Daesch, et, in fine, de financer les exécutions terroristes que nous déplorons aujourd’hui. Et au milieu de ça, pour se détendre, qu’est-ce qu’on faisait ? On se foutait de la gueule de Mahomet.

Il n’y avait pas besoin d’être bien malin pour se douter que, plus on allait continuer dans cette voie, plus on risquait de se faire tuer par un ou deux mecs qui s’organiseraient. Sur les millions qui, à tort ou à raison, se sentaient visés, il y en aurait forcément un ou deux qui craqueraient. Ils ont craqué. Ils sont allés « venger le prophète ». Mais en réalité, en « vengeant le prophète », ils nous ont surtout fait savoir que le monde qu’on leur proposait leur semblait bien pourri.

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Presse porte-clefs (Quand Amedy Coulibaly dénonçait les conditions de détention à Fleury-Mérogis, Emeline Cazi & Luc Bronner, LeMonde.fr, 12 janvier 2015) | VOIR LA VIDÉO

Nous ne sommes pas tués par des vieux, des chefs, des gouvernements ou des États. Nous sommes tués par nos enfants. Nous sommes tués par la dernière génération d’enfants que produit le capitalisme occidental. Et certains de ces enfants ne se contentent pas, comme ceux des générations précédentes, de choisir entre nettoyer nos chiottes ou dealer notre coke. Certains de ces enfants ont décidé de nous rayer de la carte, nous : les connards qui chient à la gueule de leur pauvreté et de leurs croyances.

Nous sommes morts, mais ce n’est rien par rapport à ceux qui viennent. C’est pour ceux qui viennent qu’il faut être tristes, surtout. Eux, nous les avons mis dans la prison du Temps : une époque qui sera de plus en plus étroitement surveillée et attaquée, un monde qui se partagera, comme l’Amérique de Bush, et pire que l’Amérique de Bush, entre terrorisme et opérations de police, entre des gosses qui se font tuer, et des flics qui déboulent après pour regarder le résultat. Alors oui, nous sommes tous Charlie, c’est-à-dire les victimes d’un storytelling dégueulasse, destiné à diviser les pauvres entre eux sous l’œil des ordures qui nous gouvernent. Nous sommes tous des somnambules dans le cauchemar néo-conservateur destiné à préserver les privilèges des plus riches et accroître la misère et la domesticité des pauvres. Nous sommes tous Charlie, c’est-à-dire les auteurs de cette parade sordide. Bienvenue dans un monde de plomb.

Pacôme Thiellement, Les mots sont importants, 13 janvier 2015