Le végétarisme vu par Marianne
Lundi, avant de prendre le train, on zonait dans la gare comme des moules quand soudain, Monsieur chéri me pointe du doigt une couverture affichée en vitrine du Relay. Le magazine Marianne titre, entre autres articles sur les arabes totalitaires (pas lu, mais pas envie de lire) : « Une nouvelle famille idéologique : les végétariens ».
Je lui ai volé 3 €, à Monsieur, pour pouvoir m’acheter la feuille de chou (car c’en est une) et lire ce qui se disait sur moi.
Oui parce que j’ai peut-être oublié de te le dire, à toi fan de mes aventures webiennes, mais voilà, depuis avril environ, j’ai décidé de devenir végétarienne. Je suis encore en transition, il m’arrive encore parfois de saliver devant un petit-four aux saucisses, et même de craquer… mais je suis résolue et depuis avril, nous n’avons pas acheté de viande. On en a profité pour arrêter également le lait de vache, car c’est caca, mais on a du mal avec le fromage, car c’est délicieux. Enfin bref, voilà donc trois mois environ que je change peu à peu mon alimentation, avec un Monsieur adorable qui me suit et que je respecte dans son cheminement, j’essaye de faire mes pâtisseries sans beurre, sans œuf, je demande à la boulangère si sa quiche est végétarienne ou pas (ce qui m’a fait goûter une quiche tomate-asperge délicieuse, du coup, en lieu et place de la provençale omnivore)… j’en suis au tout début, mais grâce à des connaissances et des amis végéta*iens aussi, je sais que je suis sur la bonne route et je ne regrette jamais.
En gros, pour comprendre comment je fonctionne, sache que je n’ai jamais aimé la viande, sanguinolente dans l’assiette, avec nerfs, bouts de gras et os apparents. (et je n’ai jamais aimé le poisson non plus) Les seuls trucs que j’acceptais d’avaler, c’était la viande transformée et donc méconnaissable : les steaks hachés, les saucisses knacki, les lardons… mais tout ce qui s’approchait un d’un peu trop près d’un morceau de chair animale, c’était niet. J’ai très tôt vu dans une entrecôte un morceau de cadavre. Donc maintenant, ben je ne me force tout bonnement plus à manger des beefsteaks ou des tournedos, et quand par hasard j’ai envie de poulet ou de lardons, je pense à l’animal mort avant. Et ça passe. Tout simplement.
Voilà pour mon parcours. Ce billet n’a pas pour vocation de convertir, je ne fais pas du prosélytisme. Je suis sûre de moi, de ce que je fais, et de pourquoi je le fais : je n’ai pas besoin de me justifier, ni d’entrer dans un débat. Je vais critiquer en long en large et en travers cet article de Marianne, parce qu’il dit un nombre insurmontable de bêtises en seulement 6 pages, et parce que j’en ai assez que les végétariens soient considérés comme des rabat-joie grisâtres et chiants. Sache, lecteur, que tous ceux que je connais sont adorables, heureux de vivre, bien dans leurs baskets… et ce, parfois, depuis qu’ils sont végétariens. Comme quoi…
Je parlerai de « viande », mais cela inclut aussi pour moi le poisson, c’est plus simple que « chair animale » et moins long que « viande et poisson ».
« Toujours ultraminoritaires, les végétariens de France »…
Oui, les végétariens sont minoritaires en France… mais refuser de manger de la viande, ce n’est pas nouveau. Dans un pays où la barbaque est une véritable culture, où les chasseurs représentent 3% de la population (à peu près la même proportion que les végés, pour info), mais où le lobby chasseur a un vrai poids sur la politique, dans un pays où un plat ne se conçoit pas sans une pièce de boucher, évidemment que le végétarisme est minoritaire. Mais à l’échelle mondiale, il y a bien plus de végétariens (ou du moins de gens qui ne mangent presque pas de viande) que de gens qui suivent le modèle occidental… Il n’y a qu’à voir les Indiens : 40% d’entre eux sont hindous, et les hindous ne mangent pas de viande, pour une question de religion. Les indiens sont plus d’un milliard. Il y a près de 500 millions de végétariens ne serait-ce qu’en Inde. Alors qu’on ne vienne pas me dire qu’être végétarien, c’est être marginal.
Il faut aussi arrêter de dire que c’est « une réflexion balbutiante ».
Des végétariens, il y en a depuis la nuit des temps. Plutarque, Socrate, Pythagore… De Vinci, Lamartine… à travers les âges, des hommes ont regardé la vérité en face :
« Jamais je ne consentirais à sacrifier au corps humain la vie d’un agneau. J’estime que, moins une créature peut se défendre, plus elle a droit à la protection de l’homme contre la cruauté humaine. », disait Gandhi.
« Ce sera un grand progrès dans l’évolution de la race humaine quand nous mangerons des fruits et que les carnivores disparaîtront de la Terre. Tout sera faisable sur cette Terre à partir du moment où nous viendrons à bout des repas de viande et des guerres. », a dit George Sand.
On peut être végétarien pour des tonnes de raisons différentes : par goût (comme moi), pour être en meilleure santé, pour préserver la planète, par égard pour les animaux, pour perdre du poids… toutes ces raisons finissent à un moment par se télescoper, parce que devenir végé, c’est ouvrir une autre fenêtre de sensibilité : j’ai commencé à m’y intéresser parce que je n’aimais pas la viande. Puis je me suis dit que de toute façon, vu le taux de cholestérol, les soucis d’ostéoporose, les cancers qui explosent depuis la « démocratisation » de la viande, je n’avais qu’à y gagner, pour moi. Très égoïste, au départ, non ? Et maintenant, je pense à la couche d’ozone, au réchauffement climatique, tout ça, c’est en grande majorité dû aux élevages intensifs destinés à la consommation de chair animale. Et puis encore après, j’ai pensé aux animaux.
Je ne suis pas une fervente amoureuse des animaux.
Ils finissent tous par me soûler un jour ou l’autre.
Mais je ne suis pas une fervente amoureuse des hommes non plus, idem : la race humaine et sa bêtise me gave. Est-ce que pour autant je m’autorise à tuer des hommes ? Non. Dois-je donc m’autoriser à tuer des animaux ? Non plus. Ce fut mon raisonnement.
Tout ça pour dire que je ne pense pas qu’un végétarien décide de le devenir parce que c’est une « mode », une « vogue ». Ou alors, il ne le restera pas, et on pourra dire alors qu’il n’a jamais été végétarien. Comme pour bien d’autres choses (je pense notamment à l’allaitement dit « long » ou « prolongé », ou l’éducation bienveillante), devenir végé, c’est un choix fait en conscience, avec information et renseignements derrière. Ce n’est pas une lubie d’adolescente écervelée.
Toujours ultraminoritaires donc, les végétariens « se persuadent qu’ils forment l’avant-garde d’une société » omnivore. Je vais être super pointilleuse sur la sémantique de cet article parce que l’auteur, à défaut d’être un bon journaliste, c’est-à-dire un minimum objectif et pas complètement biaisé, est plutôt doué avec les mots. Comme si c’était ridicule, et sans fondement. La suite du paragraphe (ce n’est que le premier hein) :
« Il faut les voir, dans leur fief du Marais, s’enivrer d’une soupe de panais, qu’il savent distinguer du persil tubéreux, s’encanailler d’un burger lentilles-épeautre et piocher dans un cheese-cake au lait d’amande avec une fourchette en amidon biodégradable. Et dans le regard, une étincelle de supériorité morale. »
What the effing fuck?
Mais quel genre de végétariens tu fréquentes, Daniel Bernard ? Quel genre de personnage es-tu pour généraliser et caricaturer de la sorte ? Je ne sais même pas ce qu’est une fourchette en amidon biodégradable. (ah si, maintenant je sais)
« Le prix des mets est généralement inversement proportionnel à la taille de l’assiette, mais cela soulage la conscience autant que le porte-monnaie. »
C’est rigolo, qu’on tourne en ridicule un restaurant apparemment gastronomique mais surtout végétarien, quand les mêmes assiettes peu remplies sont glorifiées et recherchées, pourvu qu’elles contiennent du carré d’agneau ou de la saint-jacques. C’est inadmissible, qu’on assimile la conscience végétarienne à une affaire de gros sous, je paye donc je suis tranquille. Si c’était ça, je ne serais pas du tout tranquille puisque depuis avril, je fais économie sur économie.
Sache également, lecteur ignorant, que le végétarisme, c’est « privation, abstinence et substitution ».Quid alors de mes burgers végétariens totalement décadents ? Quid de mes poêlées de légumes avec mon riz à l’indienne digne d’un restaurant ? Et de ma pâte à crêpe végétalienne ? Je ne me prive jamais. Je ne m’abstiens jamais. Je ne substitue jamais.
D’ailleurs il faudrait arrêter de taxer les végés de bouffeurs de soja, ou de « phalanges du tofu » ( ??) à tout bout de champs… le soja, le tofu, c’est utile, mais c’est pas non plus la panacée, c’est pas super goûteux, alors ça fait très bien substitut de viande hachée dans une bolognese, mais jamais de la vie j’en fais mon aliment principal. Et qui dit « plus de viande » ne dit pas forcément « plein de substituts pour survivre sinon ouhlala », ce qui voudrait dire qu’on ne peut pas vivre sans viande ou sans simili-carnés, ce qui est faux. Je mange (nous mangeons) essentiellement des légumes, des lentilles, des haricots secs ou des pois, et on s’en sort très bien, merci.
« Egoïste ou ignorant, le carnivore perce la couche d’ozone, abat la forêt amazonienne, empoisonne les eaux et rivières de Bretagne. » Ben oui, désolée mon Daniel, mais c’est le cas. Tout ce que tu cites, là, c’est vrai. Manger de la viande, c’est faire marcher l’industrie de l’élevage intensif, et oui, ça a des conséquences catastrophiques sur l’écosystème. Après, que tu sois égoïste ou ignorant, c’est ton problème. Mais ne fais pas comme si c’était faux, s’il te plaît. Quant à « l’injonction [qui] surgit sur un mode culpabilisateur », arrêtons d’amalgamer. Entre le mode informatif et le mode accusatif, il y a un monde. Il existe des végétariens culpabilisateurs. Tout comme il existe des parents culpabilisateurs, des allaitantes culpabilisatrices, des sportifs culpabilisateurs, des non-fumeurs culpabilisateurs, des gens culpabilisateurs en général. Mais la plupart sont surtout informatifs : soucieux de voir le monde changer, et dans le bon sens s’il te plaît, les végétariens (et j’en suis), informent : on leur pose des questions, et ils répondent.
En disant la vérité.
Maintenant, si la vérité te dérange, c’est sur toi qu’il faut te pencher, pas sur l’information reçue.
Quand j’ai été dérangée par ma belle-sœur, qui me parlait de la souffrance des canards et des oies à foie gras (j’adore le foie gras), je ne me suis pas dit, « quelle rabat-joie, elle dit n’importe quoi cette connasse ». Je me suis dit : « quelle rabat-joie… (oui, je l’avoue, j’aime trop le foie gras) mais pourquoi dit-elle ça ? », et je suis allée voir de quoi il retournait. (j’ai mis un peu de temps, mais je l’ai fait) Et effectivement, la souffrance des canards et des oies à foie gras est innommable, et c’est pas pour rien que dans beaucoup de pays, la production de foie gras est interdite car considérée comme un acte de barbarisme. Oui, quand même.
Donc j’ai arrêté de manger du foie gras.
Je ne suis pas allée la pourrir parce qu’elle me dérangeait, je me suis demandé pourquoi j’étais dérangée. Et ça m’a fait changer, évoluer.
« Quel point commun entre un écolo mondain portant une écharpe de coton Agnès b. et un adepte austère du régime macrobiotique portant une écharpe de coton, dénichée chez Altermundi ? »
… je reste sans voix, mais attends ça continue :
« Ils consultent les mêmes sites sur la Toile, errent dans les mêmes supérettes bio et ressentent la même perplexité au moment de choisir entre tofu soyeux, tofu fumé, tofu poilu ou tofu ferme. »
Alors déjà, un adepte du tofu sait que chaque tofu a son utilité, donc il n’est pas perplexe devant le choix des différentes sortes de tofu et sait choisir rapidement en fonction de ce qu’il souhaite cuisiner. Déjà. Mais ensuite, pardon mais pourquoi ?!
Quel rapport, quel p*tain de rapport entre le végétarisme et les personnages apparemment détestables que tu nous peins, Daniel ? Pourquoi un végé devrait-il absolument être arrogant, bobo, pète-sec, bref : imbuvable ?! Tu es frustré de l’assiette ou quoi ? Tu as essayé d’allonger une végane (elle étaitsexy) et elle t’a répondu « non, tu manges de la viande, sale sale » ? C’est quoi ton problème ?
Encore deux versions du végétarien : « Moine bouddhiste aux yeux creusés, fashionista filiforme à l’affût du dernier régime New Age, même combat ! »
Et toi, c’est quoi ton combat ?
Je reste sans voix devant des portraits aussi grossiers et aussi éloignés de la réalité, vraiment. Il n’existe donc pas, aux yeux de Daniel Bernard, de végétariens normaux. Qui s’habillent en jean et en T-shirt, qui aiment traîner en jogging devant la télé le week-end, qui cuisinent normalement (la macrobiotique pardon mais c’est pas tout le monde qui kiffe hein) et SURTOUT, qui sont agréables à vivre.
Bien.
Je ne dois connaître que des faux végétariens alors.
Crotte.
« Tournés vers leur tube digestif » (dixit un mec qui va critiquer le tube digestif des autres, c’est gonflé quand même) « les végétariens français n’ont pas l’âme révolutionnaire. Au contraire, pointe encore souvent dans leur propos une fierté de nager à contre-courant, qui disparaîtrait si par extraordinaire, leur pratique faisait école. »
Mais va bien gentiment te faire cuire un œuf de bœuf, Daniel !
Je vois toutes mes copinautes véganes militantes pour la cause animale se lever d’un bond et aller préparer une manifestation, et je vois toutes mes connaissances végétariennes qui, comme moi, pensent que rien que le fait d’être végétarien, c’est un acte militant et résolument révolutionnaire, se taper la tête contre un mur.
Nous sommes donc, mes amis, une grosse peuplade d’égoïstes m’as-tu-vu dont le seul intérêt (ou pas loin), est de se pavaner en disant « moi je suis végé et pas toi, nana nana nèreuh ! », et même qu’on serait prêt à pleurer s’il y en avait plus (+) autour de nous, parce qu’on ne serait plus les seuls, on ne serait plus « spéciaux ».
Et de rajouter une citation bien convenable : « on est tous le narcissique de quelqu’un. » Laisse-moi vomir je reviens.
C’est exactement le contraire, espèce de niouk. Sinon on ne tenterait pas de convaincre le monde entier, on ne danserait pas la danse de la joie à chaque fois qu’une nouvelle recrue rejoint nos rangs, et on ne serait pas aussi déçus quand notre entourage montre de l’intolérance envers nos convictions. Mais Daniel est trop cohérent, du coup après il demande « Être ou ne pas être prosélyte ? ».
Et il s’emploie à lister les préoccupations « communes » des végétariens : « Les hypocondriaques prônant l’ascétisme prolongent leur réflexion et s’inquiètent de la survie de l’espèce humaine. Les bobos urbains […] s’enquièrent de la fordisation des élevages et de la prolétarisation des éleveurs ».
Quid (j’adore dire quid) là encore des animaux ? C’est quand même la préoccupation number ouane des végétariens occidentaux, à la base, en fait. Mais non, notre brillant journaliste est tropanthropocentré pour y penser, pardon.
Entre deux, on .a droit à un super encart :
« Le végétarisme est-il un stalinisme ? »
Je t’autorise à tenter de t’ouvrir les veines avec un poireau, ami lecteur. « [Les végétariens] ont […] un cerveau pour (re)penser la planète. Hélas, comme les marxistes, ils croient savoir ce qui est bon pour l’humanité. » Merci pour le génial amalgame marxisme-stalinisme, déjà, et merci pour ce « Hélas » qui me donne envie de tuer des chatons (le comble !), merci, vraiment. Nous sommes, nous, végés,minoritaires, complotistes (on confond science et lobbie ! t’imagines la loose ?), castastrophistes et messianiques.
Rien que ça.
Heureusement, Aymeric Caron est là ! Auteur de No Steak, le chroniqueur rencontre apparemment un succès fou avec son livre. (j’ai dû faire 3 librairies pour dénicher ce qui était le dernier exemplaire, à offrir à ma meilleure amie… du jamais vu) Selon Daniel Bernard, Aymeric Caron pourrait être le porte-parole d’une mouvance (la mouvance végétarienne ? mais laisse-moi rire), parce qu’il a une « belle gueule, vue à la télé ».
Rien à voir avec le fait que son discours est accessible, cohérent et bien pensé. Non. Il est bégé, donc tout va bien. Merci pour cette analyse d’une profondeur abyssale. « Trop cool, jamais ce mec ne dit explicitement : N’en mangez plus ! » – eh non, mais si tu avais lu le livre, journaleux moisi, tu saurais que ce qu’il dit est encore plus dingue… il dit quand même : « Que vous le vouliez ou non, vous n’en mangerez plus ! », ce qui selon moi est bien plus choc, voire choquant.
Mais bon, je doute que Dany sache de quoi parle No Steak, ou alors il a une manière bien à lui de le montrer. (Je l’appelle Dany car on n’est plus à une méprise près) D’ailleurs, il le qualifie de « terrine roborative d’arguments disparates », ce qui est tout à fait approprié à un livre divisé en 8 chapitres on ne peut plus clairs. Je n’appelle pas ça « disparate ». On verra plus tard que le sens du mot « roboratif » n’est pas non plus forcément universel.
Entre deux, un petit encart qui dit sobrement, mais en très très gros : « Il s’agit non pas de supprimer la viande, mais de lui rendre la place qu’elle occupait dans la nourriture traditionnelle […] : celle d’un condiment. » (Alain Lipietz, Green Deal), comme pour bien souligner que l’idée d’un végétarisme pur et simple est une illusion, et que c’est bien plus raisonnable de manger de la viande en petites quantités. Pauvres fous que nous sommes.
« Honte au ringard qui n’a pas son ami végétarien ! » On entendait les mêmes âneries il y a quelques années à propos des homosexuels, rappelez-vous : c’était in d’avoir un meilleur ami gay. Le même principe s’applique ici, et d’une manière générale tout l’article est teinté de ce qui s’appelle la végéphobie. Eh oui, brave gens, on peut recevoir tout autant de haine, de moquerie, et de ridicule, en décidant de supprimer la viande de notre régime alimentaire, qu’en étant gay ou noir.
D’ailleurs, Ellen DeGeneres, qui « cumule » l’homosexualité au veganisme, l’a dit elle-même : c’est parfois plus difficile d’être végane que d’être lesbienne… voilà où on en est aujourd’hui.
L’article se finit sur une confusion à n’y rien comprendre, à base de ouiii, en devenant végé, on va « endiguer le péril asiatique », quel est-il et pourquoi, je n’en sais rien, mais en tout cas « pratiquement, certains consommateurs désargentés y trouvent l’habillage conceptuel qui les console de devoir se rabattre sur des aliments moins onéreux que la viande ». Sûr que c’est la motivation principale pour se proclamer « végétarien », évidemment.
« La liberté apparemment souveraine du végétarien apparaît comme l’acquiescement à un choix hautement contraint. »
Et là, Monsieur mon amour : « Ah ouais, tiens, je me sens vachement contraint, connard. » Dans mes bras.
Le végétarien ne le devient pas non plus dans l’espoir qu’un jour les pauvres mangent autre chose que du minerai de bœuf, et que l’entrecôte se démocratise, Dany. Je t’assure. Le végétarien le devient dans l’espoir qu’un jour le monde entier comprendra que se sustenter dans le meurtre et le sang, c’est contre-nature. C’est tout.
A côté de ça, il y 4 portraits de « vrais » végétariens rencontrés sur le terrain : une blogueuse (Smooth), un éditeur, qui a rencontré la très cool Mlle Pigut (le veinard), et qui a fait traduire deux bouquins en relation avec le péril viandesque, mais ce sont des « pavés roboratifs, qui posés sur l’étagère, culpabilisent tels un crucifix au dessus du lit ». Bien bien. On trouve ensuite un restaurateur, et enfin, pour bien finir, l’illuminée de la bande, naturopathe, qui fait payer des repas 60 € pour trouver un sens à votre vie, totalement décrédibilisée et décrédibilisante. Enfin, ce n’est pas ce que moi, j’en pense, mais c’est ainsi que nous le dépeint Dany, tel un La Bruyère fané. (notez le retour du mot « roboratif », je vois toujours pas ce qu’il vient faire là)
Merci, Marianne, merci.
Merci de m’avoir donné une occasion de m’exprimer sur le végétarisme, merci d’être super cohérents en taxant les végétariens de complotistes qui confondent science et lobbies sur une page, et en tempêtant contre ces mêmes lobbies sur la page suivante… (« Quand les politiques se penchent sur nos assiettes », pp 32-33)
Merci de donner une si belle image de la grande famille des végétariens. Merci de prouver que franchement, 3€ pour un tel torchon, j’aurais dû m’en passer.
Je finirai sur cette citation de Plutarque :
« Si tu veux t’obstiner à soutenir que la nature t’a fait pour manger telle viande, tue-la donc toi-même le premier, je dis toi-même, sans user de couperet ni de couteau ni de cognée, mais comme font les loups, les ours et les lions qui, à mesure qu’ils mangent, tuent la bête aussi toi, tue-moi un boeuf à force de le mordre à belles dents, ou de la bouche un sanglier, déchire-moi un agneau ou un lièvre à belles griffes, et mange-le encore tout vif, ainsi que font ces bêtes -là. »
Et pour tous ceux que le végétarisme intéresse, je recommande chaudement la lecture de No Steak, d’Aymeric Caron, donc, ou bien le groupe Facebook « Happy veggies », duquel je fais partie et qui metune grosse claque aux préjugés sur les végétariens, ces bobos arrogants et moralisateurs.
(Le Nouveau Marianne n°845 du 29 juin 2013, pp 26-31,
disponible en lecture ici, avec mes annotations de folle furieuse qui prépare ses articles)
crédit photo : © Insolente veggie, © Payette Cuisine (un énorme merci à elle)
Si on ne veut pas « mourir à trente ans »…
Un article du site de la commission antifasciste du NPA (et oui…), qui revient sur la spectaculaire manifestation antifasciste du 21 juin 1973 qui a débouché sur une centaine de flics blessés, un meeting fasciste assiégé, puis la dissolution de la Ligue Communiste et d’Ordre Nouveau. Parce qu’à l’époque, ils savaient y faire! Cet évènement majeur des années 70 avait déjà été évoqué ici; un récit « de l’intérieur » est donc toujours intéressant pour compléter. Et puis, si ça peut faire réfléchir les modérés…
Raymond Marcellin, le ministre de l’intérieur, dit Raymond la matraque était à l’offensive contre tout le mouvement social issu de mai 1968. Répression tout azimuth, lois anti casseurs, lois anti immigrés, il mettait en place un dispositif juridique répressif pour contenir les mobilisations. Et il encourageait sans vergogne les forces d’extrêmes droites, le GUD, Ordre Nouveau. En 68, le pouvoir avait eu une grande peur , il cognait pour se prémunir d’une nouvelle irruption de la jeunesse, de la classe ouvrière.
Il s’était déjà tenu un meeting de l’extrême droite à la porte de Versailles en 1971 qui avait donné lieu à une contre manifestation spectaculaire. La police avait déjà protégé le meeting qui, sans cela, n’aurait pu se tenir.
L’annonce de ce meeting de l’extrême droite, à la Mutualité, en plein Paris, en plein quartier latin, « contre l’immigration sauvage », a été perçu largement comme insupportable et la décision de la contre manifestation a été vite prise.
Nous avions amené le matériel sur les lieux de la manifestation dans la semaine qui a précédé. Des caisses de chantier avaient été confectionnées, en bois, peintes en gris, 1,5×0,5×0,5 m, avec des logos d’entreprises du bâtiment. Remplies de barres de fer et de cocks, cadenassées, elles ont été déposées aux carrefours de regroupement de la manifestation, qui étaient entre les Gobelins et Censier-Daubenton. La livraison en camionnette de location, s’est faite dans les jours précédents (3 ou 4 jours), en milieu de journée. Nous étions en tenue de travail. Les groupes de service d’ordre sont donc venus les mains vides sur place, avec seulement les casques. Pour l’anecdote une caisse n’a pas été utilisée lors du regroupement (je ne me souviens plus pourquoi). Nous ne l’avons jamais récupérée mais on l’a surveillée pendant un ou deux mois ensuite jusqu’à ce qu’elle disparaisse…
Tant qu’il le faudra! – Suite en lien
[Égypte] L’armée n’a jamais quitté le pouvoir et les Frères ont collaboré avec l’armée, qui aujourd’hui les rappelle à l’ordre…
ÉGYPTE (un dernier point nécessaire) – L’ARMÉE N’A JAMAIS QUITTÉ LE POUVOIR ET LES FRÈRES ONT COLLABORÉ AVEC L’ARMÉE, QUI AUJOURD’HUI LES RAPPELLENT À L’ORDRE, MEME SI CELA FAIT DU MAL À CERTAINS – ÉDITO CHRONIQUE – (…) La Chronique remet les points sur les I en 7 choses à se rappeler !
1) L’armée n’a pas cédé le pouvoir en juin 2012. Le Conseil Suprême des Forces Armées (SCAF en anglais) ne s’est jamais dissous et est ainsi devenue une institution parallèle toujours ausi puissante et dominante.
2) Les généraux n’ont jamais perdu le pouvoir en juin 2012 : le départ à la retraite du maréchal Tantawi était prévu de longue date. Mohamed Morsi (et l’armée) ont fait une mise en scène sur son possible départ forcé… Que la Chronique n’a jamais cru. Les autres généraux sont toujours et ont toujours été les maîtres du pays, via le Conseil.
3) Les Frères Musulmans ont collaboré avec l’armée dès l’époque de Moubarak, quand celui-ci a débuté un desserrage de boulon dans les années 2000, permettant l’entrée des Frères au parlement (ne pas l’oublier… même s’il y a eu la reprise de la répression à la fin des années 2000, période durant laquelle les Frères continuaient à siéger…). Ne pas oublier les accolades et rires entre Mohamed Badie des Frères Musulmans, qui siégeait alors, et les cadres du PND de Moubarak…
4) Les Frères Musulmans ont appelé l’armée en janvier 2011 : fait oublié, ce sont les Frères Musulmans… qui ont appelé l’armée à prendre de facto le pouvoir le 31 janvier 2011 dans une déclaration officielle ! Plus important, c’est Mohamed Morsi qui menait les négociations entre les cadres des Frères et… les cadres du régime d’Hosni Moubarak, dont Omar Suleiman !
5) Les Frères Musulmans ont soutenu la sanglante répression par le Conseil des Armées d’octobre-novembre 2011 contre les salafis, les laïcs et les indépendants de l’Islam politique.
6) Les généraux ont obtenu de Mohamed Morsi et des cadres des Frères Musulmans une Constitution où leurs pouvoirs ont été… RENFORCÉS ! Ne jamais l’oublier : les généraux, en plus de leur Conseil tout puissant, ont vu leurs pouvoirs agrandis avec la nouvelle Constitution de 2013 (arrestations arbitraires, détentions, etc…).
7) Les généraux se sont vu offrir par Mohamed Morsi et les Frères Musulmans la domination sur la politique étrangère, la défense et même le ministère de l’Intérieur. De même qu’ils conservent le contrôle de 60 % de l’économie du pays. Chose non remise en cause par les cadres des Frères Musulmans !
L’armée ne fait donc pas de coup d’État, puisqu’elle est au pouvoir ! Les Frères Musulmans n’étant que leurs supplétifs temporaires. Les généraux veulent juste une évolution des choses : non pour l’Égypte, non pour les laïcs, mais pour, encore une fois, sauvegarder leur pouvoir ! Un pouvoir si bien défendu, préservé et même renforcé… par les Frères Musulmans !
Chronique du printemps arabe sur Facebook, 2 juillet 2013
Antisionisme : quand l’extrême-gauche se fait (encore) piéger par l’extrême-droite.
Cet article traite de ce que certains qualifieraient de détail, mais qui reflète une situation devenue tristement courante. Car force est de constater que la mouvance dite conspirationistegagne du terrain depuis des années notamment chez la gauche, usant de subterfuges parfois bien ficelés pour parvenir à ses fins. Aujourd’hui c’est une simple petite photographie partagée sur les réseaux sociaux qui a mis le feu aux poudres chez moi, reflet d’un constat amer ancien et encore bien vivace. Ou quand l’illustration d’un exemple d’une dure réalité saute aux yeux, où mes plus proches camarades alternatifs et antifascistes servent (malgré eux) la soupe à l’extrême-droite.
Hier soir, je tombe sur une énième photographie partagée par de nombreux contacts y compris chez mes camarades les plus progressistes et éclairés. Tout le monde acclame unanimement en légende et commentaires ces Juifs antisionistes, et moi-même à première vue j’en suis heureux. Sauf que personne ne se demande pourquoi cette position et qui sont finalement ces gens, et c’est à partir de ces interrogations que le panneau pris dans la gueule apparait. Ces manifestants font très distinctement partie de la communauté ultra-orthodoxe, c’est-à-dire des intégristes. Ceux-là même qui par exemple se rassemblaient et crachaient (au sens propre) sur les petites filles israéliennes car elles osaient aller à l’école primaire en « tenue incorrecte » (c’est-à-dire en jupes) et ce devant les établissements [le Figaro, le Monde, France 24…, 28 décembre 2011], ou caillassent de temps en temps les voitures qui roulent pendant le Shabbat en plein Jérusalem – pour les extrémistes il est interdit d’utiliser un véhicule ce jour là – [le Figaro, 20 août 2007] et font parler d’eux à de nombreuses autres occasions. Ce sont aussi la plupart de ces idiots qui se retrouvent en France dans les spectacles de Dieudonné à l’acclamer dans son rejet antisémite, un amour réciproque surprenant mais qui prend racine dans une lutte commune.
Car ils vomissent le sionismepuisque pour eux tant que le Messie n’est pas revenu, reprendre la Terre sacrée est blasphème ; une idéologie parmi un dogme complet, mais dont les autres points sont d’un obscurantisme délirant les poussant aux atrocités susmentionnées. Un pseudo-amour de Dieu et de la liturgie la plus effrénée si forts que les bouffonneries de l’humoriste tragique et autressoraleries deviennent donc un fer de lance, servant également l’autre côté sur un plateau d’argent pouvant ainsi se dédouaner en apparence de ses démons car s’illustrant désormais avec des fidèles [Michel Briganti, la galaxie Dieudonné]. Traquenard qui fonctionne potentiellement, car une fois l’amitié gagnée sur ces ultra-orthodoxes contre Israël, de fil en aiguille les accointances de ceux-ci avec le milieu conspi sonne pour certains comme la preuve d’une moralité irréprochable. Bien que la réalité soit donc toute autre, la dérive est pourtant déjà constatée chez une part non-négligeable des (anciens) adhérents de la gauche devenus ce que l’on nomme des « rouges-bruns. »
Alors chouette, des gens à la kippa défilent contre la politique actuellement menée ayant en effet comme base ce nationalisme religieux à la sauce meurtrière (qui n’est au passage bien sur pas soutenu par l’ensemble des israéliens, des Juifs, et même des sionistes), mais pour prôner à la place une société parmi les pires fondamentalismes main dans la main avec les cryptofafs les plus ignobles. Ce que l’on croit gagner avec cette photographie, on le perd d’autant plus cruellement quand on prend la peine d’y réfléchir vraiment. Il faut en effet faire attention, un simple cliché orienté ne suffira jamais à tirer des enseignements et peut au contraire nous piéger en beauté ; c’est pour cela qu’il faut se fier à son seul instinct pour l’analyse de faits mêmes présentés (dans ce cas naïvement) par des amis antifascistes. Et oui, il y’a tout cela dans une diffusion à priori banale. Les masques tombés, ce que certains ont cru être des alliés solides trouvant grâce par un machiavélisme sordide, se transforment en une des formes de fascisme qu’ils ont toujours objecté mais n’apparaissant pas comme tel. Lumière est désormais à présent faite, j’espère que chacun en tirera les conclusions qui s’imposent.
Bien que je sois moi aussi un fervent opposant au sionisme, je n’approuverais jamais ni les intégristes ni les antisémites quels qu’ils soient. Les ennemis de nos ennemis ne sont en effet pas forcément nos amis. Car si ce combat d’apparence noble se retrouve dans leurs programmes, il ne faut toutefois pas oublier que derrière se cache également tout un délire de haine incompatible avec nos idéaux d’amour et de liberté que nous nous acharnons à semer dans ce monde déjà gangrainé par tant de vermines. Encore combien de temps des personnages comme Alain Soral avec Égalité et Réconciliation, Thierry Meyssan avec le Réseau voltaire, François d’Asselineau avec l’Union populaire républicaine, Jacques Cheminade avec Solidarité et Progrès, Etienne Chouard, Michel Collon, le Cercle des Volontaires, le projet Apache, et j’en passe pas mal, ou de pages déclarant lutter contre les Illuminatis, le Nouvel ordre mondial, la désinformation, ou soutenant feux Mouammar Kadhafi et Hugo Chavez, ainsi que Bachar El-Hassad et Mahmoud Ahmadinejad, d’ailleurs relais des premiers pseudos-théoriciens, continueront eux aussi leurs petits jeux obscures pour rallier à leur cause nauséabonde des gens de chez nous qui n’ont toujours pas ouvert les yeux ? Un exemple parmi tant d’autres des effets insidieux de la nébuleuse d’extrême-droite et de la simplicité militante de quelques collègues aux effets dévastateurs, qui doit accentuer plus que jamais notre devoir de vigilance.
« Amour libre » vraiment ? Et après ?
« Le couple et la cohabitation sont aussi aliénants pour les hommes que pour les femmes mais [les hommes] ne le savent pas encore parce que leur aliénation est celle du maître dont la survie – en tout cas le confort quotidien – est liée à l’esclave […] On leur a appris depuis l’enfance que si le couple et le foyer sont la place naturelle des femmes, leurs véritables territoires sont ailleurs, au travail, au parti, à la guerre. En partant accomplir les tâches nobles qui leur sont attribuées, ils croient fuir l’aliénation du foyer mais ils ne font que quitter une aliénation pour une autre et les deux se renforcent mutuellement, l’existence du couple et celle de l’entreprise sont indissolublement liées et la réforme de l’un s’appuie sur la libéralisation de l’autre. […] Ce n’est peut-être que lorsque les femmes seront parties, (…) lorsqu’ils perdront leur base de repli, leur résidence secondaire où ils refont leur force de travail, que les hommes prendront profondément conscience, dans leur corps et pas seulement en théorie, de leur aliénation globale et qu’ils remettront concrètement en cause la notion de travail forcé ”
Evelyne Le Garrec, « Un lit à soi », 1979.
« Ce n’est pas la situation actuelle de la famille qui est inacceptable, c’est son existence même. […] Il n’y a pas à transformer la structure parentale, car l’égalité vécue […] ne pourra exister et engendrer un bouleversement total des rapports sociaux que dans une société sans classes, décentralisée, techniquement autogérée […]. Il va sans dire que ce type de société ne peut que se fonder sur un renversement total des rapports entre les sexes et sur la disparition de la cellule familiale.
[…]Pour résumer : la famille est la courroie de transmission entre le Pouvoir, quel qu’il soit, et le futur citoyen, prolo, cadre, patron, enfant. C’est la famille et l’école qui font d’un enfant un “ adulte ” par la violence. Mais le Pouvoir exerce également sa contrainte sur les parents (surtout la mère par l’intermédiaire de l’enfant ; l’enfant est son otage, son chantage). Toute personne qui n’a à vendre que sa force de travail – 99% des gens -, sitôt qu’il devient père ou mère est obligé de se soumettre. Il doit travailler, et travailler à n’importe quoi, pour n’importe quel prix. »
François d’Eaubonne, « L’hiver du patriarcat »,
Article, in Revue “ Autrement ” n. 3, Automne 1975.
Au fil des rencontres, des discussions et des lectures et autres réflexions sur « L’amour libre » ou le « polyamour » dans les milieux anarchistes, anti-autoritaires ou dit « autonomes », avec un peu de recul on en vient assez vite à se demander si ces termes ont encore un sens. Et surtout s’ils ne sont pas aujourd’hui très galvaudés. Ce sont des termes parfois vus comme un peu prétentieux. Parce qu’il y a dans certains milieux (« radicaux » ou pas) un prestige à dire qu’on est « en amour libre ». Ces termes « d’amour libre », d’amour pluriel ou de « poly-amour » produisent un effet. Termes qui sous entendent aussi implicitement qu’on est tellement plus libéré-e-s que les autres et qu’en plus on s’aime (ou pas). Mais quel que soit le mot qu’on utilise, il semble recouvrir un ensemble d’agencements et d’arrangements amoureux, amicaux, sentimentaux ou sexuels (ou un peu tout cela à la fois) qui n’ont souvent rien en commun les uns avec les autres sinon de ne « pas être un couple »… et encore.
Dans une partie des milieux révolutionnaires ou dit « anti-autoritaires », ces termes (ou d’autres synonymes) sont un peu à la mode ou font simplement force de « tradition ».
Mais force serait plutôt de constater qu’il existe un vide cosmique au niveau de la réflexion et de la critique concernant nos pratiques et les questionnements qui sont liés à cette question, ou presque.
Soit que ce n’est pas « subversif en soi », soit que c’est « l’affaire de chacun-e », soit que ce n’est pas « une pratique de lutte ». Bref, une bonne dose de libéralisme et de mauvaise foi pour cacher la misère et renvoyer les questions qui touchent à l’intime à la place que lui avait déjà assignée la société dans laquelle nous vivons : celle du « privé ». Ou encore (autre solution cybernétique) en faisant de la question un problème de mauvaise gestion. Le couple n’étant pas apte à « gérer les sentiments », on « collectivise » en présentant ainsi la question comme devant simplement être mutée de la « sphère privée » à la « sphère publique » sans questionner ni le pouvoir, ni la gestion, ni ces fausses séparations. Dans tous les cas, on est face soit à un refus d’aborder le problème de face, soit à une volonté d’y imposer des solutions toutes faites. Deux versants d’une même manière d’ignorer l’éléphant qui est dans le salon.
L’Unique et son intimité.
« La liberté intellectuelle dépend des choses matérielles. La poésie dépend de la liberté intellectuelle. Et les femmes ont toujours été pauvres, depuis le commencement des temps. Les femmes ont eu moins de liberté intellectuelle que les fils des esclaves athéniens. Les femmes n’ont pas eu la moindre chance de pouvoir écrire des poèmes. Voilà pourquoi j’ai tant insisté sur l’argent et sur une chambre à soi. »
Virginia Wolf, in « Une chambre à soi »
« Être dans la solitude, c’est là le difficile. Continuer à être, à garder le sentiment de sa propre existence — être, et non pas cesser d’être, quand l’autre n’est pas là — et conserver le sentiment d’identité — être soi, et pas les autres. Il est des gens pour qui la chose paraît simple. Ils sont convaincus que leur existence vraie ne cesse pas, mais peut-être même ne commence qu’à l’écart des autres. Ce retrait, ils le nomment, c’est selon, la vie privée, la table d’écriture, la chambre à soi. Pourtant, pour beaucoup, l’être se défait, s’altère quand l’autre manque. (Mais cet autre qui ne peut faire défaut sans que je sombre dans le néant, est-ce bien un autre ?) Ils ne sont que quand ils ne sont pas seuls (la promiscuité tient lieu de proximité). »
Michel Schneider, in « Glenn Gould piano Solo ».
Dans toutes les nouvelles sectes gauchistes new-age, comme dans toutes les tentatives désespérées de réanimer les cadavres encore chauds des vieilles idéologies révolutionnaires (post-situ et marxistes, etc…) -concernant les problèmes auxquels nous sommes confrontés aujourd’hui dans nos vies- se révèlent non seulement inopérantes pour expliquer le monde qui nous entoure, et formuler leurs perspectives révolutionnaires, mais ont toutes en commun la négation pure et simple de l’individu.
Plus précisément, c’est cette fable de « l’individu immédiatement social » (le communisme ?) décliné à toutes les sauces qui revient régulièrement (ou sous d’autres formes), et raisonne comme une douce promesse. La solution est forcément collective, forcément une question de « luttes des classes » et de « rapports de production », et en bref ne laisse aucune place non seulement à l’individualité mais aussi aux questions qui touchent à l’intime et au domaine du sensible. Comme si d’ailleurs ces champs étaient exclus de tout rapport de force et de toute domination…
Or, dans cette vision l’individu n’est im-médiatement social (c’est-à-dire sans médiations) que dans le « monde idéal», une fois achevée l’abolition des classes, de « la valeur », de toutes les formes d’oppressions et de dominations… et d’ici là, bon courage camarades !
Car de fait cette fable ne vaut pas dans la société dans laquelle nous vivons puisque l’individualité n’est conçue par ceux qui la « nient » que comme le produit finit d’un processus d’atomisation (ce qu’il est aussi en négatif) et comme un concept « bourgeois » ou libéral, ou comme simple produit de rapport de production ou d’échanges. Ironie du sort, libéralisme existentiel et communisme littéraire se passent très bien du concept d’individualité ou d’individu.
Dans la perspective « communisante » précisément, comme dans la perspective qu’on pourrait qualifier de « tiqqunienne » (ou dans bien d’autres théories) le grand mouvement qui est à la fois sa perspective, sa méthode et son propre but, communise donc tout sur son passage : les chaussettes, les radiateurs, le pain et les affects. Du moins il croit le faire. Ça c’est sur le papier évidemment. Le problème c’est bien sur que les « affects », ou plus généralement les sentiments (et moins encore les individu-e-s) ne peuvent se résumer à des « produits du procès de production» (entre autres tautologie) ou à des marchandises interchangeables qu’on peut voler, auto-réduire et « se faire passer ».
Le problème c’est précisément que la rationalité capitaliste et autoritaire a imprimé cette idée sur son passage. Et qu’à défaut de penser la question, c’est la même rationalité de supermarché qui range au même rayon les boites de conserves, le papier toilette, la copine, le copain, « mes ex et mes futurs ». A tel point qu’on pourrait presque écrire sur la liste de courses et de choses à faire « trouver une autre relation ». C’est en général ce qui se fait sur les « réseaux sociaux », sur internet, par exemple.
Evidemment, en plus de témoigner d’une misère affective désarmante (et ce n’est pas rien de le dire), cet « amour libre » là (sous ses diverses facettes) est le plus souvent un petit théâtre dérobé de la reproduction des formes de dominations hétéro-sexistes et patriarcales, souvent même de manière paroxysmique et caricaturale.
La plupart des « amour-libristes » revendiqués sont bien entendu des hommes hétérosexuels. On se demande entre hommes « comment convaincre sa copine de s’y mettre » sans se demander si on va vraiment le supporter (ou mieux, on lui interdit en se permettant toutes les libertés dans son dos). Et quand la « copine » trouve la clef des champs, on se transforme en une espèce de Tartuffe machiste désabusé, la traitant de tous les noms, et on invente des mensonges incroyables pour se faire passer pour la victime auprès de tout le monde. On affiche son tableau de chasse devant ses potes et on explique qu’on est « blessé » ou qu’on se sent « abandonné » dès que la « copine » fait preuve d’un soupçon d’autonomie sentimentale ou sexuelle. Ou pire donc : on cloitre, on isole.
« A elle le couvent, à moi la liberté ». On « fait le canard » devant « sa » copine attitrée, le fier devant ses potes et le malin avec les autres, pour montrer combien on est pas jaloux.
Evidemment, ces situations sont toujours transposables d’un sexe à l’autre ou dans des relations non-hétéro-normées qui se calquent sur le modèle et le style de vie du couple dominant. Ces attitudes (qui ne sont pas l’exclusive propriété des hommes) donnent simplement parfois l’impression d’être juste la norme : à la fois dans les couples traditionnels, dans les couples « réformés », et dans le cloaque « amour-libriste » (dans toute sa diversité) qui ne dit pas son nom mais est quand même très fier de ce qu’il prétend être.
Dans tout ça, il y a l’aspect irrémédiablement « précaire » de la vie collective, qu’elle soit le fait de collocations, de logements sociaux où on s’entasse ou de squats. Encore que ces derniers offrent au moins en puissance –et même temporairement- plus de potentialité : parce que plus d’espace.
Mais dans tous les cas, soit c’est le désert où l’intimité a été « abolie » ou « collectivisée » de force (ce qui dans l’esprit de secte de nombreuses personnes, signifie la même chose), soit c’est le couple comme refuge (et de ce point de vue là, on a pas toujours envie de lui en vouloir). Mais encore une fois, c’est de territoire partagé sous la contrainte qu’il s’agit. Une maison, un espace, une chambre, un lit. De toute évidence, il y a là toutes les raisons de ne pas s’interroger sur l’autonomie individuelle et même le consentement tant ces questions impliquent des réponses « dangereuses ».
Dangereuses pour la société en général, mais aussi pour un ensemble de milieux où le crime suprême dans la vie collective n’est pas de vouloir forcer les limites corporelles et intimes des autres mais bien plutôt de mettre un verrou à sa chambre. Là où il ne viendrait étrangement à personne l’idée de démonter celui des chiottes ou de la cave par exemple.
Et puisqu’on en parle : un ensemble de milieux qui a enterrée l’idée même d’une chambre à soi, voir même d’un lit à soi en même temps que toute possibilité d’autonomie individuelle -et donc d’individualité comme principe et comme tension – ne porte résolument pas grand choses.
Et il faut bien des renoncements pour y parvenir. Et d’abord celui à l’intimité. C’est-à-dire à la possibilité –même ponctuelle- de s’isoler, d’être parfaitement seul lorsqu’on en a envie, de garder certaines choses pour soi, de ne pas partager toutes nos expériences avec la terre entière.
Du reste, la volonté manifeste et systématique de « collectiviser l’intime » (c’est-à-dire en fait de le détruire) s’apparente plus qu’autre chose à une volonté de pouvoir et d’emprise collective (souvent par un petit groupe ou quelques individu-e-s) sur les relations inter-individuelles. Bien entendu, le « privé » est politique. Mais l’intime n’est pas nécessairement « privé ». Il est une tension entre soi et les autres. Il est ce mince fil qui permet d’exister par soi-même avec les autres.
On peut disserter sur l’idéal que représenterai le fait de vivre –comme certains anarchistes naturistes de la belle époque par exemple- en communauté totale dans un Eden retrouvé, qu’on en ferait pas disparaitre pour autant l’irrépressible besoin d’intimité. L’intime est en fait bien plus que le besoin d’être seul ou le « lien particulier qu’on partage avec d’autres », il est aussi la distance raisonnable dans laquelle on les maintient. Il est cette bienveillance avec laquelle on rappelle à l’autre qu’on n’est pas lui ou elle. Il est aussi la force avec laquelle on repousse nos propres fantasmes de fusion, dans tout ce que ceux-ci comportent d’autoritarisme, de vampirisme affectif, d’appropriation du corps de l’autre, et donc aussi d’hétéro-sexisme, et même de cannibalisme social (au moins dans l’étrange légèreté avec laquelle on considère les corps comme simples aliments de nos « besoins »). En lieu et place de la liberté ou de l’émancipation, c’est bien un libéralisme qui ne dit pas son nom qui domine la plupart du temps. Celui du « j’fais c’que j’veux et j’t’emmerde ».
Là encore –évidemment- le ressac patriarcal, et le ressac libéral et non anarchiste, comme projet contre-révolutionnaire s’exprime avec une aisance et une complaisancedésarmantes.
Sous toutes bonnes intentions, les volontés de faire disparaitre cette tension qu’est l’intime – à travers la généralisation du ragot ou la mise à disposition des corps- sont simplement d’excellentes méthodes de pacification et de contrôle, et bien entendu le retour à des formes ancestrales de privation, de contrainte et d’exploitation : tout particulièrement pour les femmes.
Evidemment, la tendance au ragot, ou le fait d’exposer en permanence les autres sans leur consentement ne doit pas être compris comme une critique de la solidarité nécessaire dans les situations de violences ou d’abus, mais comme la norme qui consiste à se vanter de « ses relations », comme une autre forme de « capital social ». Norme omniprésente dans les relations de couples et hétéro-normées. Ou plutôt du couple hétéro traditionnel comme modèle relationnel unique et de référence.
Ouvrir la boite de pandore, et laisser nos illusions s’envoler.
« nous savons bien que malgré nos conceptions nous sommes encore jaloux, menteurs, propriétaires, autoritaires. Et comment, du jour au lendemain, ces tares que nous nous reconnaissons pourraient-elles s’effacer chez tous? (…) Constatons simplement l’effet certain d’améliorations que peuvent amener en les individus l’application des idées anarchistes, mais soyons assez lucides pour ne pas espérer supprimer instantanément les tares et en particulier les souffrances de la jalousie »
Anna Mahe, in « Jalousie », l’anarchie, 21 février 1907, n° 98
Ce « communisme » d’opérette-là (celui cité plus haut), sous toutes ses facettes, ne fait que singer les pires fantasmes « biopolitiques » de caserne et de panoptique en termes de relations sentimentales comme dans la vie quotidienne. Il s’apparente d’une certaine manière à la « maladie communautaire » décrite par Bonnano dans son texte du même nom. Une véritable politique à lui tout seul justement. S’il y a une analyse critique à porter sur ce qu’il est encore convenu d’appeler « l’économie », c’est aussi contre nos propres pratiques oppressives et autoritaires qu’elle doit s’orienter. Car une des bases du capitalisme (et par extension de toute oppression et domination) n’est pas juste l’accumulation, ou même le processus de valorisation mais bien l’appropriation, et conséquemment la force et la contrainte qu’elles supposent.
En réalité, la seule philosophie qu’on puisse réaliser dans ces conditions sans s’attaquer au problème de l’autorité et des diverses formes de pouvoir, institutionnelles comme celles dans la vie quotidienne, reste un « communisme de la survie ». Et c’est un principe qui se vérifie aisément : la survie ne pousse pas les gens à se révolter, à s’auto-organiser ou à lutter. Elle pousse au mieux à se replier sur soi, et plus généralement à s’entredévorer et à se familiariser avec une sociabilité de charognards.
On peut donc d’autant moins se payer le luxe d’ignorer la question de la liberté dans les relations amoureuses, sentimentales ou amicales (et de comment éviter de trop séparer tout cela) que la situation actuelle dit quelque chose du désastre ambiant : du ressac patriarcal et des comportements de prédateurs, du racisme rampant et institutionnel, de la dégradation généralisée des conditions de la survie, des relations de pouvoir et de la violence dans les relations amoureuses, affectives ou « de couple ». Et au milieu de tout cela, de la possibilité d’établir des relations sociales libérées. La situation dit aussi quelque chose de notre incapacité à lier notre éthique et nos pratiques dans la vie quotidienne à celles que nous prônons dans nos luttes. Si nous n’en parlons pas, si nous ne nous regardons pas en face : alors les mêmes causes produiront les mêmes effets.
De la même manière qu’on ne peut pas tout réduire au lieu de travail, on ne peut pas tout réduire à « l’économie », et on ne peut pas d’un côté parler à qui veut l’entendre de « commun » en enterrant systématiquement tout ce qui sort du champ du « social » et de ses « mouvements » au sens le plus restreint des termes.
Ironie du sort, la seule chose qui fasse encore consensus à propos de « l’amour libre » c’est que ce n’est même pas un sujet de débat. Après tout, c’est Emma Goldmann qui demandait « Comment l’amour pourrait-il être autre chose que libre ? ». On devrait se demander aujourd’hui : comment pourrait-il l’être vraiment ?
Les discours convenus sur « l’amour qui est à réinventer » ou « à détruire » ne nous apportent rien ou pas grand-chose. Les gens continuent de tomber amoureux/ses en prétendant que ce n’est pas le cas et se font toujours aussi mal voir plus. Comment pourrait-il en être autrement ? L’amour est-il un problème en soi ou est-ce seulement la manière de l’envisager ? Ou n’est-ce pas plutôt un problème plus général où les sentiments et les affects continuent de pâtir soit de leur exclusion du champ d’analyse critique, soit de leur soumission à des modèles « révolutionnaires » préconçus.
Toutes ces questions restent en suspens.
Autonomie sentimentale et clandestinité amoureuse.
« L’émancipation de la femme est, selon moi, très mal posée chez les anarchistes. La femme n’est guère envisagée que comme épouse ou amante, que comme complément de l’homme et incapable de vivre sa vie pour et par elle-même. (…) La femme est donc prédestinée à l’amour, légalisé chez les gens comme il faut, « libre » chez les anarchistes »
Sophia Zaïkowska, in « Feminisme » ,
La Vie anarchiste, 1er mai 1913
On peut se raconter des berceuses ou prétendre que tout n’est qu’une question de « conditions matérielles » (sur lesquelles on a donc peu de prise, c’est donc « la faute à personne ») ou même de « bonne volonté » (c’est donc « la faute à tout le monde ») et on en perdrait presque de vue la puissance de l’idéologie. Du fait que nous avons été conditionné-e-s à penser que « l’amour c’est papa et maman ». Que c’est pour la vie. Que c’est une romance et une histoire à deux uniquement. Ou bien que c’est « moi et mon cheptel » (version « prince proxénète »). Même lorsque ce n’est pas ce qu’on a vécu dans son enfance et moins encore ce qu’on voudrait vraiment pouvoir désirer.
Les désirs en disent d’ailleurs généralement plus sur ce que nous avons été conditionné-e-s à penser que sur ce qui nous rend véritablement heureuses/eux.
Mais une chose est sure, sans chambre à soi, sans lit à soi, sans intimité : quelle type de relation libre est encore possible ?
La misère sentimentale et la vulnérabilité affective rendent possibles les pires actes et attitudes autoritaires et hétéro-sexistes en matière de rapports sociaux sentimentaux. Pire, elles en sont une conséquence inévitable. Cessons de faire comme si la violence –même psychologique- dans les rapports amoureux ou sentimentaux n’était qu’un accident de parcours ou seulement « la faute au couple ». Car cette misère et cette vulnérabilité, cette exposition rendent aussi possible le couple comme refuge et comme mouroir. Et tout cela est profondément lié à l’absence d’intimité (ou son contrôle strict, par un individu ou le collectif) et au fait de ne pas pouvoir se retourner sur soi, de réfléchir et se questionner, pour se reposer, ou pour toucher son propre corps et jouir enfin seul. Ce n’est pas un hasard si ceux et surtout celles qui en ont été privées sont pris-e-s d’insomnies chroniques ou atteint-e-s de procrastination et d’apathie. Précisément, ce n’est aussi pas un hasard si cette condition d’absence d’intimité (ou d’intimité contrôlée) est déjà –à divers degrès- celle de la plupart des femmes dans les sociétés dans lesquelles nous vivons.
Ironie du sort : l’injonction « immédiate » à la société contenue dans la conception dominante « d’amour libre » (ou de « camaraderie amoureuse » – pour reprendre un autre concept douteux) ne fait en fin de compte qu’étendre l’exigence marchande et patriarcale de mise à disposition des corps.
Il n’y a donc pas qu’une manière, mais une infinité de façons de rompre avec cette condition. De s’y attaquer. Qui correspondent aux désirs, aux problèmes, et aux spécificités oppressives de chacun-e-s.
Et que nous devrions le voir comme une aubaine et non une contrainte.
En effet, il y a quelque chose de puissant dans cette tension qui lie la nécessité première d’être « unE » aux désirs et aux besoins d’être « plusieurEs ». Et l’unE ne peut pas aller sans l’autre. L’analogie est aussi bien transposable aux sentiments, à la lutte des classes ou aux rapports sociaux de sexe qu’à la question de l’auto-organisation. Et toutes ces questions ne font que se recouper en permanence.
Sans en faire l’alpha et l’oméga de toute théorie -et quoi qu’on en dise-, l’élément de base, celui qui n’est pas compressible, qui ne peut pas être « dissout », qui se révolte, qui respire, qui ressent et qui se débat de toute ses forces contre tout assujettissement (d’autres disent de « subjectivation ») n’est ni le groupe, ni la secte, ni le parti politique, ni le milieu, ni la fédération : c’est d’abord l’individu-e. Concept qui n’est ni intrinsèquement marchand, ni forcément libéral, ni même essentiellement « bourgeois » ou même contradictoire avec une analyse de classes.
Parce qu’il est le sujet sensible de tout pouvoir : parce que c’est le X de l’équation.
D’où la nécessité pour toute autorité ou tout esprit de secte de le transformer en citoyen, en « produit fini», en sujet d’analyse ou en quoi que ce soit d’autre, ou tout simplement de le nier : de faire comme si il n’existait pas.
L’idée d’autonomie sentimentale prise uniquement d’un point de vue « collectif » est une pure abstraction. Le sentiment de jalousie en dit d’ailleurs plus sur l’image qu’elle nous renvoie de nous-même que sur les autres. Elle dit quelque chose de notre besoin de contrôle et du soi-disant « instinct de propriété » – et de la peur de l’abandon qui les construisent socialement. Même si cette peur est parfois légitime : il faut apprendre à vivre avec, et à l’apprivoiser. Car elle dit aussi quelque chose de notre incapacité à éprouver de la joie à l’idée de savoir l’autre heureuse/eux sans nous. C’est-à-dire à éprouver l’exact contraire de la jalousie.
Mais tout ça n’est pas une mince à faire. Et si tout n’est pas non plus qu’une question de « volonté », alors il faut s’interroger sur les conditions qui rendent cette liberté possible. Et d’abord d’une absence de condition oppressive et autoritaire (de lois, de traditions, de classes, patriarcale, raciste, etc…). Ce qui nous mène inéluctablement sur le terrain de l’attaque et de la conflictualité avec cette même condition.
Et aussi sur celui d’une sorte de clandestinité amoureuse. Parce qu’en effet, dans un monde où la violence de la domination est omniprésente, toute intimité réelle est forcément un peu clandestine. Le stade suprême du soit disant “processus d’individuation” capitaliste et étatique en matière de relations sociales se traduit en réalité par un état où l’individu n’a plus ni “vie privée”, ni vie tout court.
C’est précisément pour ça que la communauté de vie ou de luttes sans intimités ne subvertie rien en termes affectifs. Pour le redire à nouveau, d’une autre manière : elle ne fait qu’étendre l’exigence policière de renseignement et celle de la disponibilité et de l’interchangeabilité marchande des corps à la sexualité dans un simulacre “d’économie sexuelle libérée” (triple oxymore ?) qui ne se maintient qu’au travers de sa perpétuelle mise en scène.
Ainsi, même si il s’agit parfois de quelque chose de « symbolique », dans un environnement hostile où « sexualité » rime avec violence et prédation : savoir rester secret pour soi est un gage d’autonomie et pas nécessairement de possession, de jalousie ou « d’esprit petit bourgeois ». Ou simplement parce que : tout le monde n’a pas besoin de tout savoir sur tout.
C’est là toute la contradiction dynamique que portent en elles les réponses à la question de savoir si et comment nous pouvons vivre nos amours librement dans un monde qui ne l’est pas : et après ?
Le Cri Du Dodo
Quelques lectures, comme pistes de réflexion, en plus de celles citées dans le texte :
– “A propos d’autonomie, d’amitié sexuelle et d’hétérosexualité”, de Corinne Monnet.
– “Sous le tapis le pavé : Les violences sexistes dans les milieux militants qui se revendiquent anti-sexistes et anti-autoritaires”, Récit collectif et anonyme.
– “Amour libre, jusqu’où ?”, de Martine-lisa RIESELFELD
– “L’utopie de l’amour libre” , de José Maria Carvalho Ferreira, revue Réfractions.
– “Les milieux libres, vivre en anarchistes à la Belle époque”, Céline Baudet, éditions l’Echapée.
– “Je t’aime… oui mais non, l’amour c’est mal … on en est où, là ?” anonyme
– “Complicated relationships : conversations on polyamory and anarchy”,Ardent Press edition (en anglais).
PAGERETE TUTTI,ILS PAIERONT TOUS!
– ni Oubli ni Pardon –
Clément restera à jamais dans nos cœurs, dans notre mémoire…la simple évocation de son nom nous serre encore le bide, celle des conditions de sa disparition nous plonge tout bonnement les viscères dans un bain d’acide. Si perdre un frère, un ami ou un camarade est toujours un épreuve. Apprendre qu’il s’est fait assassiné par ceux contre qui nous luttons , par ce contre quoi nous avons toujours lutté ( la violence fasciste et l’idéologie qu’elle sert) nous renvoit face contre terre, percuté la réalité de ce monde dans lequel on vit…de cette société dans laquelle on crève…
» Le béton est armé pourquoi pas nous? »
Nous avons respecté le temps de recueillement souhaité par sa famille et ses plus proches ami-e-s. Nous pensons bien fort à eux dans un tel moment …conscient qu’ aucun mot ne saurait calmer l’indescriptible douleur dans laquelle ils ont été plongé par l’arrachage violent à la vie d’un être cher.
L’émotion est vive, au de là même du cercle d’amis qui le côtoyaient régulièrement, il est bien claire dans la tête de chacun, qu’il aurait pu s’agir de n’importe lequel d’entre nous, de nos proches, des nos frères et sœurs, de sang, de vie et de combats et qu’il n’est pas besoin d’attendre que cela n’arrive pour que nous nous sentions nous même touché dans notre cher. Si personne n’est libre tant que tout le monde ne l’est pas. Il y a toujours ce sentiment que face à la répression réactionnaire et à la violence fasciste – négation même de cette liberté chérie par-dessus tout – lorsque on touche à n’importe lequel d’entre nous– ces « fanatiques amoureux de la liberté » comme dirait Bakounine – c’est comme si on s’en prenait à chacun d’entre nous.
Lorsque Carlo ou Alexis tombèrent sous les balles de la police, aucune frontière ne nous empêché de ressentir que c’était aussi une part de nous qu’ils avaient assassiné…Il en va de même pour tous les anonymes tombés en Tunisie, en Egypte, en Turquie ou au Brésil et partout sur la planète car il s’agît bien d’une guerre civile mondiale…Nous sommes tous un peu mort à Gênes en 2001, en Grèce en 2008 ou à Paris en ce début de moi.
Aussi il ne fait aucun doute que le meilleur hommage que nous puissions rendre à quelqu’un qui avait pris fait et cause contre les forces réactionnaires qui gangrènent notre existence passe justement par notre détermination à ne rien lâcher dans cette lutte, et bien au contraire d’y insuffler toute la haine et la rage que nous ressentons en ce jour de colère pour que notre détermination n’en soit que décuplé et toujours plus incisive.
Qu’on nous traite d’ Ultra…aucune tolérance n’est possible. Tolérer ? Accepter l’inacceptable ? Devant quelle atrocité encore devrions nous rester des spectateurs impassibles le cul bien enfoncé dans leurs canapés le cerveau guimauve modelé sur mesure par les desseins du soi-disant bon sens démocratique. Cette insipide diarrhée verbale que nous ressert sans vergogne les hauts parleurs de la société spectaculaire marchande qu’ils soient hommes (marionnettes) politiques ou mass média. Ce même bon sens démocratique qui voudra renvoyer dos à dos « les extrêmes » , oui ceux qui luttent pour une société sans classe (donc libre et égalitaire pour tous et toutes) et ceux qui rêvent de centre de rétention, de prison ou d’ HP pour ces voisins pallier selon si il estime que ces derniers sont soit de dangereux envahisseurs migrants ou de monstrueux gauchistes traîtres à leurs nations.
« Notre deuil ce sera le fusil et le poignard »
Nous n’avons rien à attendre de la parodie de justice que la Republique Bourgeoise nous tend comme un hochet sur lequel baver et s’exciter pour faire passer le temps, que la tension redescende au lieu que les esprits s’échauffent … tant qu’aux média on les aura vu nous servir avant l’heure leur propre parodie de cette parodie de justice. Ce monde de l’info ou tout doit aller vite et si possible sentir le sperme, le sang ou le scoop pourvu que l’audimat suive, nous aura en tout cas confirmer dans toute son ignominie la gargantuesque boulimie du spectacle médiatique et sa monstrueuse capacité à tout ingéré, digéré. A intégré l’information tout en retirant sa « substantifique moëlle » pour n’en garder que cette forme scabreuse. Juste de quoi contenter la curiosité malsaine du badaud, tout en ayant tout fait auparavant pour motiver au maximum sa quête de perversion formaté.
Rien n’arrête les pantins de la société spectaculaire marchande. Ainsi on a pu voire chacun d’entre eux tenter de tirer son bout de couverture de ce qui était devenu pour eux un évènement médiatique. Jusqu’à l’ignominie la plus crasse. Des portes paroles du front de gauche venu immédiatement faire leurs pub, la pointe des pieds sur le cadavre encore chaud de clément, dont le nom ne servait bientôt que de marche pied dans leur quête d’ apparition sur la scène médiatique alors même que ceux qui le côtoyaient vraiment tentaient vainement de rappeler qu’il était justement critique avec nombre d’idée du front de gauche, on les entendait déjà le présenter comme « un proche de Jean luc Mélanchon » avec l’aide non dissimulé de journalistes prés à tous les raccourcis – l’idée étant de simplifier au maximum la réalité des évènements pour que ceux-ci n’apparaissent bientôt que comme l’expression du spectacle politique dans le réel. Le spectacle politico-médiatique ne fonctionnant que comme l’énonciation d’un récit spectaculaire, un travestissement des faits consistant en quelques images tape à l’œil saupoudré de commentaire simplistes, l’assassinat de clément ne devenait bientôt pour eux que la transposition du duel théatral que nous joue Marine lepen et Mélenchon depuis quelques temps. Le course d’obstacle à l’indécence n’allait pas tardé à se trouvé d’autres champions élus UMP et PS osant ramené leur sales trognes alors qu’eux aussi faisaient partis intégrante du système contre lequel Clément Méric avait choisis de lutter. L’apothéose étant bien entendu atteind par l’invitation sur les plateaux de l’inénarable Batskin venu nous servir ses meilleurs imitations du Duce à coups de poses bustes en avant et menton levé pour salir la mémoire de notre camarade de tirade ordurière où comme d’habitude il s’agit de discrédité le camps d’en face par des moqueries servis par un humour potache qui n’a plus rien de drôle quand il de faire passer le meurtre d’un jeune de 19 ans pour une malencontreuse glissade.
Nous n’oublierons pas. Nous ne pardonnerons pas. Ni les assassins et le camps qu’ils défendent et représentent. Ni l’idéologie raciste et fascistoïde qui a armé le poing qu’ils ont dressé face à nos camarades. Ni les acteurs de ce système spectaculaire marchand qui n’ont vu dans cet évènement qu’un moyen de faire du buzz qu’ils s’agissent de faire parler d’eux, de faire monter l’audimat ou de guetté l’électorat. Batards, crevures et charognards…La place de vos gueules est bien sous nos semelles car vous ne valez pas plus que la merde qu’elles cotoient…
ET CREVE LA VICTIMOLOGIE …
Et pour ceux qui cherchent à savoir qui en premier est venu chercher les autres…qu’ils ne s’y trompent pas. Face à ce genre de raclure, honneur à ceux qui ne lâche rien. Qui ne baissent pas les yeux. Qui appelle un chat un chat et un porc un porc, er qui le trâite comme tel lorsqu’il le croise. Qu’il s’appelle Esteban ou qu’il porte l’uniforme des forces de l’ordre réactionnaires. Qu’ils nous rêvent en centre de concentration ou qu’ils envoient nos frères dans des centres de rétention. La salope fasciste et policière a mille visage, il doit en être de même pour la résistance active qu’il faut lui opposer.
COURAGE FORCE ET DETERMINATION
Nous ne gagnerons rien durablement si on se contente d’accompagner les cortèges funéraires, d’envoyer des mandats au frères et sœurs au schtards…si il est indispensable d’afficher cette solidarité, il ne s’agit que du minimum que nous puissions faire. Et il faudra bien plus que le « minimum syndicale » pour contrer des ennemis qui ne comptent ni leurs temps, ni leur énergie, ni leurs moyens.
Le meilleur hommage que nous pouvons rendre à Clément, comme à tous les anonymes qui tombent chaque jour dans cette guerre qui ne veut pas dire son nom c’est non seulement de faire preuve de la plus puissante des déterminations mais aussi de leur opposer la plus féroce des résistances armées de tous ce que nous pouvons lui apporté. De tous ce qui peut la rendre efficiente.
Et finalement c’est aussi ne pas seulement se contenter de résister, de garder les quelques acquis que nous devons à des siècles de lutte mais c’est aussi et tout d’abord trouver ou re-trouver le goût et l’énergie de l’offensive.
On trouvera ça et là, des donneurs de leçons, tueur de lutte, qui voudront nous renvoyer dos à dos avec ceux que nous combattons, qui nous opposeront que rien ne mérite qu’on meurt à 19 ans. Hors justement il faudrait déjà pouvoir vivre dans un monde ou personne ne meurent si jeune de manière si violente pour de telle raisons pour qu’il en soit ainsi. Oh oui on aurait aimé que personne ne puisse crever à 19 ans sauf que le monde n’a pas attendu la mort de Clément pour connaître quotidiennement son lot de morts injustes…et rien ne semble ne nous détourner de cette voie dans un monde où rien ne semble pouvoir échapper à la sphère spectaculaire et marchande, et à la violence fasciste et policière qui l’a de tout temps accompagné – et ce, pour des raisons évidentes. Des raisons évidentes dans un monde ou tout se calcule en terme de plus-value , enintérêts, que celui-ci prenne la forme de monnaie sonnante et trébuchante ou d’une « notoriété » synonyme de« pouvoir » dans une société où rien n’arrête l’expansion de l’importance du paraître… Plus nous ressentons la réalité morbide de ce système cannibale et plus nous avons des raisons de nous révolter, et plus les nervis de l’Etat ou ceux qui idéologiquement rêvent de nous voire en cendre pulluleront excité par un système qui les poussera toujours plus à passer à l’acte…
Si tant de monde s’époumone à nous rappeler que la vie n’a pas de prix c’est bien que chacun constate que tout semble prouver le contraire…et ça jusqu’à la nausée…
Pour nous c’est claire. Nous sommes en guerre. Nous n’avons rien à vendre. Rien à brader. Rien à acheter et tout à prendre. Aucun pardon n’est à monneyer. Nous n’avons rien à négocier. Pour l’instant on sert les dents et on hurle en silence…en murmurant qu’il faudra bien qu’il paye…
Conscient ceux qui pensent pouvoir tout acheter ne connaisse pas le prix du sang…
Pour tous les notres qu’ils enferment
Pour tous les notres qui sont morts
RADIO KLANDESTINE PERMANENTE #28
FREE STYLE DECEMBRE 2011- PAROLES ENEDEKA MASKA -INSTRU ENOKAES
a l’intention de ces porcs de batards fascistes avec ou sans uiforme
En ce jour de décembre / Ici pas trop de galanterie, c’est plus Potere Operaio / depuis qu’le beat a ralenti n’importe quel pelo peut rapper yo/ Crise du isque ferment les labels ho…/les rappeurs mettent du labello / lèvres gersés / à force de sucer d’user des codes du New Jersey /t’es plutôt Jay-Z ou Jesse Jame, James et jessy / tu crois bander sur les bandits / le son d’la bande FM n’en est pas le produit / DOA ( dead on arrival) depuis la naissance / DIY ( Do it Yourself) j’draine comme une odeur d’essence…
Le matin j’ai des grosses cernes / matte mon reflet dans la seine / noircis jaunis par la pisse et l’ vomis / l’amboance malsaine des soirées parisiennes / Paris, j’aime quan ça saigne sur l’asphalte voil c’qu’il nous enseignent / Paris gêne, Les entend tu qui geignent? / Matte la galère sur notre enseigne…/ Ils en peuvent plus: reportages de peustu / sur le 93 ils donnent la parole aux teupus ./Loin des Koufahrs et des coups foireux / j’ai sentis le coups fourré / pas n de ces canassons qu’on ferre sans mettre un coups d’talon / un coups d’sabot bien ferme / de quoi faire taire donc la ferme! / Sans célébrité, célèbre l’idée de foncer au galop débridé / Pas besoin de lever les briquets on est des lanceurs de brique et / de pavés sur les brutes épaisses de la BAC et des CRS-SS / Est ce la peine de le préciser?/ Brise Lepen et ses idées pas qu’en temps de crise et prés à leur dire de fermer leurs bouches c’est anti-fascistes! /pas juste facile comme de dire que tu niquais Bush!
Moi j’nique l’arnouch c’est du sans retouche / demande à mon nouchma marlou mes p’tits garlouchas craignent le passage de l’arnoucha/ si tu parais louche ça / finit en gardav, en garre-ba grave grave gars / pas fait de cravmagga mais tu is grave de manga? / Gavé de Ken le survivant depuis la naissance…
Depuis que je suis vivant je draine avec moi comme une odeur d’essence
J’AIMERAI UN ACCEUIL DESCENT POUR LEUR PROCHAINES DESCENTES / QUITTE A LES DESCENDRE A LAISSER PARIS EN CENDRE
A FEU ET A SANG EN CE JOUR DE DECEMBRE
pour les fafs, pour les porcs
J’AIMERAI UN ACCEUIL DESCENT POUR LEUR PROCHAINE DESCENTE / QUITTE A LES DESCENDRE A LAISSER PARIS EN CENDRE
en ce jour de décembre…
PUPAJIM ( Stand High Patrol ) » Mr Trader » & Manudigital
http://www.youtube.com/watch?feature=player_detailpage&v=co_JRbGEK8I
Villemomble : une femme perd un oeil après le tir de flash-ball d’un policier
Une femme a perdu un oeil après un tir de flash-ball à Villemomble (Seine-Saint-Denis) mardi. |(LP/S.F.)
Une mère de famille a été grièvement blessée à l’oeil mardi soir, après une opération de police qui a dégénéré à Villemomble (Seine-Saint-Denis), dans la cité de la Sablière.
Tous circulaient sans casque et dans un secteur très fréquenté. A l’arrivée de la police, ils sont parvenus à s’enfuir, sauf l’un d’eux qui a chuté au sol, facilitant son interpellation, rue Decauville.
Mais cette arrestation a été perturbée par l’interposition de jeunes qui ont encerclé lesfonctionnaires. Profitant de la diversion, le motard accidenté a réussi à s’échapper. La police est parvenue malgré tout à arrêter l’un des assaillants. C’est alors que le frère de ce dernier est intervenu à son tour. Une confusion qui a fait monter la fièvre dans la cité. Une cinquantaine de personnes se sont massées autour des policiers qui ont fait usage de leur flash ball et de gaz lacrymogène. L’un des projectiles a atteint une femme au visage. Il s’agirait de la mère des deux frères interpellés. Transportée à l’hôpital parisien des Quinze-Vingts, elle a perdu son oeil.
Les forces de l’ordre débordées
Débordées, les forces de l’ordre ont appellé des renforts. Vingt-cinq équipages (une soixantaine de policiers) ont convergé vers la rue Decauville, où la tension est encore montée. Des jets de pierre ont accueilli les renforts. Trois policiers ont été légèrement blessés et un véhicule endommagé.
Dans le quartier de la Sablière, le calme n’est pas revenu tout de suite. Deux véhicules seront incendiés dans la soirée. La tension ne retombera qu’à 1 heure du matin.
Ce mercredi, l’inspection générale des services (IGS), la police des polices, a été chargée de faire la lumière sur cette nuit de violences. Elle a commencé par entendre les deux frères, dont la garde à vue a été prolongée. Elle devrait poursuivre ses investigations en auditionnant les policiers et les témoins impliqués dans l’émeute. Parmi, eux un conseiller municipal, incommodé par les gaz lacrymogènes.
Patrice Calmejane, député maire UMP de Villemomble, s’est ému de ce lourd bilan : «Il est possible que l’ampleur de l’attroupement ait surpris les forces de police. Leur intervention a peut-être été disproportionnée», concède-t-il. Pour ramener la sérénité, les autorités ont jugé plus prudent de ne pas positionner des forces de police dans le quartier cette nuit.
Un enseignant a déposé plainte ce mercredi, après avoir été agressé dans la cité des Marnaudes, à Villemomble. Ce professeur surveillait des épreuves du Brevet des collèges, dans un établissement du secteur. A la pause déjeuner, il est sorti et c’est à son retour au collège qu’il a croisé plusieurs jeunes qui pensaient manifestement qu’il était policier, d’après ce qu’ils lui ont dit. Lui s’en est défendu, assurant être enseignant. Il n’a pas pour autant évité les coups. Il s’est fait dérober de l’argent. Il a pu prévenir les secours.
Cette agression intervient dans le quartier où l’opération de police avait dégénéré la veille.
Carole Sterlé
LeParisien.fr
Contre la montée du fascisme, il est urgent de construire l’alternative
X et Y, Militants antifascistes et amis de Clément Méric, ils ont été témoins de son agression.
En nous levant mardi matin, nous sommes pris d’un haut le cœur. Une bonne partie de la presse en ligne relaie sans prendre de distances les propos aberrants de RTL. Il y a quelques temps, elle avait déjà déclaré Clément mort accidentellement à la suite d’une chute. Aujourd’hui, elle annonce qu’il serait l’agresseur de son assassin. A l’infâme, ces journalistes s’appliquent à ajouter l’ignoble et dans un seul but : appuyer le discours de la droite dure de Jean-François Copé, renvoyant dos à dos les « extrémistes ».
Au lendemain de la dernière grande manifestation que nous avions organisée en mémoire de Clément et contre le fascisme, les journaux se contentaient déjà des quelques miettes de sensationnalisme : une dizaine de vitrines de banques brisées par des gestes de rage. Les médias passaient à côté de l’essentiel ; à côté de cette saine colère exprimée d’une seule voix par des milliers d’individus, à côté de ces messages de solidarité internationale portés par des délégations venues de Russie, d’Allemagne, d’Italie, de Belgique, de l’État espagnol, du Pays-Basque…
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Nous étions des milliers dans les rues de Paris et des dizaines de rassemblements se tenaient dans d’autres villes de France. Nous n’étions que des milliers seulement alors que Clément venait d’être assassiné par des fascistes et qu’une série d’agressions de jeunes femmes musulmanes venait d’être perpétrée à Argenteuil. L’une de ces femmes a perdu l’enfant qu’elle portait, à la suite de coups au ventre, dans un silence médiatique assourdissant. La liste des agressions racistes, islamophobes et antisémites est longue. Celle de nos camarades antifascistes blessés par des commandos d’extrême-droite tout autant. A Lyon, ils additionnent des centaines de jours d’ITT, depuis maintenant trois ans. Et nous ne sommes que des milliers seulement à descendre dans la rue.
En allant manifester contre le fascisme à Chauny, la petite ville picarde, en 2010, en distribuant des tracts sur les marchés parisiens, nous avions pressenti ce recul alarmant de la conscience et des réflexes antifascistes, dans l’ensemble de la société française. Le FN, l’UMP et les groupuscules d’extrême-droite radicale – très présents sur le net – ont réussi à libérer la parole raciste et xénophobe à coup de « Karcher », de « charter » et de « pain au chocolat ». Il y a aussi eu les apéros « saucisson-pinard » des identitaires qui tentent de faire de la laïcité une arme pour diviser les travailleurs. Ce discours a progressé depuis des années dans une société atomisée, en proie au chômage de masse et labourée par les attaques d’un capitalisme de plus en plus féroce. Ce discours gagne du terrain, alors que par ailleurs les organisations progressistes reculent dans les entreprises et les quartiers.
Les renoncements de la gauche au pouvoir n’arrangent rien et jettent dans les bras du FN des milliers d’électeurs. La législative partielle qui vient d’avoir lieu à Villeneuve-sur-Lot en est la parfaite illustration. Le FN a prospéré sur les déboires d’une gauche affairiste, tandis que les politiques d’État de chasse aux Rroms apportent de l’eau au moulin de tous les xénophobes.
Alors que l’Europe s’enfonce dans la crise économique et sociale, nous ne pouvons laisser les nationalistes détourner la colère de ceux qui souffrent de leurs véritables ennemis : les puissances du capital. En Grèce le parti fasciste Aube dorée organise d’immenses ratonnades contre les travailleurs migrants, pendant que les instances financières saignent le pays. Il y a urgence à recréer l’unité des antifascistes et à partir en campagne contre l’extrême-droite. Dans la rue, dans les esprits, nous devons la combattre pied à pied.
Si une lutte antifasciste spécifique apparaît plus que nécessaire, nous ne pouvons pas imaginer faire reculer le fascisme sans en combattre les causes profondes. Nous devons recréer dans nos lieux de vie et de travail les liens sociaux qui préservent de l’isolement. Nous devons y développer les solidarités concrètes pour assurer les droits fondamentaux au logement, à un revenu descend et à l’éducation pour tous. Par nos luttes, par nos actions de solidarités concrètes nous devons faire renaître l’idée de progrès social et démocratique.
C’était le sens de l’engagement politique de notre camarade et ami Clément Méric ; il militait pour une révolution sociale et libertaire. Au quotidien, au travers de son action antifasciste ou syndicale à Solidaires Étudiant-e-s, il luttait contre toute les formes d’oppression et d’exploitation. Il a été assassiné pour cet engagement sans concession, mais il vivra dans nos cœurs et nos combats.
30 ans de HIP HOP, 30 ans de luttes
Agen. Deux festivaliers agressés par sept skinheads
oncert prairie du pont-canal
Le site de la prairie du pont-canal, hier matin. L’agression aurait eu lieu non loin de là, avenue du Général-de-Gaulle. / Photo Morad Cherchari
Deux jeunes de 25 ans qui avaient participé en tant que spectateurs au festival rock de la prairie du pont-canal, samedi soir à Agen, ont été passés à tabac par sept individus (dont deux filles) issus de la mouvance d’extrême droite skinhead, ou identifiés comme sympathisants du groupuscule «Troisième Voie» pour certains.
Les agresseurs présumés, en embuscade et alcoolisés, leur seraient tombés dessus avenue du Général-de-Gaulle.
Lorsque les deux jeunes ont quitté la manifestation, vers 3 heures, ils ont été interpellés par un membre du groupe qui leur aurait demandé s’ils sortaient du festival. À partir de là, ils se sont vu infliger des violences en réunion. Des injures racistes auraient également été proférées à l’encontre d’une des victimes, d’origine maghrébine, rappelant les traques et les heures sombres de la fin des années 70.
«Pas de place pour le racisme et la violence»
Le festival de la prairie du pont-canal, une institution, a été fondé par des bénévoles qui appartiennent au cercle d’études libertaires, un courant de pensée qui flirte avec l’extrême gauche et les mouvements «anar». Une sensibilité idéologique devenue, comme en témoigne le drame récent qui s’est conclu par la mort du jeune Clément Méric, une cible de choix pour les mouvances extrémistes. Les organisateurs du festival déploraient, hier matin, le fait que «depuis quatre ans, des agressions sont commises à la fin des concerts. Nous les condamnons. Voilà 40 ans que ce festival existe et il n’y a pas de place pour le racisme et la violence». D’autant que cette année, les faits ont franchi un seuil de gravité, si on se fie à la volonté affichée par les auteurs d’en découdre. Une plainte sera déposée par les membres du festival. Pour les bénévoles, la manifestation a de tout temps été prétexte à une fête populaire rassemblant des mélomanes, «mais avec le contexte actuel et comme en atteste la mort de Clément Méric, certains n’hésitent plus à frapper».
Les victimes ont subi des traumatismes à la face et au niveau des vertèbres, occasionnant jusqu’à 15 jours d’ITT.
Les sept agresseurs présumés, âgés de 22 à 30 ans, ont été interpellés par la police et placés en garde à vue. Gardes à vue prolongées hier soir pour un certain nombre. Selon les témoignages, un poing américain et une matraque auraient été exhibés lors de l’agression. L’heure était aux auditions, hier, pour tenter de connaître les motivations des auteurs. Certains sont «fichés» par la police. Mais la violence gratuite aux relents haineux avec un délit de faciès semblait privilégiée.
C.St-.P.
http://www.ladepeche.fr/
« A chaque fois que l’un d’entre nous est touché par une injustice, on doit tous se mobiliser »
Meurtre de Clément : halte aux mensonges !
Communiqué de l’Action Antifasciste Paris / Banlieue, 25 juin 2013 :
Depuis ce matin, l’ensemble de la presse en ligne reprend une information de RTL, au sujet d’une vidéo de la mort de notre camarade et ami Clément, sans la vérifier. A l’instar des journalistes qui diffusent ces calomnies nous n’avons pu visionner cette vidéo. Nous rejetons toutefois formellement l’interprétation qui en est faite. Les camarades présents avec Clément le 05 juin maintiennent leur version :
-oui il y a eu des échanges verbaux à l’intérieur du magasin devant les messages ouvertement racistes et tombant sous le coup de la loi arborés par les skinheads
-l’agression physique survenue à l’extérieur du magasin est le fait des skinheads qui se sont approchés, ont encerclé nos camarades puis les ont agressés. Les militants néonazis étaient armés de coups de poing américains et ont tué Clément Méric.
Il est donc impossible que des images montrent Clément se précipiter vers son agresseur pour lui porter un coup dans le dos. C’est au contraire Esteban qui a quitté le centre de la rue pour se diriger vers Clément. Les militants d’extrême-droite eux-mêmes n’ont jamais prétendu que Clément se soit précipité vers eux pour les frapper par derrière.
Les mensonges relayés dans la presse ne font qu’ajouter à la douleur de ses proches.
Paris, le 25/06/13
Avis de tempête
Voici un article publié par un site internet (dont nous ne partageons pas la ligne politique) qui décortique assez bien le discours de JP Morgan Chase, une énorme holding financière américaine, théorisant une contre-révolution préventive pour mettre en place des régimes autoritaires (notamment en Europe) dans un contexte de crise économique. Le point de vue de l’ennemi, exprimé avec un culot révélateur.
Dans un document publié à la fin du mois de mai, le géant des banques d’investissement américain JP Morgan Chase réclame l’abrogation des constitutions démocratiques bourgeoises établies après la Seconde Guerre mondiale dans une série de pays européens et la mise en place de régimes autoritaires.
Le document de 16 pages a été réalisé par le groupe Europe Economic Research de JPMorgan et est intitulé « L’ajustement de la zone euro – bilan à mi-parcours. » Le document commence par faire remarquer que la crise de la zone euro a deux dimensions.
Pour commencer, il affirme que des mesures financières sont nécessaires pour garantir que les principales institutions d’investissement comme JPMorgan puissent continuer à engranger d’énormes bénéfices de leurs activités spéculatives en Europe. Ensuite, les auteurs soutiennent qu’il est nécessaire d’imposer des « réformes politiques » destinées à supprimer l’opposition aux mesures d’austérité massivement impopulaires qui sont appliquées au nom des banques.
Le rapport exprime sa satisfaction vis à vis de l’application par l’Union européenne d’un certain nombre de mécanismes financiers visant à garantir les intérêts bancaires. A cet égard, l’étude souligne que la réforme de la zone euro en est pratiquement à mi-chemin. Mais le rapport réclame aussi davantage d’action de la part de la Banque centrale européenne (BCE).
Depuis l’éruption de la crise financière mondiale de 2008, la BCE débloque des milliers de milliards d’euros en faveur des banques pour leur permettre d’effacer leurs créances douteuses et de redémarrer une nouvelle série de spéculations. En dépit d’une pression grandissante venant des marchés financiers, le chef de la BCE, Mario Draghi a déclaré l’été dernier qu’il ferait le nécessaire pour consolider les banques.
En ce qui concerne les analystes de JPMorgan, ceci n’est cependant pas suffisant. Ils exigent de la part de la BCE une « réponse plus spectaculaire » à la crise.
Les critiques les plus dures du document sont cependant formulées à l’égard des gouvernements nationaux qui ont mis bien trop de temps à appliquer le genre de mesures autoritaires nécessaires à l’imposition de l’austérité. Le processus d’une telle « réforme politique » précise l’étude, a « même à peine commencé. »
Vers la fin du document, les auteurs expliquent ce qu’ils entendent par « réforme politique. » Ils écrivent : « Au début de la crise l’on avait pensé que ces problèmes nationaux hérités du passé étaient en grande partie d’ordre économique, » mais « il est devenu manifeste qu’il y a des problèmes politiques profondément enracinés dans la périphérie qui, à notre avis, doivent être changés si l’Union monétaire européenne (UME) est censée fonctionner à long terme. »
Le document détaille ensuite les problèmes existant dans les systèmes politiques des pays de la périphérie de l’Union européenne – la Grèce, l’Espagne, le Portugal et l’Italie – qui sont au centre de la crise de l’endettement en Europe.
Les auteurs écrivent: « Les systèmes politiques de la périphérie ont été établis après une dictature et ont été définis par cette expérience-là. Les constitutions ont tendance à montrer une forte influence socialiste, reflétant la force politique que les partis de gauche ont acquise après la défaite du fascisme. »
« Les systèmes politiques autour de la périphérie affichent de manière typique les caractéristiques suivantes : des dirigeants faibles ; des Etats centraux faibles par rapport aux régions ; une protection constitutionnelle des droits des travailleurs ; des systèmes recherchant le consensus et qui encouragent le clientélisme politique ; et le droit de protester si des modifications peu appréciées sont apportées au statu quo politique. Les lacunes de cet héritage politique ont été révélées par la crise. » Quelles que soient les inexactitudes historiques contenues dans leur analyse, il ne peut y avoir l’ombre d’un doute que les auteurs du rapport de JPMorgan plaident pour que les gouvernements adoptent des pouvoirs de type dictatorial afin de mener à bien le processus de contre-révolution sociale qui est déjà bien avancé à travers toute l’Europe.
En réalité, il n’y avait rien de véritablement socialiste dans les constitutions établies durant la période d’après-guerre partout en Europe. De telles constitutions visaient à garantir le régime bourgeois dans une situation où le système capitaliste et ses agents politiques avaient été totalement compromis par les crimes des régimes fascistes et dictatoriaux.
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