A propos des photos dans les manifestations

1. Pourquoi cette campagne ?
Suite à l’explosion de l’usage des appareils photo (smartphones, tablettes, drônes,…) par les manifestants, certaines personnes n’ont pas tout à fait conscience du danger qu’elles courent et font courir à d’autres en capturant des images et en les diffusant sur le net.

Un gréviste lançant un pavé (ou se tenant à côté d’un de ses camarades qui en ferait autant), une travailleuse qui aurait menti à son patron pour aller à une manifestation, des sans-papiers qui ne savent pas que l’Office des Etrangers tiendront leur activité politique en motif contre leur régularisation, un jeune manifestant qui s’est discrètement éclipsé face à des parents ou à des profs réactionnaires, militante antifasciste menacée par l’extrême-droite dans son quartier. Tous ces exemples, toutes ces « exceptions », nous les connaissons. Les manifestants prennent le danger de manifester face aux répressions policière, fasciste, patronale. Ils prennent le danger d’être fiché par la police et d’être filmé par des chaînes de télévision bourgeoises. Mais lorsqu’ils se retournent vers la manifestation, vers leurs camarades, ce sont certains manifestants qui le menacent, parfois sans même s’en rendre compte.coup de pied dans la banque

Certaines personnes argumentent que nous devons tous manifester à visages découverts dans les manifestations et que si les manifestants ne veulent pas être exposés aux yeux de tous, ils devraient se masquer, ayant ainsi le choix entre prendre un risque supplémentaire ou être interdit de manifestation. Dans d’autres cas, ce sont des gestes de rupture qui ne peuvent plus avoir lieu tant les téléphones et les perches à selfie sont omniprésentes. S’il est clair que les images des luttes doivent circuler et servir à partager les informations ainsi qu’à la propagande, le problème ne doit pas être retourné : la photographie doit rester un outil du mouvement social, et pas l’inverse. Trop souvent à présent, les manifestants sont devenus les modèles involontaires et forcés de photographes irresponsables. Face à cette problématique et suite à des situations où des militantes et des militants ont dû payer le prix de ces photos à la place des photographes, le Secours Rouge lance une campagne et une plateforme pour que les photos en manifestations -et ailleurs dans la scène- soient prises de façon responsable et réfléchie.

Suite de l’article et explications concernant la plateforme No Photo ; matériel à télécharger aidant à la réflexion à ce sujet à lire sur Secours rouge

 

Réflexions sur la critique culturelle

Réflexions sur la critique culturelle
Le journalisme culturel semble largement désuet. Pourtant, la critique demeure indispensable pour permettre le partage d’une sensibilité artistique.

 

Le journaliste Éric Loret propose une réflexion sur la critique d’art, de cinéma, de littérature dans son Petit manuel critique. L’ancienne critique professionnelle et institutionnelle, avec les revues spécialisées, voit son lectorat s’effondrer sans qu’il se reporte sur l’Internet. « Tout exercice critique dans les « vieux médias », désormais perçus comme institutionnel, se retrouve englobé dans une défiance politique générale et, au même titre que celle-ci, vilipendé », observe Éric Loret. Les renvois d’ascenseur entre critiques et les conflits d’intérêt entre l’industrie des médias, de la production et de l’édition expliquent un légitime dénigrement.

Mais la critique sur les blogs, les forums et les réseaux sociaux reprend les travers de la critique traditionnelle qui distribue les bons et les mauvais points selon des critères basiquement personnels. La prise de parole prime sur l’écoute. Plutôt que cet égotisme culturel, une critique universelle doit être ravivée. « Une critique de tous, avec tous, donc, et ayant en vue une même œuvre : le monde », propose Éric Loret. Le plaisir esthétique doit se tourner vers la conciliation et la communion plutôt que vers la séparation et l’indifférence. Le philosophe John Dewey insiste sur une philosophie esthétique qui renvoie à l’expérience ordinaire. La critique doit permettre aux individus de communiquer leur sentiment, leur perception et leur représentation du monde. La perspective de communiquer son sentiment fait partie du plaisir esthétique. L’expérience esthétique ne peut pas se réduire à une jouissance solitaire.

Le philosophe Jacques Rancière insiste sur le « partage du sensible ». Il propose une démocratie des intelligences égales, une « communauté inédite d’individus cherchant les moyens de se joindre à travers la forêts des signes et des formes, une communauté constituée au risque de trajets et de rencontres multiples sous le signe de l’égalité ». le spectateur artiste n’est pas un simple consommateur mais doit être incité à la discussion et au désaccord.

 

 

É. Loret, Petit manuel critique

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« Le monde tourne parce que nous contribuons à le faire tourner. » C comme Complot et Charlie…

Depuis quelques temps, les journalistes découvrent avec étonnement que ce qu’ils écrivent n’est plus lu sérieusement. C’est ainsi que la presse mainstreams’intéresse aux « théories du complot » qui fleurissent sur le Net depuis quelques années.

franceinfo-complot

Les médias paraissent surpris que des versions hallucinantes des faits qui se sont déroulés puissent avoir un succès ailleurs qu’à travers leurs canaux. Les grands médias ont pourtant bien souvent, eux aussi, des soucis de retranscription du réel. Certains détails manquent, l’exposé est manichéen, et bien souvent les personnes qui regardent les infos ou lisent le journal ont l’impression qu’on les prend pour des imbéciles.

Le fameux : « on ne nous dit pas tout / on nous cache tout » a des raisons d’exister : du nuage de Tchernobyl à la mort de Rémi Fraisse, il existe une multitude d’exemples où la presse dans sa grande majorité n’est ni neutre, ni exacte.

Comme les grands médias retranscrivent le réel de manière partielle et partiale, beaucoup d’entre nous sont tentés d’aller chercher des infos ailleurs. Ce n’est pas nouveau, il y a toujours eu des personnes qui ont enquêté par elles-mêmes ainsi que des journalistes qui ont fait un réel travail d’investigation avançant des preuves matérielles pour étayer ses affirmations.

Globalement, jusqu’à l’avènement d’internet, il y avait deux possibilités pour remettre en cause un événement dont certains faits avaient été occultés : le temps qui finissait par faire émerger certains aspects de l’affaire (voire la vérité) ou le traitement de l’affaire (méthode d’investigation) qui était remis en cause.

Aujourd’hui c’est plus simple : quand la version officielle ne convient pas, il en existe d’autres, plus satisfaisantes et disponibles rapidement sur le net.

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