🔖Infokiosque : 🐄 Entretien avec une militante antispéciste et anarchiste brésilienne 🌽

Pendant cette période, même entouré.e.s de gens convaincu.e.s par les problématiques environnementales et critiques des différentes formes hiérarchiques, quand on est végétalien.ne.s et antispéciste, j’ai l’impression qu’on est nombreux.es à traverser un petit moment de solitude  ; d’où mon envie de partager la lecture de ce texte.

Sandra, qui a vécu au Brésil où elle est née, appelle dans cet entretien à un véganisme «  populaire  », que je qualifierai peut-être plus de «  politique  » (même si tout est politique!), en contraste avec un véganisme plus bourgeois et déconnecté des problématiques sociales. Elle expose la situation agricole de son pays d’origine et ses conséquences sur l’accès à la nourriture, mais aussi sur la survie de la majorité de la population. Il en ressort que de très gros exploitants produisent de la viande et en inondent le marché local, rendant la viande moins chère que les légumes et les céréales, pendant que la production vivrière végétale est limitée par l’accès au terres.

La lutte des paysan.ne.s sans terres brésilien.ne.s qui dure depuis des décennies fait écho aux luttes contre la tendance mondiale à l’accaparement des sols par une minorité capitaliste qui vise toujours plus de profit, quand la majorité peine à subvenir à ses propres besoins en eau, nourriture et logements. Des activistes antispécistes rejoignent le mouvement des paysan.ne.s sans terres, en opposition avec les éleveurs industriels qui dominent la production alimentaire du pays.

Cet entretien est d’autant plus intéressant qu’il permet de faire le lien entre la consommation mondiale de viande et son impact désastreux sur les populations qui occupent les territoires dévastés par la déforestation où le bétail est élevé, dans le but principale d’être exporté. Alors c’est sûr, d’autres produits alimentaires qu’on peut qualifier de «  post-coloniaux  » comme le café, le chocolat, l’avocat, les bananes… sont inscrits dans un schéma productif qui ruinent les terres et empoisonnent des populations, et d’autres brochures abordent cette question, mais la spécificité de la production de viande au Brésil est le rapport social qu’elle entraîne entre géants industriels et production vivrière ( = destinée à la consommation locale).

Bonne lecture ! En téléchargement libre ici ou sur le site des éditions Cafarnaüm, les éditions anarchistes, antispécistes et intersectionnelles qui ont produit cette brochure !

– Chamade –

Pour un antispécisme anarchiste et nihiliste

Réponse à l’article « Libérer les animaux de l’antispécisme» publié sur Paris-Luttes.info le 10 Janvier 2017.

Si je réponds à cet article c’est parce qu’il a été publié sur Paris-Luttes.info et qu’il représente peut-être le point de vue de certain·e·s viandard·e·s “de l’extrême-gauche”. Mais c’est aussi parce que mon envie de rabattre l’outrecuidance de l’auteur·e me sert de prétexte pour défendre une position antispéciste, anarchiste et nihiliste.

Si vous exploitez et/ou tuez des animaux alors que vous pouvez faire autrement – ce à quoi je vous appelle dans ce cas à renoncer – ayez au moins le courage de ne pas vous justifier !

L’auteur·e anonyme de l’article « Libérer les animaux de l’antispécisme » fait preuve d’une outrecuidance qui prête le flanc à la critique. Cette prétention éhontée me gênerait moins si elle n’avait pas pour effet possible de raffermir le spécisme de certain·e·s. Car c’est l’effet que cet article doit avoir sur ceulles qui n’en aperçoivent pas les insuffisances rhétoriques et la mauvaise foi.
Le principal procédé sophistique qu’utilise intentionnellement ou non l’auteur·e de ce texte est la réduction. Ielle n’a pas cherché à reconnaître la possibilité d’un antispécisme anarchiste (donc anticapitaliste et illégaliste) et amoral et prétend démonter tout antispécisme en le réduisant à un antispécisme capitaliste, légaliste et moraliste. Ceci alors même qu’ielle écrit son texte parce que « [l’antispécisme] fait son chemin en milieu anarchiste» … Ielle reconnaît même seulement parler d’« une partie du mouvement antispéciste » et croit intelligent de préciser « mais je n’ai pas trouvé l’autre » ! Ielle n’a pas « trouvé » l’antispécisme anarchiste et nihiliste, donc il n’existe pas. CQFD ? On parle d’une position intellectuelle, pas d’un nouveau continent… pour la « trouver », il suffit de la penser. L’auteur·e manque soit d’imagination, soit de bonne foi. Je dirai de bonne foi.

Lu sur Paris-Luttes.info et lecture du texte en entier en PDF ici.

« Bambi a froid » : Réponse à la « radicale mise au point » de la Fédération anarchiste sur l’anti-spécisme

J’ai été déçu d’apprendre que le texte anti-antispéciste publié dans Zoop n°11 émanait d’un groupe de la Fédération Anarchiste. Camarades ! un peu de discipline ! Faut-il vous rappeler la décision prise, après un débat houleux mais n’en doutons pas franc et ouvert comme toujours chez vous, par votre congrès de 1995, je crois, et qui stipulait que de l’antispécisme, à la FA, on ne parlerait plus ? Ni en pour ni en contre ?J’ai été déçu d’apprendre que le texte anti-antispéciste publié dans Zoop n°11 émanait d’un groupe de la Fédération Anarchiste. Camarades ! un peu de discipline ! Faut-il vous rappeler la décision prise, après un débat houleux mais n’en doutons pas franc et ouvert comme toujours chez vous, par votre congrès de 1995, je crois, et qui stipulait que de l’antispécisme, à la FA, on ne parlerait plus ? Ni en pour ni en contre ?

Depuis, les militantes de la FA qui se sentaient quelque sympathie pour l’antispécisme ont sagement fermé leur gueule ; puis vous ont pour la plupart quittées, dégoûtées par cette libertaire chape de plomb. Camarades : vous aussi êtes tenues, par la dite décision, à fermer votre gueule. Ou alors, luttez pour l’abroger, pour que chez vous comme ailleurs on accepte le débat. Contradictoire. Je suis, comme tant d’autres, à votre disposition pour une rencontre contradictoire sur le thème, quand vous le voudrez.

Venons-en à votre « radicale mise au point ». Son but est en effet de clore radicalement le débat, mais il faut noter que le seul argument qu’il avance est pompé sur le radicalissime Luc Ferry) » dit « Philosophe du Président » Chirac qui l’a lui-même pris à Kant, fidèle disciple sur ce point (comme sur d’autres) des Pères de l’Église, lesquels s’inspiraient largement d’Aristote, le très libertaire précepteur d’Alexandre le Grand et auteur de la thèse radicale selon laquelle les esclaves, surtout non grecques, l’étaient par nature parce qu’incapables de liberté.

J’ai aussi entendu ce même auguste vôtre argument dans la bouche de mon Papa, qui cause comme Le Pen mais vote De Villiers. Ceci n’est pas bien sûr un argument de fond ; cependant, face aux tentatives répétées des anti-antispécistes comme vous de nous confondre avec Hitler qui-était-végétarien (faux), et/ou avec les anti-IVG qui-respectent-les-embryons-donc-les-poulets (faux), il est quand même bon de noter en passant que tant du côté des fascistes que de Luc Ferry, de Jean-Paul II et de Chevènement on souscrit massivement à vos thèses anti-antispécistes, alors que zéro pour cent de ces gens-là sont d’accord avec nos thèses, qui sont, en un mot, que personne ne doit être l’esclave de personne.

Votre argument, c’est : l’« Homme » (masculin, singulier et majuscule de rigueur dans votre bouche) relève de la culture, de la liberté, alors que l’« animal » relève de la nature, de la non-liberté. Vous n’avez pas beaucoup progressé depuis Aristote.

Nous n’avons donc pas attendu votre « radicale mise au point » pour répondre à cet argument ; mais bien sûr, il ne s’agit pas pour vous de débattre avec les antispécistes et de tenir compte de ce qu’elles et ils disent, mais seulement de leur clore le bec par la répétition incessante de ces mêmes arguments que seuls deux mille ans de pilonnage platonico-chrétien ont fini par rendre crédibles.

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L’homme est un loup pour le loup…

Ségolène Royal, la ministre de l’Écologie, a déposé un arrêté permettant d’abattre 36 loups contre 24 auparavant. Une bonne nouvelle pour les éleveurs, un mauvais signal pour les défenseurs de la nature. Quels sont les conséquences de cette décision ? La ministre remplit-elle sa fonction ? L’opinion de Pierre Athanaze, naturaliste et forestier.

Il y aurait 301 loups en France. Leur population est en constante augmentation depuis 1992. (Dawn Villella/AP/SIPA)

C’est à Valouise, le 5 juillet, à l’occasion de l’inauguration de la nouvelle Maison du Parc national des Écrins, que Ségolène Royal a franchi la ligne blanche qu’aucun autre ministre de l’écologie n’avait osé franchir avant elle, et s’est désengagée de la protection des parcs nationaux.

Ségolène Royal ne remplit pas sa mission

Dans ce lieu symbolique, elle a reçu les représentants des organisations agricoles, et s’est enorgueillie des arrêtés qu’elle avait précédemment signés, portant à 36 le nombre de loups pouvant être abattus dans 20 départements.

Allant plus avant, elle s’est vantée de celui à venir, qui autorisera les chasseurs, lors de leurs parties de chasse au grand gibier (battue, affût ou approche) à abattre des loups sans aucune déclaration préalable ni contrôle, et cela, sur l’ensemble des 20 départements de présence du loup. Même dans les départements qui ne comptent qu’un seul individu.

Autre première de la ministre de l’Écologie, Ségolène Royal a fait modifier ce projet d’arrêté alors qu’il était en cours de consultation. Bel exemple du peu de cas qu’elle fait de la démocratie participative dont, il n’y a pas si longtemps, elle vantait encore les mérites et s’en faisait la passionaria…

Dans sa forme première, l’arrêté qui prévoyait cette mesure sur quatre départements, avait été rejeté par le Conseil National de Protection de la Nature (CNPN). Et ce dernier a seulement été informé de la modification de l’arrêté, sans qu’il ait été à nouveau présenté au CNPN. Ce qui est, encore, une entorse à la réglementation.

Qu’y a-t-il de surprenant, alors que les deux premiers arrêtés anti-loup de Mme Royal avaient fait l’objet d’un rejet massif de près de 80% des citoyens, qui avait voulu faire entendre leurs choix, et qui étaient restés inaudibles à l’oreille de la Ministre.

Une posture politicienne

Mais rien n’arrête l’objectif d’en découdre avec le loup, bien que la ministre de l’Écologie reconnaissait le 28 juin dernier que « pour la première fois les dommages n’ont pas augmenté entre 2012 et 2013. ».

On est bien là dans une posture politicienne voulant coûte que coûte contenter les organisations agricoles, quitte à renoncer à la préservation de la biodiversité, qui était jusqu’alors, la mission principale d’un ministre de l’Écologie.

Qui est dupe ? Tuer un loup, et même cinq ou six dans un département, n’a jamais protégé les troupeaux. Le ou les loups qui viendront après, feront les mêmes dégâts, aux mêmes troupeaux tant que ceux-ci ne seront pas mieux protégés.

C’est ce qu’ont compris les éleveurs italiens, espagnols qui cohabitent avec 1.500 loups en Italie, et 2.500 en Espagne. La protection des troupeaux est la seule solution pérenne. Ces deux pays qui ressemblent beaucoup à la France, mais qui ont beaucoup plus de loups ne les exterminent pas comme on le fait en France, et ils ne connaissent pas non plus la crise ovine que la France traverse depuis des décennies.

Quel beau bouc émissaire que le loup, pour l’État français, qui n’a pas de solutions concrètes à apporter à la situation de la filière ovine.

Des battues d’effarouchement aux conséquences graves

Fort des déclarations de la ministre, le préfet des Hautes-Alpes a aussitôt pris des arrêtés pour organiser des battues d’effarouchement en zone cœur du Parc National des Écrins ! Alors que ces espaces sont, en théorie, les mieux protégés par l’arsenal législatif français (interdiction de perturbation sonore entre autres).

Des chasseurs, des lieutenants de louveterie, des agents ONCFS et de parcs nationaux ont fait leur battue d’effarouchement le 11 juillet, faisant fuir l’ensemble de la faune sauvage de cette partie du Parc National des Écrins, pour tenter d’en faire sortir des loups, qui étaient attendus de pied ferme, en limite extérieure au parc, par des chasseurs postés armés.

Cette entorse à la réglementation sur les parcs nationaux est très grave, d’autant qu’elle a eu lieu à une période où la plupart des jeunes animaux sauvages sont totalement dépendants de leurs parents. Ces effarouchements à l’aide de pétards et autres moyens sonores perturbent gravement le milieu, avec des conséquences lourdes, voire irréparables pour une partie importante de la faune sauvage.

La protection de la nature n’est pas une option

L’ASPAS et la LPO PACA ont donc déposé le jour même un recours contre l’arrêté du Préfet des Hautes-Alpes, tout aussi illégal que dangereux. Le préfet le lendemain, retirait de lui-même son propre arrêté sachant très bien le sort que le Tribunal Administratif allait en faire.

Par ailleurs, ce même préfet a annoncé mettre en place une mesure « expérimentale » consistant à ne plus faire de constats et d’expertises lors « d’attaques » sur des troupeaux concernant moins de cinq animaux. Les éleveurs seraient donc remboursés sans constat, et les dégâts directement imputés au loup ! Quelle que soit la cause de la mort …

Pendant ce temps, le 9 juillet, les députés adoptaient un amendement à la loi agricole, autorisant les éleveurs et leurs ayants droit à tirer le loup dans tous les départements où il est présent.

Décidément, la protection de la nature et de l’environnement n’est dans la culture politique française qu’un motifs à discours. Notre pays attend toujours des actes, de la lucidité. Et du courage !

Édité par Mathilde Fenestraz  Auteur parrainé par Muriel Fusi

LU SUR LE NOUVELOBS