Le Grand Soir, une mystification réactionnaire à l’origine d’un mythe révolutionnaire

On connaît bien l’expression de Grand soir. Mais sait-on que c’est sous la plume d’un journaliste réactionnaire que ce terme émerge en 1882 lors du procès de jeunes mineurs anarchistes en Saône-et-Loire ?

C’est en 1882 que l’expression Grand soir émerge dans le sens qu’on lui connaît depuis : celui du grand chambardement révolutionnaire qui fera table rase de l’ordre ancien. Plus précisément, en octobre 1882, sous la plume du chroniqueur judiciaire du Figaro Albert Bataille lors du premier procès de La Bande noire en Saône-et-Loire. La Bande noire, c’est sous cette appellation que de jeunes mineurs révoltés du bassin minier de Montceau-les-Mines revendiqueront leurs actions (incendie de chapelle, dynamitages de croix et domiciles de petits chefs…) de 1882 à 1885. J’ai retracé leur histoire dans un livre paru récemment (La Bande noire, éditions de l’Échappée). Dans une lettre à l’un des accusés du procès, le leader socialiste local de l’époque Jean Baptiste Dumay parle de « grand jour » qui « s’approche ». C’est sur la base de cette lettre que l’expression Grand soir va remplacer celle de « grand jour ». Comment ? C’est ce que je raconte dans l’article Le Grand soir mis à jour.

Yves Meunier
, auteur de La Bande noire, propagande par le fait dans le bassin minier 1878/1885, Editions de l’Échappée.

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Histoires d’anarchie…

Si vous avez un peu plus de 2 heures à perdre, Arte et Tancrède Ramonet ont produit un documentaire proposant une histoire de l’anarchie. De bien belles images dans un montage et un format ultra-classique (pas original du tout, et ne nécessitant surement pas les subventions reçues pour…), et quelques lacunes historiques. A titre d’exemple et pour ce qu’on a pu relever :

  • démarrer l’histoire de l’anarchisme avec Proudhon est tout de même très problématique dans la mesure où le bonhomme a multiplié les positions réactionnaires et essentialistes qui en font l’un des acteurs de la genèse du fascisme… A titre d’exemple on aurait (mieux fait de) tout aussi bien pu parler de Joseph Déjacques, inventeur du mot libertaire (utilisé à tire larigot dans le docu…) et critique contemporain de Proudhon…
  • pour rester encore avec Proudhon, le terme de grève générale est associé un peu vite à la pensée anarchiste, dans la mesure où il a été façonné par Georges Sorel, introducteur du marxisme en France, avant d’être…membre du cercle Proudhon, cercle antisémite datant de 1911 et regroupant des militants de l’action française et des « socialistes » et »anarchistes »…
  • Gabriel Prinzip n’était clairement pas anarchiste, c’était un nationaliste yougoslave…
  • l’incendie du Reichstag n’est pas le fait d’un anarchiste…Un communiste conseilliste Marinus van der Lubbe, en fut accusé par les stals et les nazis, mais rien n’assure qu’il n’était pas un bouc émissaire manipulé par les nazis pour établir la dictature. Néanmoins conseilliste et anarchiste organisèrent des comités de soutien.
  • la répression de la Commune et l’instauration des lois scélérates n’ont pas poussé les anarchistes vers la violence, comme le dit l’un des interviewés. La Commune était déjà une insurrection violente…
  • les anarchistes individualistes n’apparaissent pas avec Libertad et les bandits tragiques, ça faisait un bail que des anars lisaient Stirner…

Sinon vous pouvez en apprendre tout autant en lisant ce texte paru sur le site sous les pavés la plage

ANARCHISTES : UNE HISTOIRE COURTE MAIS PASSIONNÉE

https://youtu.be/YyleVzZpIGU